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mardi 16 juillet 2024

Le Royaume des fantômes : Mœurs, folklore, littérature

Un essai de Jacques Finné, publié chez Terre de Brume.


Dès l’introduction, l’auteur exprime son désir de tendre vers l’exhaustivité des sujets traités dans son ouvrage, mais aussi de faire de celui-ci un point de départ pour le lecteur qui souhaiterait mener de plus amples recherches. On ne saurait trop s’attarder si l’on veut pouvoir explorer des pistes aussi nombreuses, le choix est donc logique. Ainsi il évoque le fantôme dans tous ses états et de par le vaste monde, accumulant les anecdotes et références. Il mêle aussi bien les échos de faits divers et croyances populaires que les récits issus de la fiction.
Le choix de mélanger le tout est discutable quand on prétend écrire un essai. L’auteur prend soin de le justifier dans l’introduction, cependant il ne m’a guère convaincue, même si j’ai une affection toute particulière pour la littérature fantastique et que les histoires de fantômes en constituent un pan non négligeable. Je ne suis pas contre le fait d’en parler dans ce livre, la place du fantôme dans l’imaginaire est un excellent complément (et disons-le sans ambages, le livre serait bien mince sans cela) mais la « réalité » (ou ce que l’on croit l’être et qui tient en tout cas du domaine de l’anecdote historique) et la fiction auraient dû être séparées pour davantage de clarté. L’auteur ayant en outre choisi de consacrer le dernier tiers de son livre exclusivement à la fiction, elle aurait pu s’y cantonner et nous éviter quelques répétitions. Au lieu de simplement illustrer le propos, la fiction lui sert à le justifier. Cela franchit à mon sens la ligne de l’objectivité qu’on est en droit d’attendre d’un essai.
On s’égare souvent entre ces pages et certaines informations laissent perplexe. A-t-on réellement l’utilité d’une longue liste de tous les sens figuratifs du terme fantôme et de ses synonymes, ainsi que des expressions populaires dans lesquelles on peut les trouver ? La leçon de vocabulaire mise à part, l’auteur aborde néanmoins de nombreux sujets, dont certains très intéressants. Il n’en reste pas aux apparitions humaines mais évoque également les lieux ou objets fantômes ainsi que le spiritisme. En cela je lui accorde qu’il nous offre de nombreuses pistes de réflexion et, somme toute, une bonne compilation de connaissances sur ce vaste sujet.
Cependant, la construction de cet essai me laisse dubitative. Pas de chapitrage (de temps en temps l’auteur se rappelle de glisser un titre pour esquisser un fantôme de plan — pardonnez le jeu de mot facile — mais persiste à partir en tous sens) ni d’organisation logique. Tous les thèmes se mélangent allègrement malgré quelques tentatives de créer des corrélations par-ci par-là. Cela n’est pas dérangeant à la lecture, pour peu qu’on soit doté d’un esprit curieux de tout, mais bon courage pour retrouver une information après-coup. La dernière partie, concernant le fantôme dans les arts, est un peu plus structurée, mais comme elle colonisait déjà le reste de l’ouvrage ce n’est qu’une compilation de plus, même si elle est cette fois chronologique. L’auteur semble ignorer de surcroît toute la production, pourtant fort riche, des quinze dernières années. On trouve peu de références datant d’après l’an 2000 dans ce livre, mais on peut en pêcher deux ou trois et la plus récente date, je crois, de 2008. Je me suis interrogé sur ce choix et il s’avère après vérification que cet ouvrage est en fait une réédition. Sa parution initiale date de 2012. Il aurait mérité une petite mise à jour, mais ceci explique cela. On ne saurait bien entendu être exhaustif, d’autant que le fantôme s’épanouit davantage dans la nouvelle et qu’on peut facilement passer à côté de certaines perles glissées çà et là dans des anthologies, dont certaines assez confidentielles. Toutefois, il s’en est passé des choses en vingt ans qui méritaient notre attention. Émane aussi d’entre ces pages un parfum de « c’était mieux avant » qui me laisse blasée, mais peut-être n’est-ce qu’une mauvaise interprétation de ma part.
L’auteur ne se prive pas de quelques raccourcis faciles et discutables pour justifier son propos. Certaines de ses remarques suintent la condescendance, voire la misogynie parfois, même s’il s’en défend et encense quelques rares autrices. J’aimerais l’inviter à s’intéresser à l’histoire de la mode et en particulier celle des vêtements féminins, il pourrait y apprendre quelques faits ignorés sur les corsets et dépoussiérer certaines idées reçues. C’est là qu’on voit qu’entre la littérature et l’histoire se trouve parfois un vaste fossé qu’il n’est pas bon d’ignorer sous peine d’y verser.
Mais revenons au sujet… Cet essai est donc un tissage de références, évocations succinctes qu’il faut attraper au vol, dont certes l’enchaînement n’est pas désagréable à lire mais aurait mérité une organisation plus rigoureuse et, surtout, substantielle. Pléthore de références et une abondante bibliographie vous ouvriront toutefois les portes de recherches plus ciblées ou de découvertes littéraires fascinantes si tel est votre souhait.


mardi 16 avril 2024

Sœurs d'Ys

Une BD scénarisée par M.T. Anderson et dessinée par Jo Rioux, publiée chez Rue de Sèvres.


Rozenn et Dahut viennent de perdre leur mère adorée. Tandis que leur père s’abîme dans les plaisirs et se décharge de ses responsabilités, les deux jeunes princesses doivent trouver le moyen d’apaiser leur chagrin  tout en découvrant quelles adultes elles espèrent devenir. J’ai particulièrement aimé les pages qui les montrent en parallèle, lors de leur première dispute. Chacune vit son deuil à sa façon et grandit tant bien que mal, livrée à elle-même. Pendant que Rozenn devient une bienveillante sorcière des bois, amie des animaux, Dahut s’adonne à la magie et recherche le pouvoir dans les livres. Elle qui détestait son père, elle en deviendra l’instrument.
Les deux petites filles emplies de chagrin deviennent ainsi deux belles jeunes femmes aux antipodes l’une de l’autre. Rozenn bat la campagne, insouciante, alors que Dahut profite des plaisirs de la cour, mais doit aussi en assumer seule les responsabilités. Deux sœurs autrefois proches qui se sont éloignées l’une de l’autre peuvent-elles se retrouver malgré les chemins si différents qu’elles ont empruntés et les rancœurs qui les habitent ?
Cette belle BD réinterprète la légende bretonne de la glorieuse cité d’Ys. Je dois avouer que c’est loin d’être ma réécriture préférée car trop simpliste et manichéenne à mon goût. J’ai aimé les deux sœurs, mais elles n’ont aucun relief. Il y avait matière à apporter de la nuance au récit et plus de profondeur aux personnages. En revanche, j’ai beaucoup aimé les dessins, l’usage de la couleur et la texture. J’ai pris grand plaisir à admirer les détails, à feuilleter et re-feuilleter ce livre pour en admirer les illustrations.

mardi 2 avril 2024

Panique à Wahlbourg, Bigoudis & petites enquêtes T1

Un roman de Naëlle Charles, publié chez Archipoche et chez Audible pour la version audio. Celle-ci est lue par Sébastien Desjours et Eve Reinquin.


Dans ce cosy mystery à la française, on suit Léopoldine, trente-six ans et maman de deux ados insupportables. Elle a toujours rêvé d’être flic mais est devenue coiffeuse. Oh, elle aime bien son travail, mais ça manque un peu de piquant à son goût. Alors quand elle trouve le corps d’une de ses connaissances dans le parking de l’hypermarché, elle est bien décidée à se mêler de l’enquête. Oui, dit comme ça, Léopoldine a tout l’air d’une écervelée. Cependant, elle ne l‘est pas. Elle prend certes des décisions discutables parfois, mais elle n’en est pas moins intelligente quand elle veut.
Son partenaire d’investigation, Quentin Delval, rêvait aussi de devenir gendarme, mais une sanction disciplinaire l’a placé contre son gré dans la petite ville alsacienne où a grandi Léo. Il a beau être gradé, il manque cruellement d’expérience et même s’il fait sa tête de cochon au début, il est bien content d’avoir l’aide de Léo. Quentin peut sembler détestable au début, mais si on arrive à passer outre les premiers chapitres, on se rend vite compte qu’il n’est pas si mal.
J’ai bien aimé la dynamique entre ces deux personnages qui semblaient pourtant très mal partis. Il faut dire qu’ils ne sont pas aidés, l’autrice ne leur a épargné aucun cliché. Léo prend particulièrement cher avec son horrible famille. Cela semble la norme dans les cosy, mais au moins elle se rebiffe, contrairement à d’autres héroïnes qui persistent à se laisser marcher dessus. 
L’intrigue ne casse pas trois pattes à un canard, mais reste plausible, même si très perchée sur la fin. J’ai surtout aimé l’ambiance de petite ville et les personnages malgré les poncifs. Le tout est quand même assez répétitif. Les ados, qui font office de ressort comique, deviennent vite lourds à la longue.
J’ai choisi la version audio de ce roman et je pense que j’ai bien fait. Elle se prête particulièrement bien à la narration choisie par l’autrice qui s’adresse souvent directement au lecteur. Je n’aurais pas eu la même patience avec la version écrite, d’autant que le style est assez simpliste. Les narrateurs ont fait un excellents travail et je crois qu’ils ont contribué à me rendre les personnages sympathiques. Ce n’était pas gagné, Léo et Quentin peuvent se montrer très arrogants au début, mais on apprend à les aimer petit à petit.
C’était sympa, mais sans plus. J’ai envie de donner une chance à la suite pour voir comment les personnages vont évoluer, mais ce ne sera pas dans l’immédiat.

mardi 26 mars 2024

Le Prince et la Couturière

 Une BD de Jen Wang, publiée chez Akileos.


C’est l’histoire d’une fille qui rêve de faire des robes extravagantes, mais fait office de petite main dans un atelier. C’est aussi l’histoire d’un prince qui, certains jours, préfère être une princesse. Passionnés de mode, Francès et Sébastien étaient faits pour se rencontrer, cependant, sans un coup de pouce du hasard, ils n’auraient jamais dû se croiser. Avec une bonne dose de foi l’un envers l’autre, ils vont décider de faire équipe et de vivre leurs rêves.
J’ai aimé la façon dont ces deux-là apprennent à se connaître et se livrent leurs secrets petit à petit. Leurs espoirs s’entremêlent et ils s’encouragent. Enfin, c’est le cas au début. Eh oui, parce que si tout était idyllique, il n’y aurait pas d’histoire… Nos deux jeunes personnages sont vite rattrapés par les réalités de la vie. Quand l’un a peur que son secret s’ébruite, l’autre craint de rester toute sa vie dans l’ombre…
On pourrait leur reprocher leur incapacité à faire des compromis, mais il faut se souvenir qu’ils sont fort jeunes et que la situation pourrait se révéler très problématique pour l’un d’entre eux qui a très peur de la réaction de son entourage. Francès et Sébastien sont attachants malgré la construction sans nuances de leur caractère. Ils restent avant tout deux adolescents qui essaient de trouver leur place, entre ce à quoi ils aspirent et ce que la société attend d’eux. L’un doit se conformer aux attentes et espoirs de ses parents qui le préparent à devenir roi, l’autre aux exigences de l’industrie de la mode qui brident sa créativité.
Jusqu’à quel point peut-on accepter de faire des concessions sans dévier de ce que l’on est et de ce que l’on  souhaite ? La question se pose d’autant plus pour un travail créatif comme celui de Francès ; entre ce que l’on aspire à créer et ce qui se vend, il y a parfois un monde. Si Sébastien est touchant dans sa façon de ne vouloir décevoir personne, Francès l’est quant à elle dans son amour pour son travail.
Cette BD nous conte une jolie histoire sur l’acceptation de soi, la tolérance et la volonté de croire en ses rêves. Cela manque un peu de profondeur, mais est néanmoins très mignon.
Les dessins, fort simples, dans un style un peu naïf, sont adaptés à la nature de l’histoire. L’usage de couleurs vives est bienvenu car il apporte de la vie à l’ensemble.
À la fin de l’ouvrage se trouve un court dossier dans lequel l’autrice explique son processus créatif. J’apprécie toujours ce type de bonus et celui-ci est intéressant.
C’est une belle lecture pour un jeune public.

dimanche 7 janvier 2024

Coven

Un roman graphique de Taous Merakchi pour le scénario et Da Coffee Time pour les illustrations, publié chez Dupuis.


Ève, Lily, Diane et Morgane se connaissent depuis l’enfance et fréquentent le même lycée. Toutes sont très attachées au vieil orme du parc que la mairie projette de couper. Elles font donc cause commune pour le sauver. D’abord elles pensent y parvenir grâce à une pétition et des manifestations, mais quand Lily lance une idée en l’air elles l’attrapent au vol et décident de miser sur le surnaturel pour s’assurer la victoire.
Si on excepte l’introduction, qui sert surtout à attiser la curiosité du lecteur, c’est devant l’orme qu’on fait vraiment la connaissance des quatre filles, alors que chacune se remémore ses plus beaux souvenirs liés à l’arbre et c’est là que j’ai commencé à les aimer. Ces adolescentes sont très attachantes, chacune a une personnalité bien à elle, cohérente et qui sonne juste. J’ai eu dès le tout début envie d’apprendre à les connaître et de les voir évoluer. Certaines sont davantage vouées à la figuration que d’autres et c’est bien dommage. Cependant, cela ne déséquilibre pas trop la dynamique du récit au profit d’une seule héroïne. 
Coven propose une intrigue classique et sans surprise, mais qui reste plaisante, surtout pour un jeune public. Quant à moi, qui suis sans doute un peu trop âgée pour cette lecture, il m’a semblé que l’autrice oscillait entre plusieurs influences sans vraiment trouver sa propre voix ni quoi faire de son histoire. Un peu de romance, un peu de chronique adolescente, un peu de fantastique, un peu d’horreur… Le mélange a pris, mais manque de consistance. Qui plus est, la fin m’a un peu déçue, même si elle fait sens de par sa valeur initiatique.
Ce n’était pas pour moi, mais j’ai quand même passé un bon moment avec ce roman graphique car j’aime les histoires de sorcières. J’ai de surcroît apprécié toutes les références culturelles glissées autant dans le récit que les dessins (qui pour le coup parleront sans doute plus à ma génération qu’à un jeune public) et ça m’a rappelé ma propre adolescence. 

lundi 6 novembre 2023

Mon ex et autres malédictions

Un roman d'Erin Sterling, publié chez Good Mood Dealer by Exergue.



À l’aube de sa vingtaine, Vivi est tombée passionnément amoureuse de Rhys Penhallow, mais il lui a brisé le cœur… Alors, pour faire passer son chagrin d’amour, elle a bu plus que de raison et déblatéré avec sa cousine. Classique. Sauf que Vivi est une sorcière et qu’elle a, sans vraiment le vouloir, maudit son ex. Ce qui ne semble pas beaucoup affecter Rhys, jusqu’à ce que, neuf ans plus tard, il revienne à Graves Glen pour une célébration importante.
Ce roman se laisse lire. Avant de commencer, je craignais un peu que Vivi soit une crétine égocentrique car le résumé pouvait le laisser entendre. J’ai été agréablement surprise. Vivi est une jeune femme intelligente, qui a la tête sur les épaules (enfin, la plupart du temps). Elle est beaucoup trop fleur bleue pour moi, mais son caractère est crédible.
De manière générale, les autres personnages sont plutôt chouettes, j’ai notamment adoré Gwyn, la cousine de Vivi. Il faut préciser que le fait qu’une meuf dont le prénom complet est Gwynnevere ait appelé son chat le Chevalier Noir a de quoi prêter à rire.
J’ai un faible pour les histoires de sorcières. Ce roman était de saison, amusant et sans prétention. Le seul point qui pèche, à mon sens, est le manque d’épaisseur de l’intrigue de fond. Je n’en attendais certes pas beaucoup plus, mais comme il n’y a pas grand-chose à dire, l’autrice rallonge la sauce, ce qui équivaut à pas mal de répétitions. Au bout d’un moment, j’en avais ras le bol des apartés de Rhys ou de Vivi se rappelant avec émoi combien leur ex leur avait manqué et combien il/elle était désirable. Ils sont mignons, hein, et on a envie de les voir de nouveau ensemble, mais de redite en redite on verrait bien aussi la malédiction leur exploser à la gueule pour souffler un peu. Et puis, il faut dire qu’ils ne font rien pour susciter l’indulgence. Pourquoi demander l’aide de gens compétents alors qu’on peut brasser de l’air ? Eh bien, parce que ça fait des pages en plus ma bonne dame…
Il ne se passe vraiment pas grand-chose, que ce soit au niveau de la romance ou des recherches sur la malédiction. Sur le dernier tiers, j’en avais ma claque, ce qui est bien dommage. Ce roman avait tout pour être une romcom witchy et sympathique. Cela reste distrayant, mais sans plus. Le deuxième tome portant sur d’autres personnages, je le lirai peut-être quand il sortira en français, mais je ne me jetterai pas dessus.


mardi 17 octobre 2023

Meurtres et cupcakes au caramel - Les enquêtes d'Hannah Swensen T5

 Un roman de Joanne Fluke, publié chez Le Cherche Midi pour la version papier et Audible pour la version audio. Celle-ci est lue par Flora Brunier.


Chroniques des tomes précédents :



On retrouve Hannah en automne en train de préparer Halloween et Thanksgiving. C’est une bonne saison pour ce type de roman car cela participe à l’aspect douillet du récit, d’autant que l’autrice nous offre au passage quelques recettes appétissantes qui aident à se mettre dans l’ambiance.
Comme toujours Hannah a beaucoup à faire avec son travail et sa famille. Sa sœur est enceinte et son beau-frère se présente aux élections pour le poste de shérif. Elle prépare aussi un livre de cuisine avec l’aide de ses voisines et l’une d’elles a mis la main sur une recette que sa belle-mère avait toujours refusé de lui donner de son vivant. Toutefois ladite recette comporte un ingrédient secret et c’est l’occasion pour le lecteur de faire tourner ses méninges en compagne d’Hannah et Lisa. Je dois dire que j’ai apprécié cette chasse à l’ingrédient mystère davantage que l’enquête sur le meurtre. Celle-ci est néanmoins plutôt bien construite quoique poussive. Hannah doit encore une fois se mêler des affaires de la police pour pouvoir innocenter l’un de ses proches et elle a toujours du mal à voir plus loin que le bout de son nez.
J’avais détesté le précédent tome, celui-ci est un peu mieux, néanmoins Joanne Fluke devrait quand même se renouveler, dans le fond comme la forme. Je me demande parfois si elle a fait une liste dont elle coche les entrées à chaque tome. On a de nouveau droit aux mêmes répétitions sur le chat qui est obsédé par la nourriture et les appels matinaux de l’insupportable mère, les mêmes réflexions sur les mêmes voisins... Ce sont des pages vite remplies et c’est lassant. Le schéma de l’histoire ne varie jamais non plus, tant et si bien qu’à la fin on se prend d’envie qu’Hannah y passe pour de bon tant c’est exaspérant de la voir toujours tomber dans le même piège. Les lecteurs ne sont pas aussi oublieux que l’héroïne, même sans enchaîner les tomes. On n’est pas des poissons rouges !
Le pire demeurant bien sûr le triangle amoureux le moins sexy de toute la littérature à travers les âges. Tout ça parce que Joanne Fluke persiste à penser qu’une femme non mariée est un problème à régler et que même si ça l’arrange pour l’instant qu’elle soit célibataire (et qu’elle le reste), il faut qu’on sache que son personnage est hétérosexuel et désirable. C’en est assez ridicule. Hannah n’aime pas Norman mais voudrait qu’il la demande en mariage, essentiellement pour sa maison. Elle continue cependant de fréquenter Mike, ce qui se résume à aller au resto de temps en temps avec lui et à lui rouler une pelle une fois par roman. Malgré les tentatives de l’autrice pour nous faire croire qu’il y a entre eux une attirance brûlante, ils ont ensemble la sexitude d’un fascicule promotionnel de supermarché.
Je suis team Norman, si tant est que je prenne la peine de me poser la question. Il a le même humour de merde qu’Hannah et ils sont compatibles sur bien des plans. Pourtant je sais qu’elle ne finira jamais avec Norman parce qu’elle semble éprouver envers lui le même enthousiasme qu’un enfant devant une assiette de brocolis vapeur. Toutefois. il est intelligent et sympathique. En outre, il ne la traite pas comme une faible femme (et c’est sans doute pour ça qu’elle ne l’aime pas, cette crétine). Mike est un bourrin qui n’a pour charme que son physique (et encore faut-il avoir les goûts d’Hannah qui kiffe les bûcherons moustachus bas de plafond). C’est un macho exécrable. 
Ce qui m’exaspère le plus est que je ne pense pas que l’une de ces relations soit vouée à évoluer. Je sens bien que l’autrice va nous sortir un autre homme de son chapeau à un moment ou un autre, probablement dans le dernier tome de sa série. Elle ne fait que meubler. Et si c’est le cas, ce serait vraiment se foutre de la gueule de ses lecteurs...
Joanne Fluke a des principes plutôt vieillots sur l’amour, sur le mariage et sur le fait qu’il faut laisser les hommes croire qu’ils sont plus intelligents que les femmes. Bon, Hannah n’étant pas très futée (elle bat son propre record de bêtise sur la fin cette fois), c’est dire à quel point les hommes en question sont abrutis… C’est pénible à force. Et j’aimerais aussi que pour une fois l’assassin soit plus nuancé, qu’il ait une conscience et des sentiments humains malgré l’horreur de ses actions. Que certains n’aient pas de scrupules, je le comprends, mais tous ?!
De manière générale, les personnages sont assez caricaturaux, toutefois ils restent l’intérêt principal de cette série, avec l’ambiance. On en aime certains, on en déteste d’autres, mais on a envie de les voir évoluer, même si ça se fait très lentement. J’aime beaucoup la relation d’amitié entre les deux sœurs. Elles sont très différentes mais elles commencent à mieux vivre avec ça et elles se soutiennent de plus en plus. Bon, Hannah devrait quand même faire gaffe, elle ressemble de plus en plus à sa mère… Elle est extrêmement dirigiste et critique envers ses sœurs.
Malgré tout, ce roman se laisse écouter. Flora Brunier, qui interprète la version audio, fait de gros efforts pour rendre cette histoire vivante et c’est tout à son honneur. 
Cette série ne casse pas trois pattes à un canard, c’est le genre de truc qui m’occupe bien quand je tricote ou que je fais des tâches ménagères (j’ai besoin de toujours garder mon cerveau occupé un minimum) et il n’existe malheureusement pas tant que ça de cosy mysteries en audio et en français.... 
Cependant, si j’écoute les tomes suivants (ce qui n’est pas gagné… J’étais plus intéressée par la recette de cupcake que par le résumé quand j’ai acheté le livre), je ne les chroniquerai plus. J’ai l’impression d’en dire toujours la même chose et bien que cela soit cohérent avec le contenu, ce n’est pas très utile. On lit des avis quand on hésite à commencer une série ou si elle évolue beaucoup au fil des tomes. Au cinquième, le ton est donné et il est clair que ça ne changera pas de sitôt alors je vais en rester là.

mardi 27 juin 2023

Fantomatique road trip

Un roman de Mathilde Payen, publié chez Syros.

Présentation de l'éditeur :

Cet été-là, Ninon et June décident de s'éclipser en douce et de partir toutes les deux sur les routes de France. Leur moyen de locomotion ? Un vieux solex et une petite carriole rafistolée, équipée de quelques provisions, deux sacs de couchage, une seule tenue de rechange pour chacune... Leur objectif ? Profiter de l'instant présent, loin des parents, loin du lycée, en oubliant tout projet d'avenir. Elles ignorent encore qu'un troisième larron sera du voyage : le fantôme d'un adolescent de leur âge décédé dans les années 70, qui va les entraîner bien plus loin que prévu, jusqu'à Londres...

Ninon et June rêvent d’un été de liberté et d’aventures, loin de leurs parents, des interrogations sur leur futur et des contraintes. Alors, sur un coup de tête, elles décident de partir en solex avec pour guide un vieux livre annoté par son précédent propriétaire. Bien sûr, leurs parents ne sont pas au courant de ce projet un peu fou…
Ce récit, tout comme les préoccupations de ses protagonistes, semble intemporel.
Je me suis rappelé les étés pleins de promesses qui semblent s’étirer sans fin mais qu’on sait éphémères… La fin de l’adolescence est un peu pareille : on sait que tout va changer bientôt, c’est là, quelque part, en périphérie de la conscience, mais c’est comme l’été, on ne voit pas la bobine du temps se dévider, on n’a pas l’impression d’en profiter assez.
Je me suis presque tout de suite entichée de ces deux filles avec leurs espoirs et leur culture qui ressemble un peu plus à celle de mon époque qu’à celle qui les a vues naître. Si Ninon, avec son enthousiasmes et sa spontanéité, donne son élan et son énergie à cette histoire, June, elle, lui apporte sa sensibilité artistique. J’étais prête à les suivre dans leur périple, mais comme nous le savons tous : rien ne se passe jamais comme prévu. Un troisième personnage entre dans l’équation et les filles vont devoir s’adapter.
J’ai aimé cette histoire pendant sa première moitié, vraiment, j’étais à fond, que ce soit à propos des vacances freestyle ou même quand on bifurque vers le surnaturel. Cependant, le soufflé est retombé. La dynamique qui se met petit à petit en place entre les membres de ce trio m’a déplu. Les petites mesquineries, la jalousie mal placée et les amourettes à deux balles, très peu pour moi. Je veux bien croire aux fantômes le temps d’une lecture, mais je n’ai pas cru à ces personnages ni à leurs décisions et encore moins à leurs sentiments. Pourtant, tout était réuni pour m’offrir une belle lecture d’été.
June est la narratrice et comme on vit le voyage à travers ses notes et autres réflexions, il est plus facile de l’apprécier que sa camarade. Cependant, même en tâchant de rester objective, j’ai eu de plus en plus de mal à supporter Ninon au fil de la lecture. June a ses défauts, mais Ninon ne pense pas à grand-chose d’autre qu’elle même et fait peu de cas de ses amis. C’est le genre de choses que je ne pardonne pas.
Sur la fin, j’avais juste envie que ça se termine pour passer à autre chose. Triste contraste avec les premiers chapitres que j’ai dévorés dans un élan enthousiaste.
La fin douce-amère m’a un peu réconciliée avec ce roman, mais la magie s’était évaporée depuis trop de pages pour que je sorte de ma lecture avec une bonne impression. C’est dommage. Faites-vous votre propre idée, peut-être que ce roman saura vous séduire davantage que moi.


vendredi 17 février 2023

Attention Spoiler

 Un roman d'Olivia Dade, publié chez Hauteville.


Marcus est beau et il le sait. S’il a pris l’habitude de jouer les abrutis auprès des journalistes, c’est pour qu’on lui fiche la paix. Pourtant, en secret, il écrit des fanfictions sur la série dont il joue l’un des personnages principaux. Afin de préserver l’image qu’il a mis tant de temps à construire, mais aussi selon les termes du contrat qui le lie à la production, il ne faut pas que cela se sache.
April est géologue. Elle écrit aussi des fanfictions, mais elle le cache pour des raisons différentes. Tout d’abord elle craint que cela lui fasse perdre son travail, ensuite elle n’a pas vraiment envie de dévoiler son physique à ses amis du fandom. Elle sépare donc ses deux vies avec application. Jusqu’au jour où elle décide qu’elle en a assez de se cacher et que ce n’est qu’une étape avant de, peut-être, pouvoir se rapprocher du gars avec qui elle échange sur le forum depuis longtemps et pour qui elle a le béguin.
Attention Spoiler est une romance sympathique qui se lit toute seule. Les personnages diffèrent de ceux que l’on rencontre habituellement dans ce type de romans et c’est appréciable. Marcus est un gars plutôt gentil et qui, pour un acteur, manque cruellement d’assurance. April est ronde et bien décidée à ce qu’on l’accepte comme elle est. Et quand je dis ronde, ce n’est pas juste une fille qui fait du 42 et qui en fait tout un drame, elle est obèse et elle a décidé que ça n’allait pas l’empêcher de vivre. En outre, elle ne maigrira pas d’un coup en trouvant le grand amour comme on veut souvent nous le faire croire dans les comédies romantiques. Pour couronner le tout, elle n’écrit pas des fanfics parce qu’elle n’a pas de vie, mais parce qu’elle aime ça. Elle adore son boulot, elle a de chouettes amis, dans sa vie l’amour serait juste la cerise sur le cupcake. Pour tout cela, ce n’est pas le genre de personnage qu’on croise tous les jours dans des romances et j’ai beaucoup aimé April.
À côté, Marcus est un peu fade. J’aurais voulu l’apprécier davantage parce que les personnages masculins dans les romances sont souvent toxiques et que ce n’est pas son cas, même s’il est très loin d’être parfait. Comment vous expliquer le problème ? Si vous regardez South Park c’est simple : Marcus est un clone de Principal PC. Et sinon… Je ne voudrais pas faire passer ce personnage pour plus niais qu’il n’est, mais c’est compliqué d’apprécier Marcus alors qu’il a de nombreuses qualités. Il n’est pas bête, cependant ce n’est pas non plus le couteau le plus affûté du tiroir et surtout il est politiquement correct en tout et tout le temps, même dans les moments les plus incongrus. C’est ennuyeux à la longue.
Marcus cache ses failles derrière son personnage public, il joue le rôle de celui qu’il appelle « le golden retriever bien propret » et en fait je n’ai pas vu grande différence avec l’homme qu’il est en réalité, si ce n’est qu’il est moins superficiel en vrai. C’est un bon gros toutou en adoration devant sa maîtresse. J’aurais aimé apprécier ce personnage, atypique en romance, mais il est trop complaisant. Ses rares défauts, ses faiblesses et ses petites lâchetés ne le rendent pas vraiment plus attachant.
April et Marcus ont tous deux des problèmes de confiance et une mauvaise image d’eux-mêmes, en grande partie à cause de leurs parents, et le parallèle entre leurs deux histoires est intéressant. C’est ce qui donne de la profondeur à leurs personnages ainsi que ce qui leur permet de trouver leur équilibre en tant que couple.
Ils sont mignons tous les deux et j’ai passé un moment plutôt agréable avec eux. Cependant je ne peux pas dire que c’est un roman inoubliable. Il n’est pas toujours bien écrit (ou bien traduit) et il souffre de quelques longueurs dues à des répétions.
Le récit est jalonné de résumés de fics ou de pitch de scénarios, de messages privés et autres petits textes qui le complètent bien. C’était une bonne idée et c’est plutôt amusant.
L’autrice a beaucoup d’humour et d’idées saugrenues, peut-être même trop. Les extraits de scénarios sont assez drôles, mais c’est à se dire que Marcus n’a joué que dans des bouses et je veux bien croire que certaines seraient tout à fait vendables, vu la médiocrité de ce qui passe parfois à l’heure actuelle.
Quant à la série qui a fait toute la gloire de notre personnage… Toute ressemblance avec Game of Thrones est pleinement assumée, toutefois si les références vous laissent de marbre, cela n’affectera pas votre lecture. De même, ladite série est aussi inspirée de l’Énéide, mais cela n’a pas grande incidence (et manque de finesse à mon goût d’amatrice de mythologie, bien que j’admette qu’on n’est pas là pour ça).
En tant que lectrice de fanfictions, j’ai apprécié de me retrouver dans ce petit monde que je connais si bien et je dois dire qu’Olivia Dade le décrit de manière très réaliste. Globalement c’est un microcosme plutôt sympa où les gens sont juste de grands gamins qui jouent avec des figurines et se lâchent souvent sans se prendre trop au sérieux, mais il y a aussi pas mal de poussière sous le tapis. Olivia Dade aborde par exemple la grossophobie, dans la vie de tous les jours bien sûr, mais aussi dans le fandom. Parce qu’il faut bien le reconnaître : elle y est présente, c’est même un ressort scénaristique facile pour rendre un personnage détestable au premier coup d’œil ou faire de l’humour à peu de frais. Et cela n’est pas propre à la fanfiction en particulier mais à la fiction en général.
Je me souviens avoir lu une fic il y a des années, vraiment chouette au début, bien écrite, intéressante. Et puis une blague merdique. Bon, on se dit que c’est un cas isolé, une maladresse, et on continue. Une autre blague moisie et encore une autre. Et puis un peu de transphobie en passant parce que l’autrice trouvait ça hilarant. C’est inacceptable. Sans chercher à devenir comme Marcus et Principal PC, il est bon de lutter contre des comportements inappropriés et des préjugés stupides qui pourrissent la vie des gens jusque dans leurs loisirs. Oui l’obésité est un problème de santé sérieux, non ce n’est pas en humiliant les gens qu’il sera réglé.
Olivia Dade aborde aussi des problèmes tels que la dyslexie et l’hyperactivité. Cela fait du bien de voir ces sujets traités dans un roman, parce que ça fait partie de la vie et que ça touche beaucoup de gens mais qu’on en trouve peu de représentations dans les médias, ou en tout cas pas de manière aussi naturelle.
Ce roman est le premier de ce qui est une trilogie (pour le moment). Les volumes suivants mettent en scène d’autres couples parmi les personnages secondaires. Le deuxième tome porte sur Alex, le meilleur ami de Marcus, et Lauren l’assistante qui lui sert de baby-sitter. Je ne sais pas si je lirai ce volume, je n’ai pas particulièrement apprécié la personnalité d’Alex et on sait peu de choses sur Lauren, mais je me laisserai peut-être tenter si j’ai envie d’une lecture drôle et sans prise de tête.

mardi 14 février 2023

Meurtres et tarte au citron meringuée - Les enquêtes d'Hannah Swensen T4

Un roman de Joanne Fluke, publié chez Le Cherche Midi pour la version papier et Audible pour la version audio. Celle-ci est lue par Flora Brunier.

Chroniques des tomes précédents :

Présentation de l'éditeur : 
Du sucre, de la bonne humeur, et un zeste de mystère... 
Ravis de célébrer le 4 Juillet, jour de l'Indépendance, les habitants de Lake Eden se préparent à faire la fête. Mais au Cookie Jar, la boutique de gâteaux d'Hannah Swensen, l'ambiance n'est pas vraiment au beau fixe. Hannah doit se mettre au régime, son chat lui en fait voir de toutes les couleurs et Norman, son prétendant, s'apprête à acheter une maison pour qu'ils s'y installent ensemble. Ce qui, pour elle, est un peu prématuré. Mais ce quotidien un peu morose va voler en éclats lors de la visite de cette maison. Au milieu des meubles anciens, notre héroïne et sa mère découvrent en effet le corps de la propriétaire, Rhonda Scharf. Et les restes d'un dîner pour deux, avec l'une des fameuses tartes au citron meringuées de chez Hannah. Qui était donc ce mystérieux visiteur, client du Cookie Jar, qui a disparu en laissant un cadavre derrière lui ? Tout le monde déconseille à la jeune femme de s'en mêler. Mais on connaît maintenant Hannah. Comment résister à une nouvelle enquête, surtout si elle commence dans sa propre boutique ?

Avec plus de six millions d'exemplaires vendus dans le monde, les aventures d'Hannah sont devenues un véritable phénomène. Autant vous prévenir tout de suite : ce nouvel ouvrage est hautement addictif. Tout autant que les recettes sucrées du Cookie Jar inclues dans ses pages !
Rien ne va plus à Lake Eden, un cadavre a été trouvé dans la maison que Norman vient d’acheter et ça va retarder les travaux, c’est terrible ! (Hannah et moi on a des priorités différentes faut croire…) Et, autre drame, Hannah doit perdre du poids sous peine de ne jamais trouver un mari. Pour oublier le chocolat, rien de mieux qu’enquêter sur un meurtre !
Je pensais qu’Hannah et moi avions trouvé un terrain d’entente, mais c’était avant d’entamer ce tome qui m’a tapé sur les nerfs d’un bout à l’autre.
Je veux bien passer outre les passages quasiment copiés/collés d’un roman à l’autre, même si honnêtement la routine matinale d’Hannah me gave et que, c’est bon, au bout de quatre tomes j’ai bien compris que son chat essaie par tous les moyens d’ouvrir le placard où sont rangées les croquettes, je n’ai plus besoin qu’on me le répète et je m’en fous. Ceci dit je note un effort de l’autrice cette fois car elle a décidé de troller Hannah lors du traditionnel appel qui l’empêche de partir au boulot et c’est plutôt amusant.
En revanche, j’ai eu beaucoup de mal à supporter les préjugés d’Hannah sur les tatouages, les filles qui s’habillent de façon légère et tant d’autres choses qui ne la regardent pas. Même quand elle pense soutenir sa jeune sœur, elle montre juste que son esprit est étriqué. Si tu penses « couple mixte », Hannah, c’est que tu n’es pas encore arrivée à bon port… Un couple est un couple, c’est tout, peu importe l’origine ou le genre des personnes qui le composent. Et je ne m’appesantirai qu’à peine sur sa critique constante de ce qu’elle appelle le « politiquement correct » qui fleure bon la boomer attitude. Ce roman a été publié dans sa version originale au cours des années 2000 et est censé se passer à cette époque. Pourtant, on dirait qu’il se déroule dans les années cinquante si on exclut les références, peu nombreuses, aux téléphones portables et aux ordinateurs. Joanne Fluke a le double de l’âge de son personnage et nous le fait bien sentir.
Ajoutons à cela que je suis assez perplexe face aux réflexions d’Hannah sur sa vie amoureuse. Un de ses prétendants construit une maison et elle a peur qu’il la demande en mariage (ce qui ne risque pas d’arriver vu qu’elle n’entretient pas de relation sérieuse avec lui) et quand il ne le fait pas, elle est déçue et… se met au régime. Elle a constaté qu’un de ses pantalons ne lui va plus, donc l’absence de demande en mariage ne peut venir que de cela. Quant à l’autre prétendant, elle oublie systématiquement qu’il se comporte comme un homme des cavernes juste parce qu’il lui fait mouiller sa culotte. Il est vraiment très condescendant et dirigiste, en plus il se permet des crises de jalousie régulièrement alors qu’il l’a prévenue qu’ayant perdu sa femme il ne veut pas de relation sérieuse. Dans le genre masculinité toxique, on ne fait pas mieux, mais apparemment dans le Minnesota, ça s’appelle être viril. C’est déplorable. Et on passe plus de temps à subir ces simagrées, et à glaner des astuces pour être une bonne femme au foyer (le recyclage des pots de confiture c’est important et on a attendu Hannah Swensen pour le savoir), qu’à mener l’enquête.
Parlons-en d’ailleurs de cette enquête… Le hasard, les zones d’ombres, les raccourcis défoncés et les facilités de toutes sortes n’ont jamais été aussi présents que dans ce tome. De surcroît Hannah est toujours aussi lente à la détente et l’autrice ne s’embête même plus à esquisser un semblant de fausse piste. On va droit vers le tueur, mais on ne sait toujours pas ce qu’il faisait là au même moment que sa victime. Je comprends bien qu’on lit ce genre de roman pour se détendre, mais un peu de substance, même dans les arcs secondaires et même si Joanne Fluke et moi n’avons clairement pas les mêmes opinions (c’est son droit), ça ne ferait pas de mal.
Ce tome est celui qui m’a le moins convaincue jusqu’à présent. Je vais faire une pause, probablement très longue.

mercredi 18 janvier 2023

Lumberjanes, Intégrale 1

Une BD de Brooke Allen, Shannon Watters, Grace Ellis et Noelle Stevenson, publiée chez Kinaye.

Présentation de l'éditeur :

Au camp pour filles badass de Miss Qiunzella Thiskwin Penniquiqul Thistle Crumpet, les choses ne sont pas toujours ce qu’on croit. Des renards à trois yeux. Des grottes secrètes. Des anagrammes !...

Heureusement, Jo, April, Mal, Molly et Ripley sont cinq meilleures amies qui n’ont pas froid aux yeux, et elles sont prêtes à tout pour passer ensemble des vacances d’été qui déchirent… et ce n’est ni une quête magique ni une bande de créatures surnaturelles qui vont les en empêcher ! Le mystère grandit de plus en plus, et ce n’est qu’un début…

Jo, Mal, April, Molly et Ripley passent leur été dans un camp scout pour filles (badass) : elles sont des Lumberjanes (mot formé à partir de lumberjack qui signifie bûcheron) et fières de l’être. Leur devise est « l’amitié au max » et elles l’appliquent tous les jours. Il se passe de drôle de choses autour du camp et nos cinq copines semblent être les seules à l’avoir remarqué. Elles sont bien décidées à tirer tout cela au clair, au grand désespoir de Jen, leur cheftaine, dont elles déjouent régulièrement la surveillance et qui angoisse à mort d’autant plus que Rosie, la responsable du camp, n’en fait pas grand cas.
J’ai été attirée par l’idée de base : une BD qui fait la part belle à l’amitié et qui encourage les filles a être braves, volontaires et à se soutenir les unes les autres. En cela, je n’ai pas été trompée, mais je suis un peu déçue quand même.
Les récits mis en scène dans cette BD manquent de consistance. Tout est fouillis, à l’image du style pictural, et pour commencer j’ai mis un temps fou à intégrer le nom des personnages. Heureusement pour moi, les portraits des filles et leurs personnalités sont exposés en fin d’ouvrage car dans l’histoire elle-même, on ne peut pas dire qu’elles soient développées et j’aurais eu du mal à dire qui est qui et quelles sont leurs caractéristiques sans cela. J’ai apprécié le goût du détail des auteurs qui ont créé une playlist illustrée pour chaque fille. Cela participe à les rendre plus vivantes. Mais ils en ont aussi fait des clichés sur pattes. On aurait pu s’attendre, vu le thème, à dépasser les stéréotypes ou s’en moquer, toutefois on patauge plutôt dedans. La seule qui subi une évolution notable est Jen, qui prend confiance en elle au contact de ses protégées. Elle est à mon avis le personnage le plus intéressant, car davantage mis en relief, de la BD. En tout cas elle est ma préférée.
L’arc principal et les courtes histoires qui composent la BD sont d’une grande simplicité : les filles voient un truc bizarre, genre un animal mutant ou une statue qui parle, et elles lui mettent une raclée. Ou alors elles voient un trou dans le sol et elles sautent dedans sans réfléchir… (Tiens, ça me rappelle un épisode de Buffy.) D’accord, elles sont intrépides et la force de leur amitié leur donne confiance, mais elles oublient quand même souvent de réfléchir avant d’agir (ou avant de cogner) et elles ne respectent pas grand-chose sinon leur envie du moment. Autant dire que c’est répétitif et exaspérant, d’autant que la fin n’est pas très élaborée non plus. En bref, il y avait certes une bonne idée, mais elle est concrétisée de façon assez médiocre.
Je n’ai pas été sensible au dessin non plus. Le trait est souvent grossier à mon goût, cependant j’admets que cela est subjectif. J’ai en revanche beaucoup aimé la galerie de couvertures à la fin de l’ouvrage.
Je dois en outre signaler un défaut de mise en page : toutes les introductions de chapitres, qui définissent les capacités récompensées par les badges que peuvent gagner les lumberjanes, sont amputées de leur fin. Ceci est d’autant plus dommage que ces extraits du manuel des lumberjanes sont intéressants, très positifs et porteurs d’importantes valeurs. Cela donne l’impression que l’édition n’a pas été soignée, d’autant qu’on y trouve aussi des coquilles.
Une seconde intégrale est prévue, mais je ne la lirai pas. On peut facilement se contenter de la première étant donné qu’il y a une conclusion, même simpliste.


mardi 17 mai 2022

L"Armoire des robes oubliées

Un roman de Riikka Pulkkinen chez Albin Michel.


Je m’attendais à une histoire familiale, trois générations de femmes se retrouvant alors que leur doyenne est en train de mourir et partageant des souvenirs, dévoilant des secrets. Ce n’est pas vraiment ce que j’ai trouvé dans ce roman. Cela en fait partie, mais demeure très secondaire. Cependant il est juste de préciser que je ne lis jamais entièrement les résumés de quatrième de couverture et que je n’ai pas choisi ce roman, on me l’a offert il y a des années. Je suis donc seule responsable de mes attentes.
Cette histoire est plutôt celle d’un chagrin d’amour et d’une dépression.
L’écriture est poétique, bien qu’un peu convenue parfois dans ce qui se veut des phrases élégantes et pleines d’une sagesse pénétrante, peinture minutieuse de l’âme humaine, et qui m’ont plutôt parues tissées de lieux communs. Cela reste agréable dans une certaine mesure, au début. On se laisse porter, on observe les détails, on écoute des opinions assenées comme de grandes vérités et on finit par s’ennuyer, voire s’exaspérer du ton de maîtresse d’école d’un personnage infatué.
L’histoire, elle, est assez banale. Elsa va mourir. Elle exaspère sa fille unique en prenant les choses à la légère. Mais comment faire autrement quand il reste si peu de temps ?
Eleonoora, ladite fille s’inquiète pour tout, veut tout contrôler, et ses angoisses énervent son entourage qui ne veut pas comprendre que c’est la seule façon qu’elle a de supporter la perte à venir. 
Et il y a ses propre filles, Anna la dépressive, à qui porter une robe appartenant à quelqu’un d’autre suffit pour lui donner l’impression d’absorber les émotions de celle-ci sans la connaître, et Maria la pragmatique. Puis, dans l’ombre, il y a Eeva dont Anna trouve une robe dans l’armoire de sa grand-mère. Cette découverte va remuer pas mal de souvenirs, mais pas forcément ceux auxquels ont s’attend.
Ce qui aurait dû être une chorale de voix féminines est en fait un solo. Celui d’Anna qui a besoin de se défaire d’un chagrin persistant. Alors quand elle exhume un secret tout droit venu du passé de ses grands-parents, elle le monte en épingle et réinvente avec sa propre histoire.
Le secret en lui-même est d’une banalité désolante. C’est typiquement le genre d’histoires faciles que je déteste. On nous parle d’amour, mais cela sonne creux et on se rend bien compte que derrière tous ces grands mots et ces accès de lyrisme il n’y a que des gens qui s’ennuient, des pseudo-intellectuels trop oisifs pour leur propre bien.
En réalité, le destin d’Eeva n’intéresse pas Anna. C’est sa propre histoire qu’elle transpose, pour mieux expurger son chagrin — je devrais dire sa dépression. Anna imagine la vie d’Eeva et se la raconte à la première personne. Elle aménage le tout au fur et à mesure qu’elle apprend des choses, avec un luxe de détails perturbant. Je ne dévoile aucun point clé du récit. On s’aperçoit de cela tout de suite. Anna a l’habitude d’inventer des histoires aux gens ; c’est un jeu venu de l’enfance. Elle les brosse dans le détail, jusqu’à leurs goûts culinaires ou leur façon de froncer les sourcils, comme si elle était finement observatrice — on sent l’influence des grands-parents, l’un peintre et l’autre psychologue — alors que ce ne sont que des envolées créatives et non de réelles observations. On peut déceler des fixations dans ces inventions (quel est donc son problème avec le mardi soir ?). Anna est entièrement tournée vers elle-même. Les portraits mentaux qu’elle esquisse lui permettent de mettre à distance sa douleur. En faisant vivre les événements à d’autres, elle les accepte. Ses délires quasi schizophréniques sont un peu pénibles à suivre, mais surtout malsains. Pas tant parce qu’elle invente — certaines personnes gèrent mieux les événements traumatiques en les transposant qu’en les racontant tels quels —, mais parce qu’elle utilise des gens réels — réels dans le roman s’entend — et ravive de vieilles blessures parmi les membres de sa famille à un moment très difficile de leur vie. Le procédé est puérile, égoïste et narcissique. Cela est d’autant plus frustrant que la réaction du personnage sur lequel le secret est susceptible de faire le plus grand impact est à peine effleurée.
Je n’ai pas si souvent que ça l’occasion de découvrir de la littérature finlandaise et même si je n’ai pas choisi ce livre et que je ne me serais pas dirigée vers lui de moi-même, je l’ai ouvert avec intérêt et curiosité. J’apprécie les récits familiaux, à petite dose, et les explorations psychologiques. Malgré cela, je suis passée totalement à côté de cette histoire. Je dirais même que je l’ai détestée. Je l’ai trouvée soporifique et d’une insondable vacuité. Même la couleur locale n’a pas réussi à me distraire de cette logorrhée thérapeutique.

vendredi 7 janvier 2022

L'anti-lune de miel

Un roman de Christina Lauren, publié dans la collection Hugo poche et chez Audible pour la version numérique.


Il me fallait un roman audio sans prise de tête à écouter en tricotant. Alors j’ai jeté mon dévolu sur une romance on ne peut plus classique : des personnages qui se détestent vont tomber amoureux, non sans traverser une pelletée de difficultés plus rocambolesques les unes que les autres. Dans le genre, ce roman-ci est plutôt sympathique, même s’il s’enlise souvent.
Olive est une fille un peu poissarde et complexée, d’autant qu’elle a une jumelle à qui tout réussi. Celle-ci est d’ailleurs sur le point de se marier au début du roman, tandis qu’Olive nage dans son marasme, ayant perdu son emploi quelques mois auparavant et pris du poids à cause de sa déprime. Néanmoins, les deux sœurs s’adorent et s’entendent à merveille (ouf, on échappe au cliché de la jalousie entre frangines !). Aussi quand Ami se voit privée de sa lune de miel par une intoxication alimentaire qui a touché tous les invités du mariage à l’exception de sa sœur et de son beau-frère, elle trouve tout naturel d’offrir à sa jumelle le voyage qu’elle avait eu tant de mal à gagner. Le hic est bien sûr que le mari d’Ami veut offrir son billet à son frère Ethan qui ne s’entend pas du tout avec Olive… S’ensuivent, bien entendu, de multiples mésaventures et quiproquos.
Ce n’est pas la romance du siècle, mais ça se laisse écouter. J’ai apprécié que l’héroïne soit latina, que sa famille la soutienne (on a si souvent droit à un entourage toxique dans les romances...) et malgré les grandes facilités et les clichés magistraux que se permettent les autrices, elles ont aussi insufflé un peu d’originalité à leur histoire.
En revanche, j’aurais sans doute mieux fait de lire ce roman plutôt que de l’écouter. Sophie Loubière ferait mieux d’arrêter la narration de livres audio pour retourner écrire des polars (quoique Dans l’œil noir du corbeau ne m’ait pas laissé un souvenir impérissable). Elle prend dans les premiers chapitres un accent affecté qui exaspère et donne de la protagoniste une image beaucoup plus niaise qu’elle n’est censée l’être. Sa façon de parler devient heureusement plus naturelle au fil de l’écoute. Elle est une lectrice agréable quand elle ne surjoue pas. Je déplore cepedant son incapacité à aligner ne serait-ce que deux mots en espagnol, toutefois la faute ne lui incombe pas, bien entendu. Personne n’a la science infuse. C’est un problème très récurrent dans les livres audio, c’est pour cela que je me permets de le soulever. On devrait fournir aux narrateurs un guide phonétique pour les termes étrangers. Ça paraît superflu ? Non, ça éviterait que des prénoms soient massacrés ou que m’hija (ma fille) devienne « mia » à l’oral…. Ce serait quand même le moindre des respects pour l’œuvre, les auteurs, les auditeurs et aussi les narrateurs.
Enfin bref, si vous cherchez une romance moderne et sympatoche, celle-ci en vaut bien une autre.

mardi 28 décembre 2021

Dans tes bras

Un roman de Talia Hibbert, publié exclusivement en numérique dans la collection Kobo Originals.


C’est parti pour une petite romance de Noël.
D’un côté nous avons Abbie, revêche mais juste assez pour cacher ses faiblesses. Parce qu’Abbie a grandi dans une tribu de garçons et qu’apparemment être gentille équivalait à tendre le bâton pour se faire battre, même si ses frères l’adorent. Et puis la vie ne l’a pas aidée à s’ouvrir aux autres. Elle sort d’un mariage désastreux et pense que le seul mec qui l’intéresse vraiment est devenu inaccessible. Donc Abbie est dévorée par toutes sortes d’angoisses, mais elle travaille là-dessus.
De l’autre côté nous avons Will, qui a grandi juste à côté de chez Abbie et qui s’est quasiment fait adopter par la fratrie. Il est devenu acteur, a conquis le monde entier, mais il reste le gars simple qu’il a toujours été. Le fait de n’avoir pas toujours eu la vie facile l’aide bien à garder les pieds sur terre.
Bien sûr ces deux-là sont amoureux depuis l’enfance, mais n’ont jamais osé se le dire… Peut-être en trouveront-ils l’occasion durant ces fêtes de Noël, censées se passer en famille dans la ferme écossaise de la grand-mère d’Abbie. En tout cas, c’est ce qu’espère Will. Et il a un plan.
Bon, disons-le tout de suite, je n’ai pas été enchantée par cette romance. C’est mignon, ça se lit vite et ça commençait plutôt bien, mais ça manque de relief. Ce roman est un squelette sans muscles ni chair. Il n’est pas abouti et c’est là son problème majeur. 
On dirait que l’autrice a voulu terminer son histoire le plus vite possible. Cela est flagrant dans la façon dont elle ébauche à peine ses personnages secondaires. Par exemple, les trois frères d’Abbie, dont deux sont plus âgés et un est son jumeau, ne semblent pas avoir de partenaires ni d’enfants. Certes, ils ont le droit, mais ça fait beaucoup d’adultes de plus de trente ans célibataires dans la même famille, non ? Ce sont des plantes vertes dans un décor en carton. Néanmoins cela pourrait passer, si la romance était plus construite. Pas forcément plus profonde (je n’en attendais pas tant), mais plus vivante.
Malheureusement, dans le même esprit d’économie d’intrigue ou de descriptions, il ne se passe pas grand-chose. Will dit « je veux » et Abbie répond « j’ai peur », pendant une centaine de pages (le roman en compte 119). Le schéma est vraiment répétitif car la majeure partie du récit se concentre sur l’analyse des sentiments des personnages. On se focalise sur l’un ou sur l’autre et sur leurs questionnements qui tournent en spirales. Ils ressassent leurs désirs et angoisses parce qu’ils ont peur du rejet et surtout de n’être pas aimés en retour autant qu’ils aiment, chacun étant persuadé que ses sentiments sont si forts que l’autre ne pourra pas le supporter… L’autrice aurait pu rendre cela plus vivant en racontant certains de leurs souvenirs, pour montrer comment ils sont tombés amoureux ou en les faisant davantage interagir durant ces retrouvailles, toutefois elle a préféré les monologues intérieurs. On sort de ce roman sans réellement connaître Abbie et Will.
Je trouve cela dommage parce que pour une fois le personnage masculin n’est pas un gars toxique. Will respecte les limites de la femme qu’il aime et c’est bienvenu quand on sait que la romance fait plutôt la part belle aux pervers narcissiques en général. En revanche, si Abbie est un personnage plutôt crédible (pas forcément sympathique, mais dont on peut en tout cas comprendre le comportement) je me suis souvent demandé de quelle planète venait Will… Comme si être gentil était forcément synonyme d’abruti dans la tête de l’autrice... il a le QI d’une huître et la capacité d’attention d’un chiot. Sérieusement, j’ai essayé de l’apprécier mais il est complètement à l’ouest les trois quarts du temps. J’ai même eu pitié. C’est à se demander comment ce gars retenait ses dialogues. Ceci dit, il explique lui même qu’il doit tout à sa belle gueule et qu’il ne se sert pas souvent de son cerveau. Au moins il en a conscience et sa créatrice aussi… Alors oui, un gars distrait peut avoir un certain charme, mais lui raisonne et agit comme un enfant.. C’est perturbant. Enfin, au moins il m’aura fait rire. De consternation, mais c’est déjà ça.
J’ai bien conscience d’être aussi revêche qu’Abbie dans cette chronique, cependant j’ai vraiment essayé de voir les bons côtés de ce roman. Je crois qu’il aurait gagné à être étoffé. N’en attendez pas trop, mais si vous voulez une lecture rapide et peu exigeante, une romance moderne sans macho ultra possessif, il pourrait vous plaire.


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lundi 18 octobre 2021

Le Serment de Jaufré

Un roman d'Anaël Train, publié aux éditions du 123.

Présentation de l'éditeur :

Il deviendra l'un des troubadours les plus prisés de la cour de l'inoubliable Aliénor d'Aquitaine, mais à 7 ans, Jaufré Rudel peine encore à comprendre l'injustice qui frappe sa famille, privée de ses terres par le puissant duc d'Aquitaine.

Alors qu'il vient de perdre sa mère, le petit garçon se découvre une passion pour le chant et la musique. Et si, face aux nombreuses épreuves qui l'attendent, cet art se révélait sa meilleure arme ?

Un roman passionnant où magie et chevalerie s'entrelacent en un tableau somptueux.


Cette lecture a été très pénible. Disons-le sans ambages : j’ai oscillé entre ennui et exaspération. Je me réjouissais de lire un roman historique, ce qui ne m’était plus arrivé depuis trop longtemps, mais me suis trouvée embourbée dans un récit falot, tissé de clichés tous plus éculés les uns que les autres, et dont le moindre retournement de situation s’est révélé désespérément prévisible.
Je m’attendais à un récit contant la jeunesse et les années d’apprentissage de Jaufré Rudel, cependant la narration est divisée en deux. Nous avons d’une part, à la première personne, l’histoire que j’escomptais et, en parallèle, les aventures des jumelles de Grimwald au service de l’Angleterre ainsi que d’une mystérieuse prophétie… Les chapitres consacrés aux jumelles sont narrés à la troisième personne, contrecarrant ainsi l’aspect biographique qu’a voulu donner l’auteur a son roman. Cela fait sens quand on sait que les personnages seront amenés à se rencontrer mais reste construit de telle sorte qu’il est très difficile de se laisser emporter dans cette histoire.
La partie consacrée à Jaufré est de loin la plus agréable à lire, même si en fait il ne se passe pas grand-chose. Je m’attendais à ce qu’elle soit beaucoup plus développée. Celle qui concerne les jumelles est en comparaison plus riche en action, mais pleine de contradictions, de facilités et de poncifs. Les méchants sont très méchants, les puissants sont capricieux et l’amour fleurit au premier regard…
L’histoire aurait gagné, je crois, à se focaliser sur l’apprentissage des personnages — la musique et la poésie pour l’un, la magie pour les autres — afin de les montrer dans leur domaine d’expertise puis de laisser au lecteur le loisir de les voir grandir et évoluer. Au lieu de cela, ils sont simplement ballottés par les événements et on ne prend jamais vraiment le temps de les connaître ni de s’attacher à eux. Ce manque de profondeur, dans l’intrigue comme dans les caractères, les rend plutôt antipathiques. Ils ne sont pas aidés par les personnages secondaires, caricaturaux au possible. 
Cette histoire est en outre pleine de longueurs et de contradictions. Un exemple : Tu as abusé de ton pouvoir pour forcer une jeune fille qui est sous ma protection à partager ton lit ? Pour te réprimander, je t’en envoie une autre, on verra ce que tu en feras… Exaspérant, vous dis-je.
Ce roman se veut préquelle du Lit d’Aliénor, un roman de Mireille Calmel — mère de l’auteur — que j’ai lu et apprécié il y a… une bonne vingtaine d’années. Mais si Le Lit d’Aliénor, malgré sa trame magico-druidique, au demeurant fort plaisante, avait une assise historique intéressante, ce n’est pas le cas de sa préquelle. On sent que l’auteur a fait des recherches en amont, mais c’est sans doute son sujet qui pèche et peut-être un peu le style. C’est raconté de manière très plate alors qu’il y a déjà trop peu à dire et le brin d’intérêt que j’ai réussi à trouver à l’enfance de Jaufré et à la jeunesse des jumelles de Grimwald est dû à ma lecture du Lit d’Aliénor et de La Rivière des âmes.
Je n’avais jamais souhaité me pencher sur les suites que l’autrice a apporté à ce cycle et honnêtement cette préquelle ne me donne pas envie d’y remédier. Je ne crois pas non plus qu’elle se suffise à elle-même, mais si vous avez aimé ces romans et que vous voulez prolonger un peu l’histoire, peut-être y trouverez-vous plus d’agrément que moi.

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lundi 28 juin 2021

Un été avec Albert

Un roman de Marie Pavlenko, publié chez Flammarion jeunesse.

Présentation de l'éditeur : 
" Je l'aime ma mamie, je l'adore même, mais faut avouer, dans le classement international des vacances de folie furieuse, elle se situe assez loin derrière le camping entre potes et les amours de vacances au bord de l'océan. " Après le bac, l'été de Soledad était tout tracé. C'était compter sans le divorce de ses parents et le début de dépression de son père. Changement radical d'ambiance et direction les Pyrénées, chez sa grand-mère. Alors que Sol imagine ses vacances vouées à un ennui mortel, un événement inattendu vient totalement les bouleverser. Entre journées en plein soleil et nuits terrifiantes, Soledad va vivre un été hors du commun.
On ne dirait pas comme ça, parce qu’elle peut se montrer assez puérile, mais Soledad est au seuil de sa vie d’adulte. Elle vient d’obtenir son bac et au lieu des vacances au camping entre potes dont elle a rêvé toute l’année, elle se rend dans les Pyrénées chez sa grand-mère paternelle pour profiter du bon air et surtout dégager le plancher. En effet, son petit monde vient d’exploser. Sa mère est partie avec un autre homme et son père dépressif, pour qui elle avait annulé ses vacances, ne souhaite pas sa présence à ses côtés. Autant dire que Sol l‘a mauvaise et qu’elle vit assez mal cette mise au vert forcée. Aussi attachante qu’exaspérante, la jeune fille enchaîne les bons mots (au point que ça devient parfois lourd même s’ils sont bien tournés) et se plaint à qui mieux mieux. Pourtant, ces vacances loin de tout (et surtout de tout réseau) vont peut-être lui permettre de renouer avec sa grand-mère qu’elle adore mais dont elle s’est éloignée en grandissant.
Le temps file et les gens ne restent pas éternellement là à nous attendre. Rien de culpabilisant là-dedans, c’est la vie et on a tous besoin de s’émanciper pour grandir, puis de revenir vers les siens ensuite. Je trouve que ce roman illustre bien ce fait, mais il ne s’arrête pas là. Sol va prendre conscience de la solitude de sa grand-mère dont le mari est mort récemment, va accepter le divorce de ses parents et va aussi s’ouvrir davantage aux autres alors que paradoxalement elle se trouve très isolée et… apeurée. Oui parce que si les journées de la jeune femme sont monotones, ses nuits sont emplies d’angoisses qui s’intensifient au cours de son séjour. Un cinglé rôde dans ce petit coin de montagne où il ne se passe jamais rien d’ordinaire et ce qui au début n’inquiète que Sol, que son entourage juge un peu excessive, va vite peser sur cette petite communauté. Pourtant, la grand-mère de Sol persiste à rassurer sa petite-fille en lui disant que le chêne du jardin, prénommé Albert, veillera sur elles. Autant dire que Sol est plus que dubitative et s’inquiète en outre pour la santé mentale de son aïeule… Il est temps pour elle de se responsabiliser un peu plus pour veiller sur les gens qu’elle aime.
Un été avec Albert est un roman qu’on lit très vite, parce qu’il est bien écrit et que malgré quelques lourdeurs dans l’humour de Sol ou dans la répétition des actions, on se laisse bercer par l’histoire — un peu glauque quand même — et par les réflexions de la jeune femme sur sa vie. J’ai apprécié ma lecture, néanmoins mon avis demeure mitigé car je n’ai pas adhéré à l’aspect fantastique du récit, trop pataud à mon goût. Je m’attendais à lire un roman humain, sur les liens entre une grand-mère et sa petite-fille, sur le choc entre deux vies tellement différentes, avec un peu de mystère en prime, puis ça a sombré dans le thriller mal dégrossi et le fantastique en carton pâte. Le méchant de l’histoire manque de profondeur et de tangibilité. Ses actes sont choquants mais n’apportent pas grand-chose au récit à part dégoûter le lecteur. Du coup, j’ai moins saisi la finalité de tout ça puisque ça fait surtout remplissage. Ce n’est pas assez abouti. Cependant, ce roman est une belle ode à la nature, j’ai beaucoup apprécié la subtilité avec laquelle l’autrice nous en rappelle les merveilles, loin des clichés éculés, dans ses descriptions et commentaires sur la faune et la flore. Pas d’envolées lyriques malvenues ni de niaiseries, elle parle d’insectes aussi bien que de fleurs médicinales. Le message est clair : prenez soin de la nature et elle prendra soin de vous. J’ai aussi aimé les personnages ainsi que les liens qui les unissent. Il est agréable de voir Sol mûrir durant cet été. C’est ce que je choisis de retenir de cette lecture.

dimanche 30 mai 2021

Le Souffle du géant

 Une BD de Tom Aureille, publiée chez Sarbacane.

Présentation de l'éditeur :

Deux sœurs, à la vie, à la mort.

La légende raconte que les lointaines Terres du Nord cachent des Géants dont le souffle a le pouvoir de ressusciter les morts… Il n’en faut pas plus pour Iris et Sophia. Nourrissant l’espoir fou de ramener leur mère à la vie, ces deux jeunes orphelines aux dons magiques extraordinaires se lancent à corps perdu dans un voyage aussi long que périlleux, sans prendre garde à la silhouette tapie dans l’ombre qui les suit à la trace…

Rien n’est trop grand pour les deux soeurs, mais sauront-elles rester unies face aux dangers qui les guettent ?

Iris et Sophia sont orphelines et livrées à elles-mêmes. Leur père a disparu sans laisser d’adresse quand elles étaient petites et leur mère est morte dans des circonstances très traumatisantes. Leur vie n’était déjà pas bien rose et elles peinent à se remettre de ce nouveau drame. Aussi, poussées par les légendes qui ont toujours fasciné leur père et le pendentif qu’il leur a légué, elles entreprennent un périlleux voyage vers le nord dans l’espoir de ramener leur maman à la vie.
Iris, l’aînée, est forte et combative alors que sa cadette, plus douce, aime observer la nature et se poser des questions, l’esprit toujours avide de connaissances. Si leurs caractères sont opposés, elles n’en sont pas moins très soudées et pas si sans défense que leur jeune âge le laisse paraître. Pourtant, leur démarche reste naïve. Elles n’ont aucune idée des dangers vers lesquels elles se ruent. Et puis, est-ce une si bonne idée de ramener quelqu’un à la vie ?
Iris et Sophia sont deux personnages attachants et on compatit vite à leur chagrin, de même que l’on tremble pour elles face aux dangers qu’elles affrontent. En effet, elles ne sont pas les seules à vouloir s’emparer du souffle d’un géant pour ramener un être cher et de nombreux pièges jalonnent leur route. Heureusement, si elles croisent beaucoup de personnes mal intentionnées, il y a aussi des gens bien.
Le Souffle du géant est une jolie BD sur la partie la plus difficile du deuil : l’acceptation, mais aussi sur la famille, la précarité et ce qui au final compte vraiment dans l’existence. Les deux sœurs vont grandir et s’affirmer, chacune à sa manière et choisir dans l’adversité le genre de personnes qu’elles veulent être.
J’ai déploré un scénario quelque peu linéaire, malgré quelques flash-back, bienvenus mais taillés à la serpe, concernant la mère des deux filles. Les personnages ne sont pas assez développés à mon goût. On apprend assez peu de choses sur le père et encore moins sur l’origine des pouvoirs des deux sœurs. J’ai néanmoins apprécié cette lecture douce-amère. Les dessins sont jolis, bien qu’assez classiques et ils servent parfaitement l‘histoire.


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