Un Recueil de Nnedi Okorafor, publié aux éditions ActuSF.
Présentation de l'éditeur :
Avec Kabu Kabu, plongez dans les méandres des nouvelles de Nnedi Okorafor, l'autrice de Qui a peur de la mort (optionné par HBO).
Embarquez en direction de l'aéroport de New York dans un kabu kabu, taxi clandestin à qui vous fera traverser les légendes africaines.
Découvrez une musicienne qui joue de la guitare pour un zombie particulier.
Rencontrez Arro-yo, la coureuse de vents à la chevelure maudite, qui se bat pour exister sur l'étrange planète Ginen.
21 nouvelles vers un ailleurs étonnant et passionnant.
Autrice de fantasy et de science-fiction, Nnedi Okorafor a été lauréate du World Fantasy Award et du Prix Imaginales pour Qui a peur de la mort ? Son recueil de nouvelle Kabu Kabu est une véritable palette de son imaginaire d'african-futurisme et d'african-fantasy.
Comme me l’a appris la nouvelle qui donne son titre à ce recueil, un kabu kabu est un taxi nigérian illégal. Or, l’impression que l’on a au sortir de cette lecture est d’avoir été embarqué dans l’un de ces taxis, d’en avoir côtoyé les autres passagers tout en étant brinquebalé d’un lieu à un autre, sans ordre logique, en s’inquiétant parfois de ne pas arriver à bon port. Toutefois, quand on descend enfin, on se trouve peut-être dépouillé et désorienté, mais également plus riche de tout ce que l’on a vu.
Nnedi Okorafor est une grande conteuse. Elle mêle très habilement les genres dans cet ouvrage, du fantastique le plus classique à une science fiction rafraîchissante, elle mâtine le tout de légendes et ajoute même un soupçon de littérature générale sur la fin. Elle aborde des sujets importants et met l’imaginaire à leur service plutôt que l’inverse. Elle l’imbrique dans la réalité.
Guerre du pétrole, racisme, condition féminine et enjeux politiques sont bien sûr des thèmes récurrents, mais ils côtoient l’amour, au sens large du terme, l’espoir, la volonté des personnages de faire changer le monde.
En se baladant d’un texte à l’autre, on apprend à connaître son Nigeria, celui qu’elle veut nous conter. Ses personnages, souvent des femmes, ont de fortes personnalités. Elles sont volontaires, respectueuses des traditions mais néanmoins décidées à vivre leur vie et à tracer leur propre chemin. En cela, Nnedi Okorafor décrit des personnes très inspirantes que j’ai beaucoup aimé suivre.
Certains textes sont liés. On peut lire tout une série sur les méta-humains, ces gens qui ont des pouvoirs sur les éléments entre autres, et voir comment leur statut a changé au sein de leur communauté. J’ai tout particulièrement aimé Tumaki, un très beau texte, mais tous ceux concernant les coureurs de vent m’ont tout autant passionnée.
De nombreuses nouvelles appartiennent à la science fiction, mais elle se mêle presque toujours à la magie. Mon texte SF préféré est Popular Mechanic car j’ai beaucoup aimé la relation père-fille des personnages. L’artiste araignée m’a également marquée car j’ai trouvé ce récit touchant dans la relation construite entre cette IA robotique et cette femme au travers du langage de la musique.
Cependant, mes nouvelles favorites sont celles qui appartiennent au genre fantastique. D’aucuns les trouveront sans doute plus anodines et elles abordent souvent des thèmes moins complexes. Ceci dit, au-delà du fait qu’il s’agisse de mon genre de prédilection, Nnedi Okorafor a une intelligence du fantastique qui, alliée à ses talents de conteuse, a fait de ces textes des pépites du genre.
Le Tapis, texte aux abords fort simple mais plein de sens cachés, est l’un de mes favoris. Ces deux sœurs, la situation peu idéale dans laquelle elles se trouvent et leur étrange tapis m’ont offert un excellent moment de lecture. Dans le même genre, La guerre des babouins, dans lequel trois fillettes persistent à emprunter un mystérieux raccourci s’est révélé aussi distrayant qu’intéressant. Et il y a bien sûr la nouvelle titre et son voyage déstabilisant à bord du kabu kabu.
D’autres récits, comme Sur la route, sont plus horrifiques. Celui-ci en particulier est très prenant et dérangeant. J’ai néanmoins été un peu désappointée par la chute que je juge trop facile.
J’ai eu une préférence pour les textes aux allures de légendes, comme L’homme au long juju, dans lequel une fillette croise un fantôme malicieux ou encore Le bandit des palmiers où l’on rencontre une femme bien décidée à narguer l’autorité.
Les deux dernières nouvelles du recueil sont une étrangeté au milieu de tous ces textes où la magie côtoie le cybernétique, mais elles se passent aux États-Unis, ceci expliquant cela à mon avis. Du fait de leur réalité, elles sont d’autant plus touchantes car elles abordent le racisme et le harcèlement subi par des enfants.
Ce recueil offre une très grande diversité, vous y trouverez forcément un texte qui vous parlera. J’ai aimé la voix de cette autrice, ses thèmes et ses préoccupations. C’est un ouvrage très moderne et une bonne représentation de ce que peut nous apporter l’Imaginaire aujourd’hui.