vendredi 30 mars 2018

Élixir de nouvelles steampunk

Un recueil de Delphine Schmitz, publié chez Séma éditions.

Présentation de l'éditeur :
Dans ce monde de vapeur et de rouages où science et magie se côtoient, vous rencontrerez des inventeurs plus loufoques les uns que les autres, parfois charmants, d'autres fois terrifiants. Vous découvrirez un appareil photographique qui n'en fait qu'à sa tête, un sous-marin en quête de créatures fabuleuses, un musée de cire où les statues prennent vie, le premier ordinateur de l'Histoire, et bien d'autres choses encore. Au fur et à mesure de votre lecture, d'étranges liens entre les textes éveilleront votre intérêt. Vous ne pourrez vous empêcher de remarquer la présence fugace mais récurrente de mystérieux matériaux aux étonnants pouvoirs. Et si la dernière nouvelle vous livrait leur secret ?
Quelle excellente surprise que ce recueil ! Je survole généralement les quatrièmes de couverture et je ne savais pas trop à quoi m’attendre, mais du steampunk et des nouvelles… cela suffisait à me convaincre. Quel ne fut pas mon étonnement au fil de ma lecture en constatant qu’en fait cet ouvrage est presque un fix up. Il faut dire que j’étais frustrée à la fin de la première nouvelle, mécontente d’en rester à cette chute abrupte. Alors, quand j’ai vu que l’histoire n’était finalement pas totalement en suspens, cela m’a ravie.
Les liens entre les textes sont subtils, à peine évoqués dans les premiers récits, puis de plus en plus prégnants. Cette façon de construire l’univers, comme une toile d’araignée dans laquelle le lecteur se laisse prendre puis entraîner jusqu’au centre, m’a beaucoup plu. J’ai adoré regarder le motif se dessiner, chercher à comprendre l’origine des artefacts qui hantent ces histoires, dénicher les liens entre les personnages, retrouver ces derniers, parfois, dans une autre histoire. Il faut dire que certains parviennent en peu de pages à se rendre très attachants.
L’écriture de Delphine Schmitz est très agréable et donne l’impression d’écouter une conteuse. Son imaginaire m’a tout de suite séduite.
Tout cela contribue à impliquer le lecteur et les pages se tournent de plus en plus vite. On se sent un peu triste quand arrive la fin, mais content.
Dans ce tissage uchronique vous verrez des inventions étonnantes (et des matières qui le sont tout autant), des amours transcendant la mort, des automates (évidemment), un super-héros comme on les aime (c’est un ptéranodon, pas une chauve-souris bon sang !), un pirate damné, vous suivrez des enquêtes, voyagerez dans un sous-marin, vous attendrirez parfois et, avec les personnages, tenterez de changer le cours du temps.
Je vous conseille chaleureusement cette très chouette lecture, même si vous n’êtes pas amateurs de nouvelles, vous tomberez sans nul doute sous le charme de cet univers haut-en-couleur.

mercredi 21 mars 2018

L'Heure de véri-thé

Un ouvrage d'Arnaud Bachelin, publié chez Baker Street éditions.


Présentation de l'éditeur :
L'Heure de véri-thé nous transporte à travers les siècles pour découvrir le symbolisme du thé et de son histoire. Entre archéologie, légendes et cuisine, ce livre est un fascinant récit des origines de la plante, des débuts de sa consommation et le développement de son commerce au fil du temps. Des histoires, mais aussi des techniques, des conseils et des recettes afin d'appréhender au mieux cette plante aux mille facettes. Des premiers thés bouillis asiatiques au thé glacé inventé en Amérique, en passant par les thés aux fleurs et autres ingrédients naturels, Arnaud Bachelin retrace un fabuleux voyage aux quatre coins du monde, dans un ouvrage parsemé d'illustrations et de photos. Ne se contentant pas de transmettre son savoir, l'auteur est également en perpétuelle recherche. Un peu à l'instar des plus grands parfumeurs, il est en quête des bonnes alliances, l'alchimie qui lui permettra de créer de nouvelles saveurs dans une parfaite harmonie. Passeur, savant, chercheur, créateur… en un mot : magicien !

L’Heure de véri-thé est un ouvrage de moyen format, ce qui est assez rare pour les livres concernant le thé. Le texte est agrémenté de quelques photos qui rendent très bien sur un beau papier épais, toutefois, à cause du papier en question, l’ouvrage est plutôt lourd et en devient vite malaisé à manipuler.
Les premières pages présentent les différentes catégories de thé (noir, rouge, bleu, etc.) et les stades de préparation des feuilles qui permettent de les obtenir. Cette présentation est succincte mais claire. Elle a également le mérite d’expliciter la différence entre thé noir et thé rouge qui trouble parfois les néophytes.
Vient ensuite un chapitre sur la genèse qui évoque les légendes autour de la découverte du thé et les différentes méthodes de préparation (thé bouilli, thé battu) et utilisations (culinaire, médicinale), avant que l’on n’en arrive à la boisson d’agrément et surtout à l’infusion qui est toujours pratiquée de nos jours.
Une large part de l’ouvrage retrace l’évolution du commerce du thé en Europe, les rivalités et conflits qu’il a générés et l’entrée dans les mœurs de sa consommation autant dans les strates riches que pauvres de la population. Ces chapitres sont un peu lourds bien qu’intéressants et cela est en partie dû à quelques répétitions. Toutefois, ce sont les fautes qui m’ont le plus gênée. Oh, il n’y en a pas à toutes les pages, mais assez pour gâcher l’aura d’un beau livre comme celui-ci. Ce sont en majorité des erreurs de conjugaison (accords de participes passés), mais aussi de vocabulaire (des mots utilisés en dépit de leur sens).
Tout en détaillant l’enracinement du thé dans les habitudes, l’auteur évoque la création des accessoires qui accompagne inévitablement un usage qui se généralise. On parle des théières classiques que tout le monde ou presque connaît ainsi que d’inventions qui nous paraissent beaucoup plus farfelues comme les tasses victoriennes avec protection pour moustache intégrée… J’aurais aimé plus de photos de ces ustensiles et davantage de détails sur leur utilisation, par exemple en ce qui concerne la préparation du thé au samovar. Même si, en amatrice de thé qui se respecte, je connais déjà tout ceci, je pense que cela a sa place dans un livre introductif tel que celui-ci.
Est également relatée une brève histoire de l’évolution du conditionnement, du coffret de vrac scellé pour éviter les contrefaçons aux capsules, en passant par les sachets en mousselines individuels. Chaque fois, le fait qui a ouvert la voie à l’invention est expliqué. De même, on évoque la création des thés parfumés et les méthodes, anciennes et modernes, utilisées pour les aromatiser, ainsi que les premiers thés glacés qui sont tout simplement nés d’une opportunité saisie au vol.
Je dois dire que la partie qui m’a le plus intéressée est celle mettant en relation le thé – et les tea times – avec les combats sociaux de leur époque. Bien entendu, on parle de la guerre d’indépendance des États-Unis, cependant on n’oublie pas pour autant un fait moins connu : le combat des suffragettes.
La dernière partie du livre est plus légère, dévolue à la cuisine et aux propriétés gustatives du thé. L’auteur consacré un chapitre très fourni aux associations de thés et de fromages. Il propose plusieurs alliances, détaillant avec finesse quelles sensations organoleptiques vous en retirerez. C’est intéressant si c’est votre truc (ce qui n’est pas mon cas). Je serais plus encline en revanche à essayer d’associer le thé à l’armagnac, comme il le préconise.
Vous trouverez quelques recettes dans cet ouvrage, que ce soit pour des boissons ou des plats, du sucré ou du salé. Par exemple, un thé glacé à la rose, un bubble tea (qui était très à la mode voilà un moment et qui semble maintenant s’éclipser, ce dont je ne me plaindrai pas.) et du cheese tea (non, vraiment, laissez tomber ça). En revanche, aucune évocation du matcha latte qui pourtant, après avoir été très en vogue au Japon, semble provoquer en Europe un bel engouement. Pour ce qui est de la cuisine, vous pourrez tenter une tarte au thé, potimarron et fromage de chèvre ou encore une recette de crevettes. J’envisage de tester assez vite le cake au matcha ou encore le gâteau au chocolat au thé fumé, je demeure néanmoins un peu circonspecte quant à cette dernière recette.
L’auteur termine par un court chapitre consacré aux références littéraires. Agréable à lire, bien qu’assez anecdotique. Il s’agit plus de montrer que le thé est vecteur d’inspiration que de réellement détailler le rôle qu’il a joué dans la littérature.
Ce n’est pas le livre qu’il vous faut si vous souhaitez vous renseigner sur les variétés de thé ou les cérémonies qui leurs sont associées. En revanche, si vous voulez en apprendre davantage sur la découverte du thé, son commerce et les implications sociales et sociétales de ce dernier au cours des siècles, il s’agit d’une excellente introduction.


tous les livres sur Babelio.com

vendredi 9 mars 2018

La Couleur des sentiments

Un roman de Kathryn Stockett, en version audio chez Audiolib.


Présentation de l'éditeur :
En 1962, à Jackson, Mississipi, chez les Blancs, ce sont les Noires qui font le ménage et élèvent les enfants. Sans mot dire, sous peine de devoir prendre la porte. Est-ce le cas de Constantine, l'employée des Phelan, dont on n'a plus aucune nouvelle ? Mais franchement, qui s'en soucierait ? Ses amies, Minny et Aibileen, et surtout Skeeter, la propre fille des Phelan. La jeune étudiante blanche et les deux employées noires vont lier une alliance imprévisible pour "comprendre".
Passionnant de bout en bout, La Couleur des sentiments a déjà conquis plus de deux millions de lecteurs, connu le succès au cinéma (The help) et obtenu le Grand prix des lectrices de "Elle" en 2011.
Timbres différents, conviction ou verve identiques : Marie Lemaître, Nathalie Hons, Nathalie Hugo et Cachou Kirsch marient leurs voix comme les héroïnes du roman leur volonté que "les choses changent". Leur lecture a été récompensée par le Prix du livre audio Lire dans le noir en 2011.


Tout commence en 1962 dans l’état du Mississippi avec deux femmes. L’une a la cinquantaine, est noire et exerce le métier de bonne auprès d’un couple de classe moyenne. L’autre est blanche, au début de sa vingtaine, et souhaite devenir écrivain.
Aibileen, la bonne, regrette de n’avoir pas pu continuer ses études, cependant elle a accepté son sort avec philosophie. Ce qu’elle préfère dans son métier, c’est s’occuper des enfants. Elle aime leur insuffler une bonne estime d’eux-mêmes, mais quand ils grandissent et deviennent comme leurs parents, elle change d’employeurs pour garder intacte l’affection qu’elle porte à ces petits. Cependant, l’amertume grandit dans le cœur d’Aibileen depuis la mort de son propre fils et elle accepte de moins en moins la façon dont on la traite.
Eugenia, dite Skeeter, est décalée par rapport à ses amies, toutes mariées et centrées sur leur famille car elle a d’autres aspirations. Elle a de mauvaises relations avec sa mère qui la dénigre beaucoup et manque de confiance en elle. Skeeter est intelligente, mais demeure assez naïve et idéaliste dans le contexte tendu de l’époque. Elle n’a pas oublié qu’elle aimait la bonne qui l’a élevée et peu à peu le vernis craquèle. Les inégalités sociales entre les blancs et les noirs lui apparaissent de plus en plus insupportables.
Les bonnes sont d'industrieuses petites abeilles, presque des objets pour leurs employeurs. Tous les jours, elles sont victimes d'injustices dans un état où les ségrégationnistes refusent de lâcher le moindre pouce de terrain. C'est par une énième vexation que la graine de révolte va éclore dans le cœur d’Aibileen et la pousser à accepter la proposition de Skeeter. Celle-ci souhaite que les bonnes se racontent dans un livre, sans faux-semblant. Si l’une mesure les risques, ce n’est pas forcément le cas de la seconde.
La Couleur des sentiments met à notre portée une époque pas si lointaine dont des stigmates marquent encore la société américaine d’aujourd’hui. Ces pages sont à la fois imprégnées de tendresse et de cruauté, de complicité et d’inhumanité. Comme le fait remarquer Skeeter, les bonnes élèvent les enfants, elles les aiment et ils les aiment en retour, mais on ne les laisse même pas utiliser les toilettes de la maison. C’est à la fois d’une grande tristesse et d’une ironie mordante.
Kathryn Stockett nous dépeint sa ville natale dans le bon comme le mauvais, elle ne cherche pas à faire pencher la balance. Elle nous montre une réalité dont nous n’avions peut-être pas conscience ou que nous n’avions pas à ce point mesurée. Elle a créé des personnages attachants, auxquels on aimerait pouvoir venir en aide. Outre Aibileen et Skeeter, on fait la rencontre de Mae Mobley, petite fille délaissée par sa mère et qui adore sa bonne. Puis vient Minny, la meilleure amie d’Aibileen. Elle est bonne aussi, a la trentaine et une grande gueule qui lui vaut bien des ennuis. J’ai adoré ce personnage qui a envie de se rebeller sans vraiment l’oser, sauf dans un accès de colère insensée. Elle est aussi méfiante que généreuse. Elle fait parfois preuve d’une bienveillance étonnante, notamment envers Celia, autre personnage haut en couleur et très touchant.
Pour tout cela, La Couleur des sentiments est un roman subtil, à la fois divertissants et sérieux. Il a été adapté au cinéma et le scénario reste proche du récit d’origine. J’ai apprécié le film, mais le fait que je l’ai vu avant de lire le livre n’y est pas étranger. J’ai eu envie de le revoir après écoute du roman et je me suis bien rendu compte qu’il était assez superficiel en comparaison, même si c’est normal. Le livre est plus émouvant à mon avis. Toutefois, les différences qui existent entre les deux font qu’on peut apprécier l’un même si l’on connaît déjà l’autre, peu importe l’ordre de découverte.
J’admets toutefois que Skeeter m’a semblé un peu plus geignarde et naïve dans le roman. Cela vient peut-être aussi du fait que je l’ai écouté et non lu. La lectrice qui l’incarne a pris un ton assez monocorde et me donnait souvent l’impression qu’elle allait se mettre à pleurer si elle disait un mot de plus… Heureusement, le personnage évolue et commence à s’intéresser réellement au sort des bonnes. Au départ, ses motivations étaient un peu plus superficielles bien que bienveillantes. Skeeter ne mesurait pas dans quoi elle s’engageait.
La Couleur des sentiments est un livre agréable à écouter. Sa narration chorale le rend très vivant et les lectrices ont fait un magnifique travail. C’est toujours un plaisir d’écouter Cachou Kirsch et la prestation de Nathalie Hons, qui interprète Aibileen, est remarquable. Elle a vraiment rendu justice à ce personnage très attachant.
J’ai quitté à regret Aibileen, Minny, Celia, Mae Mobley et même Skeeter. J’aurais aimé connaître l’après et c’est en cela que l’on mesure tout le poids de ce roman.

mardi 13 février 2018

Blog en chantier...

Ce blog venant de changer de plateforme, il risque d'y avoir quelques cafouillages dans les semaines à venir : mise en page bizarre, liens brisés et pages incomplètes.

J'en suis désolée, mais je vais faire de mon mieux pour arranger tout cela au plus vite.

lundi 12 février 2018

L'année du flamant rose

Un roman d'Anne de Kinkelin, publié chez pocket.
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flamant-rose

Présentation de l'éditeur :

Louise, Ethel, Caroline. Trois amies, joyeuses mais solitaires, partagent tout, leurs peines et leurs bonheurs, leur passion aussi pour les belles choses. Toutes trois sont des créatrices, des faiseuses de rêves, dans leurs ateliers qui se font face dans un passage parisien.
Louise, joaillière, crée des bijoux qui réjouissent le coeur et les yeux. Ethel, corsetière, réveille les sentiments et les sens des amoureuses éperdues (et des autres). Caroline, relieuse, redonne vie aux livres anciens, tout en rêvant la sienne. Toutes trois, passionnées, sont amoureuses de l'amour, mais celui-ci leur semble inatteignable…
Le jour où Louise s'entiche d'un flamant rose empaillé, superbe et quelque peu étrange, qu'elle installe dans son atelier, son regard sur la vie semble changer. Après sa rupture, elle est face à un défi : se relever, tenir debout, comme le flamant sur une patte, pour sa petite fille, Rose, malgré sa fragilité et les obstacles.
Cette année, les trois femmes sauront-elles trouver la force de se reconstruire ?


Sur un coup de tête et au grand dam de son mari qui le déteste d’emblée, Louise achète un flamant rose empaillé. Cette artiste un peu fantasque se sent inexplicablement liée à l’animal, mais prise par ses problèmes personnels elle l’oublie pendant un temps.
Alors qu’elle glisse vers la dépression face à la mort de son père et l’échec de son mariage, le retour du flamant rose dans sa vie va lui apporter la force de se reconstruire. Durant quatre saisons, on suit Louise la joaillère et ses amies : Caroline la relieuse, Ethel la corsetière ainsi que le petit monde qui gravite autour de ces trois femmes en quête de bonheur.
Étant particulièrement sensible à l’artisanat d’art, j’avais envie d’entrer dans l’univers de ces « faiseuses » et de les voir opérer. J’espérais un roman tendre, de la fantaisie et de l’amitié, une histoire dans laquelle on s’emmitoufle pour oublier que la vie est parfois difficile ou décevante. Je voulais rencontrer des personnages avec lesquels j’aurais pu être amie et dont je me serais souciée. Malheureusement, pour diverses raisons, je suis passée à côté de cette histoire. Sans doute mes attentes étaient-elles trop ciblées, néanmoins je pense sincèrement que L’année du flamant rose est le genre de roman pour lequel il n’y a pas de juste milieu : soit on y entre complètement et on l’adore, soit on se contente de rester sur le seuil en jetant à l’intérieur un regard poli mais vite désintéressé.
Le roman est constitué de chapitres courts, ce qui le rend très rapide et facile à lire, malgré le ton emphatique qu’affectionne l’autrice. On aime ou pas les envolées lyriques, question de goût et de caractère, je ne juge pas là-dessus même si cela m’ennuie vite. En outre, je dois reconnaître que la spontanéité de l’autrice transparaît dans son style malgré l’emphase, il sonne vrai et non sur-travaillé. Cela contribue à l’alléger un peu.
Force est de constater qu’au-delà des considérations stylistiques, j’ai surtout peiné à m’attacher à ces personnages à mille lieues de mon pragmatisme. La douce Ethel est sympathique, mais presque inexistante, le grain de folie de Louise est charmant et j’ai fini par l’aimer un peu, en revanche Caroline m’a tapé sur les nerfs du début à la fin. J’ai besoin de m’attacher pour aimer un récit, c’est comme ça. Les nanas qui montent tout en épingle et font des drames à partir de petits riens m’horripilent et, désolée, mais un premier rendez-vous qui ne comble pas vos attentes ou un homme qui ne répond pas à vos avances ne constituent pas de véritables drames.
Je ne me suis pas sentie à mon aise dans cet univers de bobo, que j’ai trouvé plutôt superficiel, mais je ne voudrais pas que vous méjugiez ce roman sous le prétexte qu’il n’était simplement pas pour moi. Il possède d’indéniables qualités.
L’autrice décrit des sentiments, des états d’esprit, plus que des actes. Ces personnages, qui s’écoutent tellement, peuvent sembler nombrilistes. Pour autant, il lui a fallu un certain talent pour permettre au lecteur d’entrer ainsi dans leur tête. Je lui reconnais de surcroît qu’elle ne fait pas de remplissage ni ne donne dans la complaisance, la fin très ouverte en est témoin et j’apprécie ce courage. Il en faut toujours pour ne pas céder à l’envie de satisfaire le plus grand nombre. Rares sont les lecteurs qui ne se sentiront pas frustrés par une telle fin, pourtant je la trouve raccord avec l’ensemble.
L’édition poche est agrémentée d’une nouvelle bonus. Ce texte court et lumineux est agréable à lire, mais il concerne la rencontre des trois amies et ne vous renseignera guère sur leur devenir.
Il est clair que L’année du flamant rose ne me laissera pas un souvenir impérissable. Je vous encourage toutefois à vous faire votre propre idée. Si vous êtes amateur de poésie, avez l’esprit romantique et croyez aux signes, cela pourrait vous enchanter.




vendredi 26 janvier 2018

Hygge, l'art de vivre à la scandinave

Un livre de Brontë Aurell, publié chez Gründ.
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Présentation de l'éditeur :

Pourquoi le fameux Hygge, cet art de vivre scandinave, fait-il tant rêver le reste du monde ?
Comment se fait-il qu'avec un climat si rude, nos cousins nordiques se déclarent parmi les peuples les plus heureux du monde ?

Brontë Aurell est partie à la recherche des éléments typiquement scandinaves, et plus largement nordiques, à travers la Suède, le Danemark, la Norvège, mais aussi la Finlande et même les Pays-Bas ou l'Allemagne. Au menu : balades en plein air, tartines de pain noir, vélo par tous les temps, boissons chaudes, mais surtout : confort, design, lumière et convivialité.
Vous tenez entre vos mains le guide ultime du bonheur à la scandinave, et vous verrez qu'il n'est pas difficile de se l'approprier.


Sommaire :
- Qu'est-ce que la Scandinavie ?
- Un peu de style
- À table !
- La vie au grand air
- En famille
- Culture
- Fêtes et traditions

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D’un point de vue esthétique, ce livre est très réussi. La jaquette, joliment travaillée, permet de voir en transparence la photographie qui habille une couverture en cartonnage épais. De nombreuses photos illustrent les chapitres, ce qui rend l’ouvrage très agréable à feuilleter. C’est vraiment un bel objet.
Ne vous laissez pas piéger par le titre qui surfe sur la mode. Il y a deux ou trois pages sur le hygge, intéressantes au demeurant, mais ça s’arrête-là. Le mot est d’ailleurs absent du titre original. L’auteur explique que hygge est un sentiment, quelque chose que l’on crée soi-même mais qui n’est pas aussi artificiel que la façon dont le présente les magazines… Selon les personnes, ce sentiment de bonheur tranquille ne naîtra pas des mêmes choses.
Cet ouvrage, lui, n’est pas là pour vous enseigner un art de vivre qui vous rendra plus heureux, mais pour vous faire connaître un peu mieux la Scandinavie, à savoir la Norvège, le Danemark et la Suède. L’autrice précise que les habitants de ces pays n’utilisent pas le terme « scandinave », mais que les étrangers ont souvent tendance à les regrouper sous cette appellation. Cela vaut peut-être pour le public britannique à qui elle destinait son livre au départ, néanmoins je n’ai pas l’impression que ce soit le cas dans nos contrées francophones (pas depuis les années 80 en tout cas).
Enfin bref, l’autrice aborde de nombreux sujets, toujours en les nuançant selon les spécificités de chaque pays. L’ouvrage est composé de chapitres thématiques (la famille, la culture, les fêtes, la cuisine, etc.) qui regroupent de courts textes qui parlent un peu de tout et de rien, sans suite logique. Parfois ça tient un peu du guide de voyage vous expliquant comment éviter les bévues… Elle saupoudre ses anecdotes d’humour et comme ce n’est pas le genre de livre qu’on lit d’une traite ça reste assez sympathique, même si parfois nous ne sommes pas culturellement réceptifs (les implications des chamailleries entre Danois et Suédois, par exemple, me sont un peu passées au-dessus de la tête. Je sens bien qu’il y a taquinerie, mais bon ça ne m’amuse pas vraiment…).
Il y a de tout dans ce livre, des passages sur l’histoire, sur le sport, sur la découpe du fromage… On vous parle des styles de décoration, des vêtements, de l’éducation, des créatures mythologiques et des sandwichs ouverts (que quelqu’un m’explique pourquoi ça n’a pas été traduit par tartines ?!!)… Lisez dans le désordre, piochez çà et là, et vous passerez un moment agréable moment à découvrir une autre culture. De temps en temps, vous trouverez quelque chose que vous aurez envie de prendre à votre compte.
Par exemple, ce livre comporte quelques recettes. L’une d’elles m’a horrifiée (gâteau de sandwichs, c’est de toi que je parle. Va traîner ta mayo hors de ma vue !!!), toutefois j’ai eu envie de tester celle des roulés à la cannelle. Elle est différente de la version américaine et me semblait appétissante.
Si je m’étais écoutée, j’aurais fait de nombreuses modifications (j’allège souvent les recettes et je les végétalise) mais j’ai voulu tester celle-ci avec le plus d’honnêteté possible, je l’ai donc suivie mot à mot, si ce n’est que je n’ai pas fait de dorure (par fainéantise) et pas ajouté de sirop ni de sucre sur le dessus après cuisson parce que je savais déjà que la dose de sucre serait à la limite du supportable pour moi.
Et Effectivement, c’est très, très sucré, au point que ça m’a agressé le palais. Même les becs sucrés à qui j’ai fait goûter ces roulés l’ont admis. Cela mis à part, (ce qui n’est après tout qu’une question de goût), c’est une bonne recette.

roulé à la cannelle

Souvent, quand on trouve des recettes dans des livres qui ne sont pas totalement consacrés à la cuisine, elles sont juste là pour faire joli et sont pleines de défauts, de non-sens ou carrément pas réalisables. Ce n’est pas le cas de celle-ci. Elle est claire et facile à réaliser, bien qu’elle prenne un peu de temps, et elle ne demande pas de grandes compétences en pâtisserie. L’autrice préconise l’usage d’un robot, mais pas d’inquiétude si vous n’en possédez pas, je l’ai faite à l’ancienne en pétrissant la pâte à la main et ça ne prend pas beaucoup plus de temps. C’est même plutôt agréable à faire avec les enfants.
À l’occasion je tenterai une adaptation plus à mon goût et je testerai d’autres recettes, comme les brioches de Sainte Lucie (mais vade retro gâteau de sandwichs !!!)
Vous l’aurez compris, c’est la partie cuisine que j’ai préféré, même si elle m’a parfois décontenancée (j’ai des origines italiennes du côté paternel et ce que fait la Suède de notre patrimoine culinaire est inacceptable !!! :P )
J’ai appris des choses avec ce livre, cependant je l’ai lu de façon linéaire ce qui n’est pas la chose à faire pour l’apprécier. Les entrées sont très courtes, elles vont à l’essentiel, mais tout se mélange. On passe sans cesse du coq à l’âne, puis on revient au coq… Il n’est pas toujours aisé d’y trouver ce qu’on y cherche et c’est dommage.
Hygge, l'art de vivre à la scandinave demeure toutefois un très bel ouvrage, un de ceux qu’on aime offrir à Noël ou aux anniversaires et feuilleter de temps en temps chez soi, au calme, justement lors d’un moment hygge. À réserver aux amoureux des pays nordiques ou des voyages.

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mardi 23 janvier 2018

Humain.e.s trop humain.e.s

Un roman de Jeanne-A Debats, publié chez ActuSF.

Troisième et dernier volume de la série Testaments.

Mes billets sur les tomes précédents :
- L’Héritière
- Alouettes
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T3-Testaments-3-Humain-e-s-trop-humain-e-s-Jeanne-A-Debats.jpg
Présentation de l'éditeur :

Je m'appelle Agnès Cleyre et je suis une sorcière. Une vraie cette fois. Ignorée durant toute mon existence par mes consœurs, voilà que la Grande Mère a enfin décidé de m'intégrer dans un convent. Mais pas le temps de m'interroger sur cet étrange revirement de situation. Au même moment, tous les vampires du Cénacle Majeur viennent de périr dans un mystérieux attentat, laissant à l'étude notariale de mon oncle la délicate question de la succession à régler et la garde d'un étrange coffre qui attire bien des convoitises. Serait-ce à cause de lui d'ailleurs qu'une pieuvre géante de l'espace s'est mise en tête de nous rayer de la surface de la Terre ?

Ma parole, tout l'AlterMonde semble devenir fou au même moment. Il ne manquerait plus que la fin du monde...
ATTENTION, cette chronique contient un spoiler concernant le devenir d’un personnage du premier tome.

J’attendais ce troisième tome avec impatience (certaines personnes de mon entourage ont pleuré de joie quand je l’ai eu, se pensant enfin débarrassées de mes jérémiades. Haha, quelle naïveté… C’était sans compter la phase de lecture. Mais bref.) Ce roman s’inscrit parfaitement dans la lignée de ses prédécesseurs. L’autrice l’a saupoudré de son habituel humour incisif, de débats très actuels (écriture inclusive, consentement et féminisme, entre autres) et d’un peu de destruction de monuments parisiens (c’est en quelque sorte une tradition dans cette trilogie).
C’est aussi l’occasion de découvrir de nouveaux personnages, dont les sœurs de coven d’Agnès que j’ai beaucoup appréciées. Leurs personnalités tranchées enrichissent le roman, malheureusement elles donnent parfois l’impression d’être là afin de justifier l’évocation de combats sociaux. J’aurais aimé qu’elles soient un peu plus développées.
Le récit est toujours conté du point de vue d’Agnès, ponctué par les commentaires d’Herfie (trop peu présent à mon goût. Je sais, j’ai mauvais goût, faites avec), mais surtout agrémenté de notes extraites des carnets de Navarre. Mais si, vous savez, ces carnets dans lesquels il écrit ses souvenirs afin de lutter contre la dégénérescence qui guette les vieux vampires. Dans ces passages, il nous conte sa vie d’avant la transformation, pour ce qu’il s’en souvient et ce qu’il a envie d’en dévoiler. Cette partie de sa vie, souvent évoquée dans d’autres ouvrages, n’en est pas moins intéressante et l’on regrette au final de s’arrêter en si bon chemin, même si c’est juste ce qu’il fallait à ce roman-ci.
Si ces souvenirs ne sont pas de tout repos, ces extraits permettent au lecteur de se poser un peu entre deux courses poursuites ou combats, ce qui n’est pas du luxe. Cependant, j’ai beau adorer Navarre et savoir qu’on ne doit pas regarder les dents d’un cheval gracieusement offert, j’avoue m’être demandé à plusieurs reprises quel rapport ses mémoires entretenaient avec le récit principal. Il s’avère qu’il y en a bien un en fin de compte, ténu mais réel, qui éclaire sous un autre jour l’idée que l’on s’est forgée jusqu’à présent des relations entre les personnages.
Néanmoins, le vrai secret que recèlent les pages d’Humain.e.s trop humain.e.s, celui après lequel le lecteur court depuis le premier tome, concerne les origines d’Agnès. On le sait, tout a conspiré pour nous mener à ce point précis de l’existence de la jeune femme, et l’autrice nous offre enfin les réponses tant attendues, démontrant, s’il en était besoin, toute la cohérence de son univers.
En lisant La Fontaine aux serpents, fabuleuse nouvelle au demeurant, je m’étais posé de nombreuses questions, que je n’ai eu de cesse de mettre en perspective de ce que je savais déjà de l’histoire d’Agnès. Humain.e.s trop humain.e.s a répondu à mes interrogations comme je m’y attendais.
Les romans de la trilogie Testaments peuvent se lire dans le désordre, mais quand même, je vous conseillerais de ne pas commencer par celui-ci. S’il se suffit à lui-même, il perdrait beaucoup de son charme à être lu sans avoir créé au préalable des attaches avec les personnages. Je l’ai trouvé un peu moins consistant que les précédents.
En toute franchise, ce troisième tome n’est pas mon préféré, en revanche il remplit bien son office. Je quitte à regret le personnel de l’Étude, mais j’ai bon espoir de retrouver Navarre dans d’autres aventures.
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Découvrez également les avis de Boudicca et Mariejuliet.