Un recueil de nouvelles SF de Jean Millemann, publié chez Ad Astra.
Quatrième de couverture :
Un jour, toutes les radios et toutes les télés interrompent leurs programmes simultanément pour diffuser en boucle l’évidence qui est partout dans le ciel. Les extraterrestres sont là. Les Zitis, comme on dit, parce qu’il est plus facile de leur donner un nom générique plutôt que de retenir celui de chaque espèce qui constitue cette communauté interstellaire. Bien sûr, les gouvernements terriens font semblant que rien n’a changé alors que leur oligarchie prend l’eau de toute part. Bien sûr ils s’efforcent de voler ce qu’on est prêt à leur offrir. Mais c’est la galaxie toute entière qui s’ouvre à l’humanité et c’est une opportunité que seuls les opportunistes sont incapables de saisir.
En trois textes qui évoquent les plumes et les thématiques de Philip Jose Farmer, Robert Heinlein et Isaac Asimov, Jean Millemann, philanthrope et xénophile, nous dit en substance que, un jour, toutes les radios et toutes les télés interrompront leurs programmes simultanément, ce sera le début du monde.
Sanshôdô est un recueil de nouvelles de science-fiction composé de trois superbes textes qui, s’ils sont tous très différents et indépendants les uns des autres, sont liés par le contexte dans lequel se déroulent leurs intrigues.
Nous sommes ici propulsés dans un avenir plutôt proche. Tout a commencé vers 2025 quand les extraterrestres sont un beau jour venus rendre une visite de courtoisie aux terriens, histoire d’instaurer des relations de bon voisinage. Leur but avoué étant le partage, la communion interraciale d’êtres « sapiens, » et si des mauvaises langues parlent plus de liens commerciaux qu’amicaux, ce n’est pas vraiment le principal dans les histoires que nous offre ce recueil.
Avec Sanshôdô, Jean Millemann nous propose une SF pleine d’espoir, bien que pas forcément optimiste. Tout n’est pas tout beau, tout simple dans ce futur immédiat, qu’il s’agisse de la situation chaotique dans laquelle se trouve notre planète ou du choc des cultures entre terriens et « zitis ».
La confrontation avec l’altérité est ce qui fait tout l’intérêt de ces nouvelles, essayer de trouver le bon en chacun de nous et des moyens de nous accorder malgré les différences et les heurts culturels, sans faire disparaître ces différences qui sont aussi une part de notre identité.
C’est un sujet qui me tient à cœur et que j’ai trouvé particulièrement bien développé dans ce recueil.
Dans Sanshôdô, nous avons donc trois nouvelles rédigées à la troisième personne pour trois personnages très différents : le savant idéaliste, le flic désabusé, le juge consciencieux. Sans vouloir les cantonner à ces archétypes, car ces personnages ne manquent pas de profondeur, c’est quand même ce qui résume le mieux leur personnalité.
Ces trois nouvelles, comme leurs narrateurs, sont extrêmement riches et leurs styles bien distincts. Jean Millemann a parfaitement adapté son écriture à chacun des personnages. Le flic, notamment, use et abuse des anacoluthes, ce qui rend son discours un peu plus familier, tout en étant très personnel.
Lanatkka-nagui, la première histoire, porte sur les choix que l’on peut faire, comme celui de voir nos ressemblances nous rassembler afin que nos différences nous enrichissent ou au contraire nous séparent.
On nous y expose le contexte, les maladresses induites par le choc de cultures, tout en sensibilité. C’est un très beau texte, très émouvant, sur la naissance des sentiments amicaux ou amoureux et leur construction malgré l’altérité, sur l’identité et le partage.
Leboeuf se paye une toile est un texte bien plus cynique, dont le style décalé est particulièrement savoureux. C’est drôle, plein d’esprit et donc très plaisant à lire.
On y apprend un peu plus de choses sur la situation de la Terre, sur les difficultés que rencontrent les peuples sapiens à s’entendre et se comprendre, mais aussi que toutes les différences ne sont pas vouées à être gommées.
Trois petits pas sur le chemin de la sérénité est mon texte préféré. À chaque lecture d’une nouvelle de ce recueil, j’ai pensé qu’elle emporterait ma préférence, mais au final c’est bien celle-ci qui a gagné et pas parce qu’elle se trouve être la troisième.
C’est vraiment une superbe nouvelle, un mélange de philosophie zen et d’art du thé touareg. Ça ne peut évidemment que parler à une amatrice de thé dans mon genre, mais j’ai surtout apprécié l’harmonie qui se dégage de cet écrit.
Tout n’est que justesse, recherche d’équilibre, dans ce texte. On nous y parle d’universalité, sans prôner l’assimilation ou l’uniformisation. De cette lecture vient une certaine sérénité, en cela c’est une parfaite réussite.
Ces trois textes illustrent le fait que les ressemblances doivent servir de pont entre les êtres, que les différences ne sont pas forcément surmontables, mais que ce n'est pas non plus une mauvaise chose car c'est de ces différences que naît tout l’intérêt de l’échange. Au fond tout est semblable et différent à la fois.
Je vous conseille vraiment ce très beau recueil. Évidemment, il faut être dans une humeur un brin philosophique pour l’apprécier pleinement, alors quand l’envie vous prendra de lire ce type de texte, pensez à lui, vous ne le regretterez pas.
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