vendredi 29 juillet 2022

Cemetery Boys

Un roman d'Aiden Thomas publié chez ActuSF dans la collection Naos.

Présentation de l'éditeur :

Parce que sa famille latinx a du mal à accepter son genre, Yadriel veut leur prouver à tous qu'il possède les pouvoirs d'invocation des hommes et non pas celui de guérir, comme les femmes. 

"Le visage de l’esprit était tordu par une grimace, ses doigts noués dans le tissu de son haut. Il portait un blouson en cuir noir avec un capuchon sur un t-shirt blanc, des jeans délavés et une paire de Converse.
« Ce n’est pas Miguel », essaya de chuchoter Maritza, mais elle n’avait jamais vraiment eu une voix faite pour ça. Yadriel gémit et se passa la main sur le visage. Du bon côté des choses, il avait invoqué un esprit pour de vrai. Du mauvais côté des choses, il n’avait pas invoqué le bon."

Un premier roman qui laisse sans voix ; véritable mélange d’authenticité et d’émotions. Aiden Thomas signe ici un titre à lire absolument, qui aborde des sujets lourds tels que l’acceptation des personnes LGBTQI+, le racisme, la colonisation...
Yadriel a grandi à Los Angeles dans une communauté latino-américaine d’apparence classique, mais en fait composée de brujx (c’est le mot neutre employé pour désigner des sorciers). Dans la communauté de Yadriel, les hommes guident les esprits des morts vers l’au-delà et les femmes guérissent les vivants. 
Yadriel est un garçon. Toutefois, il a été assigné fille à la naissance. Aussi se débat-il tous les jours avec les préjugés de sa famille qui l’aime mais peine souvent à accepter sa transition et ne pense pas qu’il puisse posséder les pouvoirs d’un garçon. Sa mère le soutenait, mais elle est décédée. Quant à son père, qui assume la fonction de chef des brujx, il lui refuse le droit au portaje, amulette traditionnelle (un poignard dans le cas d’un garçon) qui accompagne le statut de brujo ainsi que la cérémonie qui ferait de lui un jeune adulte et un membre actif de la communauté. Alors Yadriel n’a plus le choix, avant le Día de Muertos et le retour pour quelques jours des fantômes des brujx décédés, il doit prouver à tous qu’il possède les pouvoirs d’un brujo. Bien sûr tout ne va pas se passer comme prévu et le fantôme que Yadriel espérait libérer vers l’au-delà va se montrer récalcitrant. Être un brujo n’est pas qu’une question de pouvoir et Yadriel a beaucoup à apprendre.
Cemetery Boys est un joli roman, très lumineux, une enquête sur fond d’amitié, d’espoir et de traditions. Il est souvent difficile dans ce monde de faire accepter son identité, qu’il s‘agisse de son genre ou de son orientation sexuelle, surtout dans une famille religieuse, même si celle de Yadriel ne l’est pas au sens classique du terme. Ses proches ont beau l’aimer, ils le blessent souvent. Tout ce qu’il souhaite, c‘est qu’on lui donne sa chance.
Avec sa cousine Maritza, une végane qui refuse d’utiliser le sang pour guérir, et la version fantôme de Julian, un garçon de son lycée mort dans des circonstances mystérieuses, il forme un trio improbable mais attachant. On pourrait reprocher à ces personnages de manquer un peu de maturité, mais ils ont quinze ans et des tas de raisons de ne pas faire confiance aux adultes. Ils ont aussi des choses à prouver, je suppose, alors je peux regarder leurs erreurs avec indulgence. Ce sont des adolescents crédibles, pas des super-héros mais des jeunes qui font de leur mieux et on les aime pour cela.
J’ai apprécié toute la mythologie entourant les brujx, leurs croyances et leurs traditions. Ce n’est pas courant. Toutefois, c’est le développement des personnages que j’ai préféré. L’intrigue n’est pas très complexe et manque de finesse, mais ce défaut est compensé par la charge émotionnelle du récit et la sincérité que l’on sent chez les personnages. En outre, les adolescents trans ne sont pas légion dans la littérature YA et il est important de leur y faire une place, surtout avec des histoires signifiantes, telles que celle-ci.

mercredi 6 juillet 2022

Bons baisers d'Ibiza

Un roman d'Iris Visser, publié uniquement en numérique chez Kobo Originals.


Je vous épargne le résumé de l'éditeur qui en dit beaucoup trop.


Si Eva débarque à Ibiza en début d’été, c’est loin d’être pour prendre les vacances qu’elle mériterait pourtant. Appelée au secours par sa cousine, elle est venue pour mettre ses compétences au service de ses grands-parents. Surendettés, ces derniers pourraient bien perdre leur paillote et avec elle le travail de toute une vie. Leurs deux petites filles sont bien décidées à tout faire pour les sortir du pétrin, même si cela veut aussi dire apporter du changement.
Tout en étant une romance, ce récit est aussi celui d’une famille et cela le rend touchant. J’ai beaucoup aimé la relation entre les deux cousines, qui sont très différentes mais complémentaires. L’amitié, même si ce n’est pas le thème principal, a son importance dans ce roman et n’est pas un tissu de clichés. Je dois reconnaître que ça fait du bien car l’amitié, surtout féminine, est souvent traitée de manière très superficielle dans les romans. Mia et Eva se soutiennent en toutes circonstances et même quand l’une émet des doutes sur les choix de l’autre, elle le fait avec bienveillance.
La romance, en revanche, utilise quelques lieux communs, cependant l’autrice en use à bon escient et sans trop insister dessus. On sait bien sûr toujours où l’on va, mais le cheminement est agréable, en bonne compagnie. Eva et Elias sont des personnages vraisemblables et assez sympathiques, si ce n’est attachants. Leur histoire sonne juste. Eva est une fille intelligente, qui ne pleurniche pas sur son sort et qui ne passe pas son temps à douter d’elle pour le plaisir d’être rassurée, même si elle n’a pas non plus une confiance à toute épreuve. Quant à Elias, si quelques clichés cliquettent à ses basques comme des casseroles, il a le mérite de ne pas être le prototype du mâle toxique que l’on retrouve dans les romances bien trop souvent à mon goût. Cela seul suffit à me le rendre agréable, toutefois j’avoue que son background familial ne brille pas par son originalité.
J’ai apprécié que le récit se déroule à Ibiza, ça change de ce qui se fait habituellement. Bien sûr, ce n’est pas très dépaysant pour une méditerranéenne, mais je me suis un peu sentie comme à la maison, ça compense.
Ce fut une lecture très rafraîchissante et pleine d’humour, une jolie romance estivale légère et néanmoins bien écrite, idéale comme lecture de plage.


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