Un recueil de nouvelles de José Wolfer, publié chez Persée.
Les êtres humains sont comme certaines maisons : la "façade" peut se révéler trompeuse, et ne rien dire de leurs mystères. Dans la "Villa Giudita" sur les rives du Lac Majeur, que Régis et Maïka croyaient déserte et vouée à la démolition, un vieux chanteur aigri espère l'improbable retour de sa partenaire. Régis et Maïka cherchaient à s'abriter de la pluie, les voici invités, à leur corps défendant, dans une histoire douloureuse aux feux mal éteints. Dans les autres nouvelles de ce recueil, d'autres êtres "se mettent en route", chacun à sa manière, joyeux ou désenchantés, tous avec l'espoir de trouver "quelque chose". Un géologue paléontologue court après le chapeau envolé d'une artiste, un chaman sud-africain et son secrétaire pistent l'insaisissable crâne d'un ancêtre décapité, un professeur traque le dramaturge anglais qui a humilié sa classe, un patron de cirque italien et une famille belge fraternisent à la faveur d'un embouteillage géant... Cortège cosmopolite qui illustre, dans la dérision ou la mélancolie, l'imprévisible engrenage des circonstances - le hasard - et les multiples façons de l'affronter. Ce qui unit ces personnages, aussi différents et éparpillés qu'ils paraissent, c'est un même désir de reconnaissance : aussi ne sauraient-ils rester immobiles, ou résignés, car c'est ailleurs, loin des routines et des repères familiers, qu'ils se découvriront le mieux. Partir, revenir, et entre les deux, avoir appris...
Certains pensent qu'ils font un voyage ; en fait, c'est le voyage qui vous fait ou vous défait (Nicolas Bouvier, L'usage du monde).
- Martel en tête ou les tribulations d’un royal crâne
- Massimo le magnifique
- Villa Giudita
- Lâcher prise
- L’été des deux chagrins
- La monnaie de sa pièce
- Un désir d’arc-en-ciel
- La chambre d’appel
- Si la photo est bonne…
Dans les neuf nouvelles qui composent ce recueil, il est plus question de rencontres que de voyages, au contraire de ce que laisse croire le résumé de quatrième de couverture. Ces textes dont les histoires sont en apparence simples, presque banales, nous parlent avec une certaine sensibilité du rapport à l’autre dans toutes ses variantes. Il y a ces personnes que l’on croise et qui changent nos vies, pour le meilleur ou le pire, ces rencontres brèves qui ne laissent qu’un mince souvenir et à cause desquelles, quand on y repense, on ne peut qu’explorer le champ des possibles en esprit avec nos « et si » approximatifs, qui resteront à jamais invérifiables. Rencontres dérangeantes, désagréables ou au contraire inespérées, gens qui ne se comprennent pas ou se comprennent au contraire trop bien, communion d’âmes, sympathie innée ou qui se tisse petit à petit… Les rencontres sont multiples, mais toujours enrichissantes à leur façon et c’est cela, cette alchimie fragile qu’il peut y avoir dans la confrontation à autrui, que vous trouverez dans ce recueil empreint d’humanisme.
Sans chercher à donner des leçons ou à montrer les gens meilleurs qu’ils ne le sont, l’auteur brosse des situations qui sortent un peu de l’ordinaire, ce qui évidemment justifie leur récit, mais n’enlève rien au fait qu’elles restent plausibles, presque normales.
Certaines histoires m’ont plus intéressée que d’autres, mais c’est plus une question de goût que de style. Il y a une grande cohérence dans ce recueil et les différents textes se valent plus ou moins en qualité. Le style varie peu, agréable, mais sans plus, avec ses longues phrases fleuves. Il y a par contre de nombreuses coquilles, des sauts de ligne inexplicables, un usage des tirets plutôt incongru et quelques autres petites erreurs de ce genre qui gâchent un peu la lecture et m’ont agacée. Mais revenons au plus important : les nouvelles en elles-mêmes.
Certains textes, donc, m’ont laissée de marbre, comme Villa Giudita ou encore Un désir d’arc-en-ciel, parce que, tout en n’étant pas déplaisants pour autant, ils sont assez convenus. D’autres par contre m’ont séduite par leur originalité. Je pense notamment au premier texte qui ouvre ce recueil et qui nous parle de la confrontation de deux cultures ou de deux visions du monde, cela dépend de quel point de vue on se place. Le mysticisme et la tradition se trouvent en face de la logique, qui n’admet ni l’à peu près, ni le symbolisme. J’ai apprécié le thème autant que la façon dont il a été traité.
Massimo le magnifique est une nouvelle aussi agréable à lire que la précédente, grâce, en grande partie, à son petit côté décalé. La situation sortant de l’ordinaire dans laquelle se trouvent empêtrés les personnages n’est pas non plus étrangère à l’intérêt de ce récit. C’est un texte pétri d’humanisme et c’est probablement pour cela qu’il me plaît.
Pour d’autres, comme La chambre d’appel et Lâcher prise, j’ai plus apprécié le propos que le récit en lui-même.
L’été des deux chagrins et Si la photo est bonne… sont pour moi un peu à part, par rapport aux autres textes. Ils sont consacrés à l’esprit de groupe, mais par l’intermédiaire d’un individu, sans doute pour ne pas présenter le groupe comme une masse compacte qui nous serait inaccessible. J’ai beaucoup aimé le premier, mais le second m’a laissé une impression mitigée, comme s’il manquait quelque chose à cette histoire, bien que la façon dont peuvent se créer des liens dans les groupes soit bien amenée.
Ma grande préférence va finalement à La monnaie de sa pièce, récit conté par un jeune homme. Celui-ci nous parle de la rencontre d’une classe avec un professeur un peu particulier et de cette année spéciale passée auprès de lui. Cette histoire de solidarité, de liens qui se tissent, d’alchimie qui se crée et perdure représente bien l’esprit de ce recueil, car il n’est, dans toutes ces nouvelles, question que de cela.
Je ne garderai sans doute pas un souvenir impérissable de cette lecture dans son entier, mais plutôt de certains textes en particulier. Quoi qu’il en soit, Villa Giudita et autres nouvelles et un recueil bien construit, cohérent, au thème plaisant et plutôt bien développé.
tiens, ça a l'air bien ça !!! :)
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