dimanche 1 juin 2014

Concours de nouvelles et vieux délire...

Il y a un chouette concours de nouvelles sur Vampires et Sorcières en ce moment. Vous pouvez au choix écrire sur le métier que pourrait éventuellement exercer une créature surnaturelle ou décrire son entretien d'embauche.


Du coup ça m'a rappelé un vieux truc que j'ai écrit, juste pour m'amuser, et que j'avais publié sur mon blog privé en guise de feuilleton il y a bien cinq ans.
Il est trop long pour le concours, écrit à l'arrache et plein de références de l'époque, mais j'avais envie de vous le poster, du moins le premier épisode pour commencer.
Le personnage central est une sorcière, même si ça ne transparaît pas dans ce texte-là, et c'est mon punching-ball préféré. Quand j'ai envie d'écrire sans trop me prendre la tête, j'en reviens toujours à elle. Son humour est aussi pourri que le mien, mais vous verrez, elle est sympa quand même.


Le Stage infernal, épisode 1.


Il y a des avantages certains à bosser aux enfers en été. Déjà on peut choisir ses horaires, là-bas il y a du boulot à toute heure, mais moi je préfère la journée car, contrairement à quelques idées reçues, il fait frais en-bas. Bon, un peu humide quand même, on travaille dans des tunnels après tout, faut prévoir une petite laine… Il n’y a que dans la section chrétienne qu’on se les grille…
Le plus déprimant en arrivant le matin c’est de voir tous ces gens qui attendent aux guichets, ça râle, ça se plaint… D’un côté, avoir affaire à des créatures infernales qui font tout pour vous rendre cinglé, c’est agaçant, mais ils sont morts après tout, le temps n’est plus un problème. Ils feraient bien mieux, pour la plupart, de prendre cela comme un doux prélude à leurs souffrances à venir.
Je sais par ma marraine, qui d’ailleurs m’a trouvé ce job d’appoint, qu’une grève récente a contraint la direction à oublier ses projets de remplacement des guichetiers par des machines. M’est avis de toutes façons que mieux valent des créatures infernales occupées plutôt qu’oisives et de mauvaise humeur à traîner dans les tunnels… De toutes façons je m’en fous, j’ai un laisser-passer.
Ce qui ne m’empêche pas, restrictions budgétaires obligent, de devoir attendre la navette dont la gestion des allées et venues est de plus en plus aléatoire… Depuis que Charon a pris sa retraite, ça part en vrilles.
Moi, du moment qu’on me laisse tranquille… Mais ce sont les enfers ma p’tite dame, on ne vous laisse jamais tranquille, quoi que vous soyez venu y faire et comme sur mon front il doit y avoir marqué « renseignements généraux » (en abrégé quand même, je n’ai pas le grosse tête à ce point) y a toujours un plouc pas fichu de suivre les flèches qui vient me demander son chemin. Cela dit, ça m’arrive même en surface…
Celui d’aujourd’hui suinte la beaufitude par tous les pores, bermuda à la couleur indéfinissable, chemise aux tons criards qui habille un débardeur blanc, enfin qui a dû l’être un jour, des sandales maronnasses et des chaussettes. Sans oublier le sacro-saint bob cochonou qu’il a dû choper pendant le tour de France.
—Touriste… Dis-je machinalement.
Et le beauf de prendre ça pour une question :
— Oui, non, en fait j’étais en vacances quand…
— Ouais, ouais…
Les détails, très peu pour moi. Autant abréger, sinon il ne me lâchera pas.
— Et en quoi puis-je vous aider ?
— C’est que… C’est si grand ici, je ne sais pas trop… Et vous semblez bien connaître la maison…
Encore un cas. Si savoir où se trouve le distributeur de café veut dire bien connaître la maison, alors ouais, Il n’a pas tort. Tâchons d’accélérer un peu les choses.
— Badge.
— Hein ?
— On vous a bien filé un badge ?
— Euh oui.
— Et pourquoi on ne porte pas son badge, hummmm ?
— Oh, je ne savais pas que c’était nécessaire…
Ben voyons, tu crois qu’on te le donne pour le coller dans ton album souvenirs ? Ou peut-être qu’il n’allait pas avec ta chemise…
Et je le vois sortir un badge vert avec une croix.
— Chrétien, c’est par-là bas, la porte au-dessus de laquelle il y a une graaaaaande croix tout pareil que sur le badge.
— Mais enfin, je croyais… On est en enfer ici, non ?
Quand tu veux tu sais les lire les panneaux alors…
— Et je sais bien que je n’ai pas toujours été à l’église quand il fallait et tout, mais…
— Vous inquiétez pas… Vous allez juste passer à la pesée, vous irez sûrement au purgatoire si vous n’avez pas fait grand-chose de mal… Bon, c’est Gabriel que j’ai vu passer tout à l’heure et qui doit être de service aujourd’hui, il est plutôt caractériel, savez, mieux vaut ne pas lui dire que vous n’alliez pas à l’église, il n’aime pas les faux-culs… Bon évidemment n’allez pas mentir, il le saurait, mais contentez-vous de répondre le plus succinctement possible et ça devrait le faire.
Chaleureux remerciements, hey ne me touche pas avec tes sales pattes. Vraiment, je suis trop gentille. C’est ça, éloigne-toi, passe la porte, fiou…
Bon, enfin débarrassée. Regard vers l’horizon, toujours pas de navette, fait ch…
— Excusez-moi…
Et m… Un seul ne suffit pas à payer mon tribut à la société ?
— Ouiiiii ?
Tiens, lui il a mis son badge au moins.
— Oooooh, on n’en voit souvent des comme ça.
— Je vous demande pardon ?
— Des vrais de vrais athées y en a pas des masses, en général à la dernière minute ils pètent les plombs…
Son regard pincé m’en dit long sur ce qu’il pense des tarées dans mon genre…
— Et qu’est-ce que je fiche ici alors ?
— Comme tout le monde, pas de passe-droit.
En fait, avant on les envoyait tout de suite dans le néant pour quelques siècles, histoire de leur apprendre un peu la vie, sans mauvais jeu de mots. Quand tu passes tout ce temps dans le noir à réfléchir sur toi-même, ça te passe l’envie de ne croire en rien, mais maintenant, pour les faire chier un peu plus, on les force à attendre avec les autres, histoire de bien les enfoncer.
— Le néant c’est la troisième porte à droite, juste à côté des toilettes. Ne vous trompez pas, hein…
— Comment ça le néant ? Et tout ce fichu bazar ?
— Hé, tu ne crois en rien mon vieux, on ne va pas entretenir des enfers pour les gens comme toi. Qu’est-ce que tu t’imagines ? C’est que ça bouffe du combustible ce genre de choses (je n’aurais peut-être pas dû utiliser ce genre de métaphore, ici ça peut prêter à confusion) ce qui le fait tenir debout c’est la foi, tu n’en as pas alors tu reçois le minimum syndical, c’est-à-dire le néant. T’avais qu’à croire mon vieux et entretenir ce lieu avec tous tes camarades humains. Tu ferais mieux de te dépêcher si tu ne veux pas qu’ils t’y poussent à coup de fourche.
Le gars commence à se plaindre, je suis tentée d’appeler le service de sécurité. Oh, bien sûr je pourrais lui dire qu’après quelques siècles d’attente à s’ennuyer comme un rat mort — bien le cas de le dire — il va se réincarner, mais ça ne serait pas du jeu alors… Et puis je risquerais de me faire taper sur les doigts.
Je le regarde s’éloigner escorté par deux bestioles ailées plutôt patibulaires quand quelqu’un me pose la main sur l‘épaule. Après un bond magistral et pas vraiment gracieux, je reconnais un ange blond plutôt piteux.
— Non mais t’es cinglé Glorfindel, on ne t’a jamais appris à ne pas faire ce genre de truc aux enfers ? C’est un coup à te faire griffer (à défaut de fourche, je fais ce que je peux, je ne suis qu’une fille après tout).
Air pincé dudit Glorfindel.
— Je ne m’appelle pas Glorfindel.
— Ouais, ouais… Tu sais, les noms en el, ils se ressemblent tous…
— Je ne m’appelle pas…
— Ouais, bon, je sais, tu veux quoi ?
Et l’autre de me tendre un prospectus.
Je le lis sans toutefois le prendre. Faut se méfier ici. N’acceptez jamais rien, de personnes connues ou inconnues de même, et surtout pas quand ça vient des anges… Vous pourriez vous retrouver comme un rien propulsé pour une remise à niveau évangélique dans un monastère paumé. Là en l’occurrence, on n’en est pas loin…
— Il n’est jamais trop tard, convertissez-vous ? T’as de l’espoir mon vieux.
— J’ai surtout la foi et ce n’est pas ma faute si on m’a envoyé ici… Et puis toi t’as encore plus de chances que les autres de pouvoir reprendre la bonne voie. En plus tu étais chrétienne avant, tu…
— Oh, la paix ! Qui te dit que c’est la bonne voie ? En travaillant ici je suis bien placée pour savoir qu’il en existe tout un tas et qu’elles se valent plus ou moins.
— Mais la nôtre offre un paradis…
— Je l’ai vu votre paradis, tu m‘excuseras, mais ce n’est pas vraiment l’endroit où je passerais le plus volontiers mes vacances… J’en ai vu pleurer et supplier pour s’échapper de votre paradis.
— Tu exagères, répondit-il, d’une voix mal assurée pourtant, il faut juste un peu de temps pour s’acclimater à la musique, c’est tout…
— Ouais, ouais… Pas tout le monde supporte les cantiques non-stop.
Ma navette, sauvée.
— Alléluia, dis-je sans y penser.
— Ah, tu vois, tu…
— Pas le temps, je suis déjà en retard.
Je grimpe dans la barque avant qu’il ne puisse me retenir.
—Tu ne veux pas un prospectus ?
Je fais un geste de la main qui pourrait vouloir dire à la fois non merci, même pas en rêve, va donc te…, ou encore le bac du recyclage c’est par là-bas. Qu’il l’interprète comme il en a envie, après tout, il est temps qu’il comprenne que tout en ce monde est subjectif et qu’on ne peut rien faire sans libre-arbitre.
Je le sens, la journée va être longue.


À suivre…

10 commentaires:

  1. Du coup, je veux la suite ! A quand le roman ?

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    1. Tu es bon public. Pour la suite... Disons dans une petite semaine.

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  2. Hey mais c'est très sympa ça !!!

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    1. C'est surtout tellement réaliste. Toute personne ayant travaillé dans un service administratif se sentira concernée :P

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  3. Mouarf ! Tu es une sadique ! lol

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  4. Excellent ^^ (tu sais pas , véridique : hier un type arrive vers là où je bosse et il dit "exchcujez-moi, je cherche les véchés" alors je lui dis "c'est juste devant vous, au fond du jardin à droite" et là ma collègue me regarde et me dit "mais... pourquoi tu l'envoies là-bas ?" et je dis "bin, il cherche les wc !" et là elle me dit "mais non ! il cherche l’évêché" et elle lui a couru après pour lui dire où c'était ^^ j'avais rien capté moi, avec chon acchent ^^)

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  5. LOL !!! (Tu peux parier que j'aurais compris la même chose que toi...) Et je vois trop bien ta collègue lui dire en parlant de toi : c'est pas sa faute, vous savez, elle est cinglée, comme tous les artistes. :P

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  6. mdr, nan elle l'a joué subtil "ma collègue s'est trompée, on ne peut pas y accéder par là, il faut que vous remontiez la rue et passiez de ce côté" ^^ ceci dit on s'est demandé si par hasard il ne cherchait pas réellement les wc, et là il a dû nous détester ^^

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  7. Mdr ! Mais quelle idée il a eu aussi de venir vous demander un renseignement... ;)

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