samedi 26 mars 2011

L'Héritière d'Owlon

Un court roman (dans les 185 pages) de Patrick S. Vast, publié par les éditions du Riez.

Quatrième de couverture :
Le 5 avril 1860, une terrible tempête de sable engloutit entièrement le petit village de Duynzeele situé sur les bords de la mer du Nord. Le lendemain de la catastrophe, on retrouve le corps sans vie de Sandie Entwistle, une jeune fille dont la destinée bousculera tous les principes de la rationalité, au point de la faire revenir à la vie, et de servir de révélateur à des faits troublants dont l’origine remonte à plusieurs siècles. Sandie, créature mystérieuse, amènera le Dr Wilhem qui a croisé son destin, ainsi que Josef Belecz, un enquêteur bien singulier, dans les entrailles d’une dune, dans les mondes de l’Invisible.

Une belle couverture pour un roman étonnant. C'est bien fait, c'est agréable à lire, mais j'aurais beaucoup de mal à expliquer ce que j'ai aimé dans cette histoire...
Le style est très agréable, l'histoire aussi bien écrite que pensée, même si quelques coquilles surgissent par-ci par-là. Ce qui est assez dommage car c'est bien le seul reproche que je peux faire à ce livre sur le plan formel.
Au cours de ma lecture, je n'ai cessé de penser que le récit coulait comme de l'eau, parfois aussi rapide et voyant qu'un torrent, d'autres fois courant silencieusement sous terre ou bloqué par des obstacles et soudainement éparpillé, mais dont les gouttes finissent toujours par se rejoindre et converger vers l'océan...
Les deux premiers mots qui me viennent à l'esprit pour décrire ce roman sont "troublant" et "étrange".
L'action se déroule lentement, comme un serpent indolent qui s'étire et on ne sait jamais vraiment où l'auteur veut nous emmener, jusqu'à ce que tout se précipite dans les cinquante dernières pages. Bien qu'il y ait un solide fil conducteur, à savoir le devenir de Sandie et ce qu'il s'est réellement passé lors de la tempête, de petites histoires l'entourent, peinant parfois à se recouper, pour mieux frustrer le lecteur, du moins au début... Car elles finiront par se rejoindre en constituant un étonnant et complexe motif.
Le récit flirte avec le fantastique quasiment tout le temps et pourtant ça n'en est pas. J'aurais bien du mal à classer cette histoire dans un genre bien précis et je n'en ai du reste pas vraiment envie, je n'aime pas les étiquettes, même si ça m'aiderait beaucoup de pouvoir lui en coller une afin de vous expliquer ce qu'est ce roman. Car il est difficile à décrire... Je mentirais si je vous disais qu'il s'y passe beaucoup de choses, je mentirais aussi si je disais qu'il s'en passe peu. C'est en fait bien au-delà de ça... C'est à la fois original et classique, imprévisible et pourtant d'une imparable logique.
J'ai beaucoup apprécié cette ambiance incertaine, cette teinte mystérieuse et légendaire qui imprègne de manière diffuse tous les événements qui s'entrecroisent. L'auteur a réussi à me surprendre avec des évidences et ça c'était aussi habile qu'intelligent. D'autant plus que j'aime l'originalité, tout en étant très attachée aux grands classiques du genre et à la vraisemblance de ce que je lis.
J'ai apprécié cette atmosphère trouble de réalité vacillante et ces personnages profondément humains qui semblaient tous liés les uns autres, qu'ils en aient ou non conscience, même si j'aurais aimé en apprendre beaucoup plus sur eux et sur le fin de mot de cette histoire. Sandie, malgré son inaccessibilité, est un personnage vraiment attachant et je me suis prise à m'inquiéter sincèrement pour elle et à éprouver une certaine nostalgie en la quittant.
Ce fut une bonne lecture qui m'a laissée une impression durable de rêve éveillé, de ceux que l'on fait au sortir d'un lourd sommeil, quand on n'arrive pas à se rendormir ni se réveiller vraiment.


Ce livre est pour moi le quatrième dans la catégorie imaginaire du défi ABFA et V&S 2011.

samedi 19 mars 2011

Loup y es-tu ?

Un roman d'Henri Courtade, publié aux éditions Mille saisons.

Quatrième de couverture : 
Et si les êtres maléfiques des contes de notre enfance existaient réellement ? 
Sans doute ces créatures vampiriseraient-elles notre planète. Elles seraient de tous les génocides, manipuleraient les plus grands dictateurs. Bref, tapies dans l’ombre d’Hitler ou sous le feu des projecteurs des plateaux télé, elles auraient entre leurs mains expertes le devenir de l’humanité.

Sinistre tableau !

Si de tels êtres vivaient, il serait à souhaiter que leur alter ego bienfaisant existe également. Qu’en ce début du XXIe siècle, ces personnages merveilleux s’éveillent et décident de se battre.

Et alors, qui sait de quel côté la balance pencherait…

Les lectures de février n'ayant pas été bien transcendantes, je n'ai pas eu grand-chose à dire ces derniers temps...
Ensuite je me suis payé le luxe d'une délicieuse relecture... Et ce fut sans doute une bonne chose car elle semble m'avoir ramenée vers de plus enthousiasmants ouvrages, celui-ci notamment.
Derrière cette sublime couverture se cache un roman étonnant et assez difficile à décrire, si bien que je me débats depuis un moment pour écrire un avis qui lui rende justice...
Pour moi qui suis une lectrice de fantastique et qui suis généralement obligée de me rabattre sur de la fantasy, ça a été un pur bonheur de voir s'effriter dans ce livre la frontière entre les deux genres car souvent, très souvent, il m'a semblé voir se dédoubler l'histoire, entre réalité logique et merveilleux magique, et retrouver du vrai fantastique, aux mêmes tons gris et incertains que les robes de Virginia. Du fantastique pour une histoire trouble, riche de détails, de pistes, de possibilités...
Imaginez, donc, comme le laisse entendre le résumé, que les créatures des contes de notre enfance sont parmi nous, imaginez que depuis des coins d'ombre ou même en pleine lumière, ces créatures agissent inexorablement sur le devenir de l'humanité...
Et si nous suivions leurs traces, que découvririons-nous ?
Un ouvrant ce livre, ces personnages que l'on croyait si bien connaître, pour les avoir longtemps côtoyés enfants, au point qu'ils nous paraissent être de vieux amis, nous entraînent dans leur sillage entre manipulations et complots mondiaux, rêves de gloire de jeunes filles insouciantes, souvenirs de guerres passées dont les comptes ne sont toujours pas soldés et réminiscences d'histoires (ou d'Histoire) si familières et pourtant si lointaines... Car finalement tout est-il ce qu'il semble être ? Connaît-on vraiment ces contes et leurs personnages ? Connaît-on réellement notre propre histoire ?
Reflets changeants d'un miroir à un autre, courses poursuites et jeu de cache-cache avant de croquer la pomme ou se jeter dans la gueule du loup... C'est un roman qu'il faut dévorer sans attendre, un tissage de multiples histoires qui font ce récit, mais aussi l'Histoire.
Les premiers chapitres et leurs histoires qui s'entremêlent sont emplis d'un suspense frustrant et d'une action trépidante. Les chapitres se télescopent avant que l'action se calme d'un coup, déstabilisant le lecteur pour la plus grande partie du roman en entrecroisant passé, avec des retours en arrière plus ou moins lointains, dans le désordre, et présent, voire même futur, au gré des cheminements et choix des personnages. Jusqu'à ce que le temps file de nouveau, que l'action s'accélère pour redevenir aussi fébrile qu'au tout début du récit.
Ce livre fait participer son lecteur et lui demande une attention constante car c'est petit à petit que l'auteur nous distille ses informations et que la moindre petite anecdote peut avoir une importance capitale. C'est original, tout en étant pourtant très familier, dans la forme comme dans le fond. On y retrouve ce qu'on connaît déjà, mais déformé ou vu sous un autre angle... Manigances politiques, mythes détournés, bribes de légendes et de contes, seconde guerre mondiale, terrorisme et médiatisation... Tout se mêle, éclairé par une lumière nouvelle. C'est une drôle de façon de raconter et de créer une histoire-puzzle, mais ce n'est pas déplaisant, surtout quand on aime, comme c'est mon cas, les histoires à tiroirs.
C'est déroutant et c'est brillant, car l'on va de surprise en surprise avec cette histoire et ces personnages... Froids et lointains, car n'étant définitivement pas humains, ne fonctionnant pas sur le même mode que nous, mais également attachants par certains traits, certains accents de sincérité et de vulnérabilité, certains souvenirs aussi, du temps où ils étaient humains... Ils sont différents des héros de nos souvenirs, mais néanmoins tout aussi marquants.
J'ai aimé leurs histoires, compatis avec certains d'entre eux. J'ai particulièrement apprécié Virginia et le Traqueur... Albe aussi, a su éveiller mon intérêt, bien que dans une moindre mesure, du temps où elle était princesse, puis les Veilleurs et leurs liens avec la seconde guerre mondiale, mais également la méchante de l'histoire. Si tant est que tout soit effectivement ce qu'il paraisse...
J'ai aimé ces personnages nuancés et surtout les réécritures de leurs histoires, cette vision de la théorie du complot et de l'humanité, avec ses travers, mais aussi ses qualités.
C'est un roman dont je me souviendrai longtemps, d'autant plus que j'ai adoré l'épilogue, moi qui craignais d'y trouver, un peu faciles, les éléments classiques d'un conte de fées. Vraiment, on ne pouvait rêver meilleure fin.
C'est un livre avec lequel il faut avoir de la patience et accepter de ne pas plonger totalement dans une action effrénée pour pouvoir récolter au fur et à mesure les éclats de miroir si divers qui constituent son récit.



Cet ouvrage a été lu pour le défi lecture ABFA et V&S de 2011.
C’est mon troisième livre pour la catégorie imaginaire.

samedi 5 février 2011

Masques de Femmes

Recueil de nouvelles écrit par Elie Darco et Cyril Carau.
Initialement paru aux éditions du Calepin Jaune et très prochainement réédité chez Sombres Rets
Quatrième de couverture : 
1800, les Lumières s’éteignent, laissant en héritage une certaine idée du progrès, retranchée du bonheur qu’on lui imputait. Durant les cent années qui vont suivre, les grandes cheminées vomissant la suie, les guerres toujours présentes, le colonialisme et les sciences refouleront jusqu’aux portes du néant l’irrationnel du tréfonds des rêves, l’inventivité des frontières de la pensée. Mais le surnaturel fascine et s’oppose à la raison, à la réalité policée d’une société plus industrieuse que culturelle, plus scientifique que mystique. Sur le tombeau du 19ème siècle, treize nouvelles fantastiques illustrées se recueillent, pour faire écho au romantisme noir, à l’esthétique macabre, au symbolisme qu’affectionnaient les artistes et intellectuels de l’époque. 
Paris, durant la commune, Cécile fuit la folie de la semaine sanglante en s’adonnant à des voyages, à des rencontres d’outre-temps. Prague, Deirdre la non-vivante, en quête de sang et de vérité, poursuit son engendreur de sa vengeance. Séville, une gitane tente de changer le destin d’un jeune médecin aux notes langoureuses d’un flamenco. Venise, Fausta, aristocrate et aventurière, plonge au cœur des sombres secrets de la cité des Doges. Londres, modèle et muse des peintres préraphaélistes, Jane vous invite au mystérieux festin des Dieux. 
Treize histoires de femme, mère, amante, épouse, femme du monde, femme fatale ou femme-objet. Treize destins étranges, troublants, tragiques ou émouvants à effeuiller comme un antique journal exhumé d’un grenier. 
Les nouvelles s'accompagnent de 18 illustrations noir et blanc de Cyril Carau et Elie Darco. 
Illustration de couverture : Elie Darco.


Table des matières :
  • Les nécropoles du destin.
  • Cante jondo.
  • Le quai des présages.
  • Une promesse d’ailes brûlées.
  • L’enfant s’en va en guerre.
  • La vieille femme et la mer.
  • Sous les masques.
  • Le festin des dieux.
  • L’origine du monde.
  • Descendance.
  • Moins que le pétale d’une fleur de cerisier.
  • Le témoignage de Natalia.
  • Des visages de la Lune : Coyolxauhqui et ses doubles.

Masques de Femmes est incontestablement un ouvrage qui m'a terriblement marquée, une de ces petites merveilles qui me font d'autant plus regretter le Calepin Jaune. J'ai donc été particulièrement heureuse d'apprendre sa prochaine réédition.
Le fait est que deux ans après ma lecture, toutes ces histoires sont encore terriblement vivantes dans mon esprit. Un enthousiasme qui mérite amplement d'être partagé.
A l'époque, je me souviens d'avoir écrit sur mon autre blog, en parlant de ce livre : J’attendais quelque chose de fabuleux, j’ai eu mieux encore. Et je le pense toujours. Ce fut une lecture intense, tantôt compulsive, tantôt lente quand je redoutais d'en voir arriver la fin. Et c'est avec regrets que j'avais refermé ce livre.
Que pourrais-je en dire mieux que ne le fait déjà la quatrième de couverture qui, pour une fois, est tout à fait conforme à l'ouvrage ?
C’était assez élégant et glauque, sensuel, spontané et surprenant pour que je me sente tout à fait chez moi. Ce recueil éblouissant, à l’image de sa couverture, est à la fois sombre et coloré, tissé d'ombres pesantes, denses ou seulement brumeuses, de couleurs vivantes, vibrantes, profondes et mystérieuses. L’écriture est délectable et raffinée, musicale. On n'a pas l'impression de lire un recueil, mais plutôt un roman aux multiples facettes et personnages car leurs histoires se font discrètement écho, pour enfin se rejoindre dans la dernière nouvelle qui le clôt de façon grandiose.
On plonge facilement dans cet univers, on s’attache aux pas des personnages et on les suit dans leurs fascinantes aventures, entre fastes et décadence.
Les personnes de mon entourage qui ont lu ce livre, m'ont souvent parlé d'une nouvelle en particulier Une promesse d'ailes brûlées. Quant à moi je serais bien en peine de dire laquelle j'ai préférée, parce que j'ai vécue chacune comme si j'y étais.
Dans Masques de Femmes vous croiserez des aventurières, femmes jalouses ou flouées, des hommes aux prises avec d'antiques déesses, des personnages aux fortunes diverses, aussi nobles que retors, des êtres légendaires et des vampires, dont une fichtrement psychotique, des sorcières gitanes, une femme luttant contre l'océan, une enfant étrange aux troublantes visions et une mystérieuse fiancée au parfum de cerisier, vous écouterez la mélodie de Cante jondo qui vous plongera dans son univers onirique ou encore la voix de Natalia contant son histoire, entre les parfums de souffre, de fleurs et d'océan et la magie des anciens mythes...
Je suis encore hantée par tous ces personnages dont j’ai adoré faire la rencontre. Alors n'hésitez pas, tournez, tournez les pages et suivez les pas de Deirdre, Nolan, Natalia, Gabriel ou Fausta… car ce qu'ils vous réservent vous fascinera, indubitablement.

vendredi 4 février 2011

Baron, the cat returns

Par Aoi Hiiragi, manga one-shot publié chez Viz Graphic Novels pour la version U.S.

Initialement, l’idée de cet ouvrage est née du fait que le studio Ghibli voulait produire un nouvel anime qui reprendrait des personnages d’un de ses précédents films : Si tu tends l’oreille, également adapté d’un des mangas d’Aoi Hiiragi.
Baron : Neko no Danshaku, The Cat returns en anglais, nous a donné Le royaume des chats qui a eu un certain succès, même s’il n’est pas comparable à celui d’autres productions de Ghibli bien plus connues.
C’est un bel anime, sympathique à défaut d’être grandiose, très lumineux, agréable à regarder et même si le scénario pèche un peu par facilité, il s’en dégage une atmosphère onirique et joyeuse qui laisse un bon souvenir au spectateur, quel que soit son âge. On retrouve cela dans le manga.
Il était prévu que la version papier sorte chez Glénat. Maintes fois reportée, elle est finalement tombée aux oubliettes, ce qui est bien dommage et m’a fait me décider à lire la version U.S.
A noter également que Si tu tends l’oreille n’est pas non plus disponible en français, que ce soit en version anime ou papier et qu’il serait grand temps de réparer cette erreur… Mais ceci est une autre affaire…
L’histoire contée par le manga diffère quelque peu de celle de l’anime, elle est un peu plus poussée, voire plus claire et logique par certains aspects, mais les événements s’enchaînent de manière moins fluide. Cependant, c’est une très agréable lecture. Au final, les deux versions se complètent bien, mais j’ai de loin préféré ce que le manga nous laisse entendre à propos de l’histoire personnelle d’Haru et de Yuki.
Haru, le personnage principal, est une jeune fille rêveuse, maladroite et plutôt attachante qui, parce qu’elle a sauvé un chat se retrouve embringuée dans une aventure abracadabrante… Car le père du félin qu’elle a secouru est le roi du royaume des chats et qu’il a tout un tas de projets pour elle, projets qu’elle n’apprécie guère, ce pour quoi elle va aller chercher de l’aide au bureau des chats…
C’est là qu’entrent en scène Toto, une pie dans le manga, mais aussi Muta et Baron, respectivement un félin caractériel et une figurine de chat déjà croisés dans Si tu tends l’oreille. Il faut bien admettre que la version papier leur donne un peu moins de charisme que l’anime, mais ce sont de très sympathiques personnages. Muta est notamment très drôle.
C’est une histoire sans prétention, légère et farfelue, juste de quoi passer un agréable moment. Les amis des chats l’apprécieront tout particulièrement. Je crois qu’elle plaira davantage à un public plutôt jeune et féminin.
Les dessins manquent parfois un peu de finesse, ils sont quelquefois trop sombres ou trop clairs pour qu’on les apprécie vraiment et les chats ont souvent un air halluciné, ce qui n’est pas forcément un mal puisque ça ajoute au comique de l’histoire. J’aime bien la bouille d’Haru, ainsi que celles du roi des chats et de Toto par contre.
Il est vraiment dommage que ce manga ne soit jamais sorti en français, mais le vocabulaire est assez simple, même quand on ne comprend pas grand-chose à l'anglais c’est très facile à suivre, alors si vous avez aimé le Royaume des chats, n'hésitez pas à vous lancer dans cette divertissante, et un brin onirique, lecture.


Cet ouvrage a été lu pour le défi lecture ABFA et V&S de 2011.
C'est le premier dans la catégorie BD et manga.

lundi 24 janvier 2011

Guerrière

Premier volume du diptyque des deux sœurs, de Marie Brennan, publié chez Éclipse.

Lorsqu'une sorcière naît, un double de son être est aussi créé. Pour que la sorcière vive et maîtrise ses pouvoirs, sa jumelle doit être sacrifiée. Telles sont les traditions. Telle est la loi.

Je n’en dirai pas davantage sur l’histoire car pour moi ces courtes phrases de présentation sont déjà trop et ce roman mérite qu’on ménage son suspense.
J’ai littéralement adoré ce récit. Ça faisait longtemps que je n’avais pas autant apprécié de la high fantasy. J’espère parvenir à partager en quelques mots l’enthousiasme qu’il a fait naître en moi.
L’histoire est tout bonnement excellente et vraiment bien construite. C’est original et inventif, tout en restant très cohérent. Je tiens beaucoup à la cohérence, tout comme à la vraisemblance, on peut bien me faire croire n’importe quoi tant qu’on garde une certaine logique, c’est ce qui me permet de m’immerger dans une histoire.
Et j’ai allègrement plongé dans celle-ci…
Elle est prenante, l’univers qu’elle décrit est complexe et riche de détails, mais l’auteur l’ébauche petit à petit, ce qui fait que le récit n’est jamais trop lourd, dans son fond comme dans sa forme. Il y a bien quelques petites longueurs dans la première partie, ou plutôt des moments d’attente, devrais-je dire, mais rien d’insurmontable. Ça ne m’a pas dérangée car d’une part je ne suis pas une fanatique de l’action non-stop et d’autre part parce que c’est très bien écrit et vraiment agréable de découvrir au fur et à mesure tous les aspects de ce monde, la hiérarchie des sorcières et leurs croyances, le fonctionnement des écoles de chasseurs et du clergé, en autres choses… J’ai vraiment adoré cet univers tout en nuances et tellement complet. Cependant les amateurs d’action pourront se sentir un peu frustrés par le premier tiers du roman. Cela dit, ça s’arrange bien ensuite.
On peut se sentir un peu étourdit au début par ce nouvel univers, mais cela passe assez vite (30 à 50 pages). Il y a un glossaire à la fin de l’ouvrage, mais je l’ai trouvé d’une utilité toute relative car s’il est appréciable d’y voir décryptés tous les titres honorifiques des sorcières (bien qu’il ne soit pas vraiment nécessaire de les connaître tous pour apprécier la lecture et comprendre l’histoire) ainsi que les spécialités des écoles de chasseurs et la correspondance horaires des carillons, il y aussi beaucoup de termes et de noms dont on aurait pu se passer et qui ne font que le rendre fouillis et perdre le lecteur en route… Je ne vois pas l’intérêt d’y ajouter des noms de personnages qui sont à peine évoqués ou croisés une seule fois par les héros…
Justement, parlons-en de nos personnages principaux… J’ai été très agréablement surprise par Miryo et Mirage et le sentiment qu’elles m’ont inspiré toutes deux me dit que l’auteur a vraiment bien fait son boulot. J’ai également apprécié Eclipse, Satomi, Eikyo et quelques autres. Tous les personnages de cette histoire sont de toute façon très travaillés, bien construits, intéressants et surtout très crédibles.
Le seul petit reproche que je pourrais faire, et encore ça ne m’a pas tant gênée que ça, c’est le foisonnement souvent inutile de détails concernant des personnages secondaires qui à part égarer un peu le lecteur n’apporte pas grand-chose à l’histoire. Mais ça ne m’a pas plus dérangée que cela…
Cette histoire m’a parlé pour bien des raisons, notamment pour ses concepts spirituels et philosophiques, mais elle est aussi très accessible pour les personnes qui ont d’autres principes ou qui ne veulent pas s’intéresser à cet aspect du récit. Elle a plusieurs niveaux de lecture et peut donc toucher plusieurs publics.
Le style en lui-même est excellent et maîtrisé, élégant, voire même poétique. L’auteur a réussi, malgré la densité de son récit et la complexité des concepts qui le sous-tendent, à créer une certaine harmonie, tout en finesse et clarté.
Il y a derrière cet ouvrage un travail vraiment brillant qui fait que j’ai hâte de lire la suite et que je conseille très vivement cette lecture.


Ce livre a été lu pour le club de lecture de Vampires & Sorcières.

C'est aussi le second livre de la catégorie imaginaire pur le défi ABFA et V&S 2011.

samedi 22 janvier 2011

Le livropathe

Une pièce de théâtre de Thierry Debroux, publiée chez Lansman.

Je ne peux pas appeler ce blog les carnets de lecture d'une livropathe sans rien écrire à propos de cette pièce de théâtre qui a marqué mon parcours de lectrice.
Tout lecteur passionné a de ces petites anecdotes qui lui rappellent pourquoi il aime tant les livres et qui lui démontrent à quel point ils le lui rendent bien. Le hasard est un très bon ami pour le lecteur et parfois il vous amène un de ces livres dont l'histoire se mêle à votre propre histoire... Quelquefois il a des choses à vous apprendre, mais le plus souvent il se contente d'engager avec vous une conversation étrange, tissée de symboles, de signes et de sensations, il est comme un écho partiel et lointain ou comme le reflet d'un miroir déformant. Quoi qu'il en soit, vous savez que son souvenir vous accompagnera longtemps, pour ne pas dire toujours.
C'est le titre de cet ouvrage-ci qui m'a attirée en premier. Il me parlait, me considérant depuis toujours comme une livropathe moi-même et usant de ce terme avec mes amies. Car, comme j'ai eu l'impression que le personnage le sous-entendait, livropathie et bibliophilie sont deux choses bien distinctes... Et il y a longtemps que j'ai appris où se trouvait la limite.
Théo, le livropathe de l'histoire, vit dans une immense bibliothèque, il est collectionneur, mais également, et surtout, lecteur, c'est le gardien de cet univers de papier qui bruisse de tant d'histoires différentes. Cependant Théo a un problème, il n'a jamais pris la peine de classer les livres, se fiant pour les retrouver à son odorat, car chacun a pour lui un parfum différent et parfaitement reconnaissable, facile à suivre à la trace  quand on le connaît, malgré le nombre impressionnant d'ouvrages. Seulement il a perdu son flaire à cause de la poussière et donc dû engager Ava pour l'aider à remettre bon ordre dans son royaume.
Étrange jeune femme que cette Ava, qui semble poursuivie par la mort, élève étonnante et sceptique chez qui Théo décèle le don de "sentir" les livres et à laquelle il va commencer à enseigner son art malgré sa réticence... Mais il y a ce livre interdit dans la vitrine, il y a cette précédente employée disparue sans prévenir ni laisser de traces et surtout il y a Victor qui promène sa mine maussade et ses répliques cyniques dans les allées en portant des accusations...
Qu'on la lise ou qu'on la voit jouée sur scène, cette pièce a de quoi fasciner ; une intrigue prenante et mystérieuse, un rien absurde, des personnages aux histoires respectives vraiment intéressantes... La dernière partie est plus difficile à cerner, tout comme elle est plus sombre, mais il y a un esprit vraiment très particulier dans cette pièce qui fait qu'on veut absolument savoir ce qui va advenir et qu'on songe encore au dénouement longtemps après.
Si elle m'a marquée à ce point c'est que j'y ai décelé des détails qui me parlaient sur les signes, les lecteurs, le hasard et les livres et aussi à cause de la synesthésie du personnage, mais au-delà de ces petits clins d'œil personnels, je crois qu'elle a de quoi plaire à tous les bibliophiles, les amateurs de théâtre, d'ambiances sombres et de bizarreries, les philosophes en herbes et bien d'autres encore pour peu qu'ils veuillent se montrer un peu curieux...

vendredi 7 janvier 2011

Llorona on the rocks

De Charlotte Bousquet.
Publié chez Argemmios.

« Les fées, c’est comme la Vierge de Guadalupe, j’ai cessé d’y croire à dix ans. Quand j’ai tué pour la première fois. » 
À Ciudad Juárez, des femmes sont assassinées. Pour le sexe. Pour le fun. Pour leurs organes, aussi. La routine. Sauf qu’une inconnue voilée de blanc apparaît, à chaque fois, près des cadavres. 
La Llorona. 
En pleine guerre des cartels, les Feds ont autre chose à faire que courir après une légende. Alors, ils ont fait appel à moi, Eva Vargas, la meilleure tueuse à gages et spirite du Mexique. Mais entre les fantômes du passé, les narcos et mon fichu cœur d’artichaut, il va falloir autre chose qu’un tequila blanco pour y arriver sans me brûler les ailes…

Décidément, Charlotte Bousquet arrivera toujours à m'étonner. Aucun de ses ouvrages ne ressemble à l'autre et son style, différent et semblable à la fois, toujours reconnaissable en tous cas, s'adapte à chaque nouvelle histoire comme si c'était elle qui était faite pour lui et non l'inverse.
Llorona on the rocks est un récit vif, sans complaisance. On nous promet du sang, du cynisme, de l'action et des fantômes, une histoire un peu entre James Bond et de la bonne fantasy urbaine. Et on ne nous floue pas, c'est le moins qu'on puisse dire.
Llorona est un thriller surprenant qui se lit très vite et qui donne plus l'impression de regarder un film (et même d'écouter sa bande-son) que de lire un livre, tout en gardant l'avantage littéraire de nous faire entrer dans les pensées des personnages.
L'action est bien dosée, haletante la plupart du temps, mais laissant à quelques moments d'attente, de rêve ou d'introspection l'opportunité de semer le trouble dans l'esprit du lecteur afin qu'il sache bien que jamais, jusqu'à la toute fin, le mystère n'est totalement éclairci ou l'histoire arrêtée et que tout peut encore se produire.
C'est un très bon livre, divertissant mais aussi instructif, il pousse à une certaine réflexion sur la condition des femmes. J'ai vraiment apprécié cette lecture, mais quelque chose que je ne saurais pas vraiment définir m'a empêchée de passer au stade supérieur et de réellement l'adorer. Est-ce parce qu'une grande partie de l'univers musical qui imprègne l'histoire m'est étranger ? Non, je ne le crois pas, j'ai aimé découvrir celui-ci. Est-ce que cela tient au personnage alors, dont les propensions à se la jouer et à s'écouter parler m'ont souvent agacée ? Je ne sais pas... Vers la fin j'appréciais Evelia, je lui pardonnais volontiers ces petits accrochages...
Peut-être aurais-je aimé que la mythologie et le folklore prennent une plus grande place dans cet ouvrage...
Cela dit, l'épilogue laisse présager du meilleur et si l'auteur a dans l'idée d'écrire un autre roman de ce genre, je le lirai sans aucun doute.
Enfin, une mention spéciale pour les annexes qui complètent agréablement le roman et dont j'ai apprécié la lecture. Il y a deux articles très intéressants, l'un sur les féminicides de Ciudad Juarez et l'autre sur Frida Kahlo, mais également la playlist de l'ouvrage et quelques recettes de boissons, idée originale et très sympathique.
Il y a en outre un glossaire, mais j'aurais préféré pour ma part des notes de bas de page à la place. Je n'aime pas interrompre ma lecture pour simplement chercher la signification exacte d'un mot d'argot... Ce qui me fait de surcroît penser que si, lisant l'espagnol, je n'ai pas été gênée que ne soient pas traduites les bribes de chansons qui jalonnent le texte, ce ne sera peut-être pas le cas de tout le monde... Oh, c'est assez facilement compréhensible je crois et pas vraiment nécessaire non plus de tout saisir, mais ces paroles participent à la création d'une certaine ambiance, c'est donc un peu dommage de passer à côté.


Ce livre entre dans la catégorie imaginaire pour le défi ABFA et V&S 2011.