mardi 30 avril 2024

Le Champ des possibles

Un roman graphique écrit par Vero Cazot et illustré par Anaïs Bernabé, publié chez Dupuis.


Marsu est architecte. Elle adore son métier et aime encore plus Harry, son époux. Mais un jour elle rencontre Thom qui construit des mondes virtuels et l’entente est immédiate. Peu à peu l’amitié se change en amour et Marsu ne peut choisir entre les deux hommes de sa vie. Elle qui refusait la réalité virtuelle finit par y adhérer, devenant même accro. Elle tâtonne à la recherche d’un équilibre entre les deux mondes. Petit à petit, sa vie se scinde en deux. Elle n’alterne plus et vit ces deux existences en même temps.
Le sujet de cette BD est fascinant. Elle nous parle à la fois de dissociation de conscience et de polyamour. J’ai beaucoup apprécié la première moitié du scénario pour toutes les réflexions qu’elle apporte, d’autant plus à une époque où l’on veut tout et tout de suite, sans avoir à faire de choix. L’envie de tout vivre, d’exploiter les moindres possibilités des nouvelles technologies pour s’affranchir de toute contrainte est assez typique de notre époque, même si c’est plus souvent un leurre pour nous qu’une réussite. Le récit illustre également la puissance de l’imaginaire et la richesse de notre vie intérieure. Cependant, j’ai moins aimé la deuxième partie de l’histoire. On part sur des sentiers un peu trop perchés, même pour moi. C’était cependant assez émouvant et j’ai eu les larmes aux yeux sur la fin. Il y a beaucoup d’amour dans cette histoire et même sans s’attacher outre mesure aux personnages, on le ressent.
J’ai adoré le côté psychédélique de certains dessins, le jeu de couleurs entre la réalité et le virtuel. L’aspect esthétique de la BD m’a particulièrement séduite et sert l’histoire à la perfection. J’ai passé pas mal de temps à admirer les dessins et je sais que j’y reviendrai plus tard. C’est un très bel ouvrage.

jeudi 25 avril 2024

Witch Vampire : Article 2 : On ne trahit pas

Un roman d'Émilie Chevalier, Laurence Chevalier et Sienna Pratt. Publié chez Black Queen. Disponible en version audio chez Audible.

Mon avis sur le premier tome.


Attention, cette chronique révèle une partie des événements du tome précédent.

Le premier tome m’avait laissé un goût d’inachevé, comme un film coupé en plein milieu. J’ai donc enchaîné avec le deuxième. Je fais rarement cela, mais en l’occurrence cela se justifie et je vous conseille d’en faire autant.
Avec ce tome, on entre enfin dans l’action. Ce n’est pas qu’il ne se passait rien dans le précédent, mais les enjeux m’ont parus bien plus concrets. Il faut dire que notre trio de sorcières est dans une situation très délicate. Elles sont accusées d’avoir enfreint la première des trois lois en se mélangeant aux loups et même si c’était pour survivre, elles risquent d’être privées de leurs pouvoirs ou condamnées au bûcher. La situation est d’autant plus grave que les événements récents les ont séparées. Elinor a choisi sa vie et se lave les mains des conséquences, Sixtine est encore très marquée par son emprisonnement et le choix d’Elinor ne fait que la conforter dans l’impression qu’elle a eu d’être abandonnée par son entourage. Quant à Neeve, tiraillée entre les deux et ses propres angoisses, elle ne sait que faire pour apaiser les tensions tout en sauvant leur peau.
Au-delà des problèmes personnels des trois filles, on en apprend aussi davantage sur le meurtre qui les a placées sur la sellette ainsi que sur les morts suspectes dont a souffert la meute. Certaines choses m’ont semblé évidentes, comme l’implication d’un personnage secondaire, et d’autres moins. J’ai apprécié cette partie de l’intrigue, d’autant plus qu’elle est portée par Neeve et Lennox, mes deux personnages préférés, qui mènent l’enquête.
En revanche, suivre les autres personnages s’est révélé un rien plus compliqué.
Si dans le précédent tome Elinor avait joué avec mes nerfs, j’ai pensé durant les premiers chapitres que ce serait au tour de Sixtine dans celui-ci. Elle était si centrée sur elle-même, égoïste et imperméable à la souffrance des autres que j’avais envie de la secouer. Son traumatisme ne justifie qu’en partie son manque d’empathie. J’entends bien qu’elle aussi a des besoins et le droit de l’exprimer, mais se rend-elle vraiment compte de ce qui se passe autour d’elle ? Elle est exécrable avec tout le monde, elle ne comprend pas que les autres ne sont pas à sa disposition. Elle aurait dû apprendre de ses erreurs, son impulsivité lui ayant déjà joué des tours, mais en fait non, elle préfère chouiner. Elle ne se rend pas bien compte de ce qu’a fait Robin pour elle et elle est incapable d’accepter les choix des autres. Pour elle, une Elinor dépressive mais avec elle, serait préférable à une Elinor heureuse ailleurs. C’est assez triste. J’aurais mieux compris une telle attitude venant de la part d’Elinor qui était profondément dépressive. Sixtine est censée avoir la tête sur les épaules. Elle a certes vécu une captivité éprouvante, mais elle doute si facilement de son entourage...
Quant au vampire qui lui tourne autour… Non, vraiment pas. Je pensais que j’en avais définitivement marre de Sixtine, mais j’ai revu mon opinion à son sujet de manière drastique. Les autrices m’ont retournée comme une crêpe en lui offrant un développement d’une grande profondeur. Cela ne la rend pas plus sympathique, cependant elle est le personnage qui évolue le plus dans ce tome. Cela force l’intérêt et je me demande vraiment où cela va nous mener dans la suite.
Elinor, quant à elle, demeure le personnage pour lequel je m’implique le moins. Elle a trouvé sa place. Je ne l’aime toujours pas, mais la voir heureuse et enfin confiante en elle-même fait plaisir. Elle était réellement en souffrance dans le tome précédent, je peux comprendre qu’elle veuille passer à autre chose. On sent qu’elle aime toujours sa famille et ses amis, mais elle est mieux loin d’eux, aussi triste et égoïste que cela puisse paraître. J’aurais tout de même aimé comprendre ce qui avait déclenché et nourri sa dépression car honnêtement elle s’en est sortie d’un claquement de doigts, ce qui est peu vraisemblable. La désintox brutale c’était déjà quelque chose, mais elle avait été aidée par un guérisseur. Néanmoins, on ne guérit pas une profonde dépression juste en se trouvant un mec. L’abus de cachets n’était pas son principal problème, or la racine du mal semble avoir totalement disparu en même temps que l‘addiction. La Elinor de ce tome n’est pas cohérente avec celle du précédent. Elle n’arrivait pas à se faire obéir par une classe de gamins, mais elle met des loups à terre en haussant le ton ? Mouais…
Je n’adhère toujours pas à son histoire avec Karl. Ils ont l’air shootés aux endorphines et ne partagent rien à part du sexe. J’aurais aimé les voir construire une vraie relation au-delà de leur coup de foudre. Cependant il n’en est rien. Ils baisent et se lancent des regards énamourés. Leur histoire est d’une platitude et d’un ennui… Mais je crois que c’est leur hypocrisie qui m’agace le plus en fait. Les règles valent pour les autres, mais pas pour eux. Ils ont beau avoir des moments d’altruisme et de courage qui donnent le change, cela ne fait pas oublier qu’ils ne se sont pas toujours souciés de ce qu’il adviendrait de gens qu’ils prétendent aimer, du moment que ça se passe bien pour eux.
Autant dire que je vivais pour les chapitres de Neeve et Lennox qui sont toujours mes chouchous. Et j’ai tremblé pour eux de trop nombreuses fois à mon goût !
Neeve fait peut-être des choix discutables et elle est souvent à l’ouest, mais elle reste la plus saine de ces filles et la plus tolérante. Tout ce qu’elle veut c’est le bonheur des gens qui l’entourent et elle respecte leurs choix. Les deux autres sont davantage dans le jugement, surtout Sixtine.
L’histoire de Neeve et Lennox est attendrissante. On sentait déjà de l’amour entre eux, malgré la distance, dans le premier tome, mais là on comprend enfin comment et pourquoi ils se sont éloignés. Je n’avais qu’une envie : qu’ils puissent enfin se parler et se retrouver.
Pour nos trois sorcières, c’est le moment de faire des choix drastiques. Vont-elles s’éloigner définitivement ou se retrouver dans l’adversité ? Même si elles ont souffert des récents événements, j’ai trouvé que leur amitié vacillait un peu trop facilement.
La fin m’a séchée et rattrape tout ce qui m’a agacée dans ce tome, cependant, elle ne m’en a pas moins brisé le cœur. Les autrices ont faits des choix risqués, cela promet pour la suite. Je n’ai plus qu’une chose à faire, lire le dernier volume. 

lundi 22 avril 2024

L'Oiseau d'or de Kainis T2

Un manga de Kazuki Hata, publié chez Glénat.

Mon avis sur le premier tome.


J’ai retrouvé avec plaisir Lea alias Alan, notre écrivain en herbe, qui tente de se faire à sa nouvelle vie londonienne tout en écrivant son deuxième roman. L’argent manque et une source de revenus serait bienvenue si elle veut rester.
Le premier tome du manga se terminait sur un moment de suspense propre à faire basculer cette nouvelle vie chèrement acquise. Mais qu’a vraiment vu Myles et, s’il a vu quelque chose, que fera-t-il de cette information ?
Ce tome m’a beaucoup plu. On y apprend l’histoire de Myles, qui lui aussi cache un secret. J’ai une certaine tendresse pour ce personnage bienveillant, à la gentillesse discrète et désintéressée. Sa façon de veiller sur Alan est particulièrement touchante. Son histoire personnelle est plutôt triste, un peu cliché comme tout le reste du manga, mais je ne l’en ai trouvé que plus attachant.
Dans ce volume, Alan rencontre aussi une autre femme écrivain qui s’habille en homme et publie sous un pseudonyme mais ne cache pas vraiment son genre et cela l’amène à des réflexions sur sa propre situation ainsi que son avenir. Rien de très profond, on reste dans quelque chose de personnel et de bon-enfant. J’ai cependant apprécié que le personnage sorte un peu de sa bulle et se pose de vraies questions, même un court instant. Cela amène aussi un nouvel éclairage sur sa relation avec Myles.
La fin du tome nous offre un nouveau rebondissement intéressant, alors qu’Alan est forcé de redevenir Lea pour un temps, et j’ai hâte de voir comment cela va évoluer.
C’est une chouette petite série, bien agrémentée par de jolis dessins. Le récit ne casse pas trois pattes à un canard, mais est empreint d’une agréable douceur.

vendredi 19 avril 2024

Witch Wolf : Article 1 : On ne se mélange pas

Un roman d'Émilie Chevalier, Laurence Chevalier et Sienna Pratt. Publié chez Black Queen. Disponible en version audio chez Audible.



Je n’attendais pas grand-chose de cette audio-lecture et j’ai été agréablement surprise. L’urban fantasy est un genre galvaudé qui, bien souvent, nous sert le même schéma répété ad nauseam. Avec cette trilogie, les autrices ont choisi de se jouer des poncifs et de sortir un peu du cadre. J’ai trouvé cela rafraîchissant.
Les héroïnes ne sont pas parfaites, bien loin de là. Sixtine est la plus sage du trio et souvent la voix de la raison quand ses amies déconnent, mais elle n’est pas sans failles. J’ai aimé ce personnage qui ne fait pas toujours de bons choix, mais qui essaie de rester fidèle à ses valeurs. Neeve, quant à elle, est complètement allumée, et aussi bizarre que ça paraisse elle en est devenue ma préférée J’ai hâte d’en savoir plus sur son passé commun avec l’un des personnages masculins. Enfin on en arrive à Elinor, mon problème majeur dans cette histoire. Elle m’a tapé sur les nerfs et je n’ai même pas réussi à compatir à ses malheurs. Elle a beau évoluer au fil du récit, le mal était fait, je ne suis pas parvenue à m’attacher même si elle mériterait toute mon admiration. En fait, je n’ai pas réussi à croire en elle et en son histoire. Quand son mec est entré en scène, cela n’a rien arrangé, il m’a exaspérée encore davantage.
Les personnages masculins sont en retrait dans la narration par rapport aux féminins et on n’en sait pas encore assez sur eux pour vraiment les cerner. Néanmoins, Lennox et Robin ont piqué mon intérêt. Lennox est le plus secret des deux et je suis très curieuse de connaître son histoire.
Le roman multiplie les points de vue, ce qui le rend d’autant plus agréable à l’écoute, chaque personnage ayant son narrateur attitré. On peut ainsi connaître les pensées et mieux comprendre la personnalité ainsi que les choix des personnages principaux. Cependant, le revers de ce choix narratif se révèle lorsque l’on ne supporte pas l’un d’entre eux. Quand j’en arrivais à Elinor et Karl, je passais les chapitres en accéléré, je l’avoue.
J’ai apprécié ce roman qui s’écoute vite, mais l’intrigue manque pour l’instant un peu de substance. Pour moi, il ressemble davantage à une longue introduction qu’à un premier tome. Je pense que c’est le genre de trilogie qu’on doit lire d’une traite, ce premier volume est loin d’être autosuffisant. Qu’à cela ne tienne, je vais commencer le deuxième, pour l’instant je me sens plutôt bien dans cet univers.

mardi 16 avril 2024

Sœurs d'Ys

Une BD scénarisée par M.T. Anderson et dessinée par Jo Rioux, publiée chez Rue de Sèvres.


Rozenn et Dahut viennent de perdre leur mère adorée. Tandis que leur père s’abîme dans les plaisirs et se décharge de ses responsabilités, les deux jeunes princesses doivent trouver le moyen d’apaiser leur chagrin  tout en découvrant quelles adultes elles espèrent devenir. J’ai particulièrement aimé les pages qui les montrent en parallèle, lors de leur première dispute. Chacune vit son deuil à sa façon et grandit tant bien que mal, livrée à elle-même. Pendant que Rozenn devient une bienveillante sorcière des bois, amie des animaux, Dahut s’adonne à la magie et recherche le pouvoir dans les livres. Elle qui détestait son père, elle en deviendra l’instrument.
Les deux petites filles emplies de chagrin deviennent ainsi deux belles jeunes femmes aux antipodes l’une de l’autre. Rozenn bat la campagne, insouciante, alors que Dahut profite des plaisirs de la cour, mais doit aussi en assumer seule les responsabilités. Deux sœurs autrefois proches qui se sont éloignées l’une de l’autre peuvent-elles se retrouver malgré les chemins si différents qu’elles ont empruntés et les rancœurs qui les habitent ?
Cette belle BD réinterprète la légende bretonne de la glorieuse cité d’Ys. Je dois avouer que c’est loin d’être ma réécriture préférée car trop simpliste et manichéenne à mon goût. J’ai aimé les deux sœurs, mais elles n’ont aucun relief. Il y avait matière à apporter de la nuance au récit et plus de profondeur aux personnages. En revanche, j’ai beaucoup aimé les dessins, l’usage de la couleur et la texture. J’ai pris grand plaisir à admirer les détails, à feuilleter et re-feuilleter ce livre pour en admirer les illustrations.

jeudi 11 avril 2024

Les moelleuses au chocolat

Un recueil de nouvelles de Silène Edgar, publié chez Gephypre.

Présentation de l'éditeur :

Création vengeresse, puissance libératrice, magie féérique, nouveau sens organique, jeu épistolaire, folie douce, péché capital : sept nouvelles toutes en érotisme et chocolat, qui embrassent les genres de l’imaginaire et les enrobent d’une liqueur cacao à vous faire fondre… sans oublier l’humour, épice indispensable pour lier ces créations concoctées avec amour & gourmandise.

Au menu :
- La chocolatière de Hamelin
- Ève
- La cuisson parfaite
- Effluves
- Entre mes lignes
- Les gourmandes
- Une petite cantate
Évidemment, chaque nouvelle est complétée par ses recettes exclusives et coquines, à cuisiner à deux (ou plus).

Dans ce recueil tout en sensualité et gourmandise se côtoient une sorcière tentatrice et revancharde, une Galatée chocolatée, une veuve qui sait ce qu’elle veut, une fille-fée qui désespère d’être aimée pour elle-même, une mégère apprivoisée et un certain nombre de gourmandes impénitentes toutes plus séduisantes les unes que les autres. Je me suis laissé envelopper par la douceur cacaotée de leurs histoires à la saveur de contes. J’ai trouvé entre ces pages un brin d’érotisme, des torrents de sensualité, beaucoup de gourmandise et tout autant d’amour.
Toutes ces histoires m’ont séduite d’une manière ou d’une autre, mais j’ai une certaine tendresse pour celle de Mahaut, un peu fée, un peu sorcière et surtout fort pragmatique. J’ai aussi particulièrement apprécié Entre mes lignes, un récit aussi drôle qu’attendrissant. Le symbolisme d’Ève, à qui la précision et la mégalomanie donnent corps, mais qui ne prend vie que grâce à la tendresse et au désir a également touché mon cœur de guimauve.
Ces nouvelles ont quelque chose de réconfortant, comme le chocolat qui les a inspirées. Elles explorent le désir, l’éveil des sens, mais aussi la sensation de tomber en amour et sont pour la plupart extrêmement positives.
Les textes sont joliment tournés, poétiques et imagés. Ces récits fortement inspirés de contes sont agréables à lire et se savourent comme autant de mignardises. Il faut être raisonnable, car ce petit livre peut aussi bien se dévorer trop vite. L’autrice a pris soin d’agrémenter ses nouvelles de recettes alléchantes, pour entretenir l’appétit de ses lecteurs, et j’ai bien envie d’en essayer certaines.
J’avais déjà lu Silène Edgar et je trouve qu’elle excelle dans l’art de conter des nouvelles. Ce fut une très plaisante lecture.


mardi 9 avril 2024

Un thé pour Yumiko

Une BD de Fumio Obata, publiée chez Bayou.


Yumiko est graphiste, elle vit à Londres depuis longtemps et elle n’a pas l’intention de retourner au Japon pour autre chose que des vacances. Elle a tout fait pour se construire une vie dans ce pays et elle semble heureuse, jusqu’au jour où elle reçoit un appel de son frère lui annonçant la mort de leur père. Yumiko doit rentrer au Japon pour les funérailles et commence à s’interroger sur ses choix, ses émotions et ses envies.
On plonge dans les souvenirs de la jeune femme avec incertitude. Elle semble tourner autour de quelque chose, une idée persistante ou une fêlure, personnifiée par le personnage d’une pièce de théâtre nō. Elle cherche en elle la signification de cette image. Elle pense à son père et à ce qu’il voulait pour elle. On se rend vite compte que Yumiko s’est sentie tiraillée entre les ambitions différentes de ses deux parents et les deux existences qu’ils espéraient pour elle. Est-elle sûre de ce qu’elle souhaite ?
Yumiko entame un voyage symbolique dans lequel elle va apprendre qu’on se construit en permanence. Elle expérimente une sorte d’effondrement qui mène à la renaissance, en parallèle des rituels funéraires qui l’ennuient et qu’elle trouve vains, censés accorder à son père une nouvelle existence sur un autre plan.
Cette belle BD parle de deuil, de la vacuité de certaines choses que l’on s’impose, de la difficulté de laisser derrière soi le poids des attentes que les parents font peser sur nous pour enfin être soi. Elle parle aussi de déracinement et d’expatriation, du travail constant que cela demande et de l’incompréhension des proches. Elle parle de manque et de rêves fragiles. Enfin, cette histoire nous parle d’émotions et d’une jeune femme cherchant à apprivoiser les siennes. 
J’ai beaucoup aimé le style graphique crayonné et la colorisation à l’aquarelle qui apportent lumière et douceur à l’ensemble. Cette lecture fut pour moi un très beau voyage spirituel.

jeudi 4 avril 2024

Hippolyte

Une BD scénarisée par Clotilde Bruneau et dessinée par Carole Chaland, publiée chez Vents d'Ouest.


Hippolyte est une ville cachée, peuplée uniquement de femmes qui font ce qu’elles peuvent pour survivre dans un monde hostile. Avec ces amazones du Far West, attendez-vous à de la violence, des attaques de convois monétaires, des trahisons et des personnages dénués de tout sens moral. En somme, quelque chose d’assez classique pour un western.
Je n’ai pas réussi m’impliquer dans cette histoire au scénario délayé. Je peux imaginer pourquoi ces femmes ont choisi de répondre à la violence par la violence, mais j’aurais aimé en apprendre davantage sur leurs parcours respectifs. Je déteste quand les auteurs créent beaucoup de personnages et ne leur donnent aucune profondeur. C’est très fouillis au départ et on sait à peine qui est qui à la fin. On nous bombarde de prénoms et ça s’arrête là. Il n’y a guère que Victoria et les deux autres femmes de sa famille qui sont un rien plus esquissées que les autres. Les motivations de personnages pourtant importants, comme Brooke pour ne citer qu’elle, nous restent étrangères. Je peux comprendre que ces femmes soient dures, vu leur vie, mais elles sont aussi inexpressives et inflexibles que du marbre. On ne peut pas ressentir d’empathie pour des personnages aussi plats, qui semblent eux-mêmes n’avoir aucun sentiment.
J’ai particulièrement détesté la gamine psychopathe. Elle est exaspérante durant toute la BD et la conclusion de son histoire est bâclée. Franchement, tout ça pour ça ?
Ce western féminin ne m’a pas convaincue du tout. 

mardi 2 avril 2024

Panique à Wahlbourg, Bigoudis & petites enquêtes T1

Un roman de Naëlle Charles, publié chez Archipoche et chez Audible pour la version audio. Celle-ci est lue par Sébastien Desjours et Eve Reinquin.


Dans ce cosy mystery à la française, on suit Léopoldine, trente-six ans et maman de deux ados insupportables. Elle a toujours rêvé d’être flic mais est devenue coiffeuse. Oh, elle aime bien son travail, mais ça manque un peu de piquant à son goût. Alors quand elle trouve le corps d’une de ses connaissances dans le parking de l’hypermarché, elle est bien décidée à se mêler de l’enquête. Oui, dit comme ça, Léopoldine a tout l’air d’une écervelée. Cependant, elle ne l‘est pas. Elle prend certes des décisions discutables parfois, mais elle n’en est pas moins intelligente quand elle veut.
Son partenaire d’investigation, Quentin Delval, rêvait aussi de devenir gendarme, mais une sanction disciplinaire l’a placé contre son gré dans la petite ville alsacienne où a grandi Léo. Il a beau être gradé, il manque cruellement d’expérience et même s’il fait sa tête de cochon au début, il est bien content d’avoir l’aide de Léo. Quentin peut sembler détestable au début, mais si on arrive à passer outre les premiers chapitres, on se rend vite compte qu’il n’est pas si mal.
J’ai bien aimé la dynamique entre ces deux personnages qui semblaient pourtant très mal partis. Il faut dire qu’ils ne sont pas aidés, l’autrice ne leur a épargné aucun cliché. Léo prend particulièrement cher avec son horrible famille. Cela semble la norme dans les cosy, mais au moins elle se rebiffe, contrairement à d’autres héroïnes qui persistent à se laisser marcher dessus. 
L’intrigue ne casse pas trois pattes à un canard, mais reste plausible, même si très perchée sur la fin. J’ai surtout aimé l’ambiance de petite ville et les personnages malgré les poncifs. Le tout est quand même assez répétitif. Les ados, qui font office de ressort comique, deviennent vite lourds à la longue.
J’ai choisi la version audio de ce roman et je pense que j’ai bien fait. Elle se prête particulièrement bien à la narration choisie par l’autrice qui s’adresse souvent directement au lecteur. Je n’aurais pas eu la même patience avec la version écrite, d’autant que le style est assez simpliste. Les narrateurs ont fait un excellents travail et je crois qu’ils ont contribué à me rendre les personnages sympathiques. Ce n’était pas gagné, Léo et Quentin peuvent se montrer très arrogants au début, mais on apprend à les aimer petit à petit.
C’était sympa, mais sans plus. J’ai envie de donner une chance à la suite pour voir comment les personnages vont évoluer, mais ce ne sera pas dans l’immédiat.