vendredi 31 décembre 2021

Bilan 2021

2021 n’a pas été une année faste, en quantité comme en qualité (41 livres terminés, deux encore en cours). Sans parler de problèmes de santé divers et variés qui m’ont empêchée de lire autant que je l’aurais souhaité. Enfin, de ma quarantaine de lectures (audiolectures comprises), je retiendrai quand même quelques ouvrages qui sortent du lot. 
L’ordre de présentation n’a pas d’importance, à l’exception du premier et je vous invite à cliquer sur les liens des chroniques pour plus d’information.

Eh oui, mon favori de 2021 n’est pas un roman, mais un feuilleton audio.


Ce roman a été une excellente surprise. Comme son personnage, l’autrice semble avoir été une lectrice vorace, ce qui crée forcément une connivence avec le lecteur s’il l‘est aussi.
J’ai beaucoup aimé la façon dont elle utilise des motifs pour le moins classiques au service de sa propre originalité.


Diamants s’apparente davantage à une épopée qu’à un roman. Cette fantasy élégante et poétique possède la saveur d’un mythe. Or qu’est-ce qu’un mythe si ce n’est une vérité racontée avec des symboles ?


Cet album destiné aux enfants est une merveille d’humour irrévérencieux et d’intelligence.


Cet excellent roman YA donne à réfléchir sur notre société actuelle, le futur que nous nous préparons et les injustices sociales que nous laissons perdurer.


Enfin, j’évoquerai, comme je le fais souvent dans ces bilans, le premier tome d’une série que je juge prometteuse :
La façon dont l’autrice utilise l’Histoire pour forger son uchronie m’a séduite et j’ai hâte de voir ce qu’il adviendra des personnages.



Je vous souhaite par avance une excellente nouvelle année et de bonnes lectures.
À bientôt pour toutes les chroniques en retard !

mardi 28 décembre 2021

Dans tes bras

Un roman de Talia Hibbert, publié exclusivement en numérique dans la collection Kobo Originals.


C’est parti pour une petite romance de Noël.
D’un côté nous avons Abbie, revêche mais juste assez pour cacher ses faiblesses. Parce qu’Abbie a grandi dans une tribu de garçons et qu’apparemment être gentille équivalait à tendre le bâton pour se faire battre, même si ses frères l’adorent. Et puis la vie ne l’a pas aidée à s’ouvrir aux autres. Elle sort d’un mariage désastreux et pense que le seul mec qui l’intéresse vraiment est devenu inaccessible. Donc Abbie est dévorée par toutes sortes d’angoisses, mais elle travaille là-dessus.
De l’autre côté nous avons Will, qui a grandi juste à côté de chez Abbie et qui s’est quasiment fait adopter par la fratrie. Il est devenu acteur, a conquis le monde entier, mais il reste le gars simple qu’il a toujours été. Le fait de n’avoir pas toujours eu la vie facile l’aide bien à garder les pieds sur terre.
Bien sûr ces deux-là sont amoureux depuis l’enfance, mais n’ont jamais osé se le dire… Peut-être en trouveront-ils l’occasion durant ces fêtes de Noël, censées se passer en famille dans la ferme écossaise de la grand-mère d’Abbie. En tout cas, c’est ce qu’espère Will. Et il a un plan.
Bon, disons-le tout de suite, je n’ai pas été enchantée par cette romance. C’est mignon, ça se lit vite et ça commençait plutôt bien, mais ça manque de relief. Ce roman est un squelette sans muscles ni chair. Il n’est pas abouti et c’est là son problème majeur. 
On dirait que l’autrice a voulu terminer son histoire le plus vite possible. Cela est flagrant dans la façon dont elle ébauche à peine ses personnages secondaires. Par exemple, les trois frères d’Abbie, dont deux sont plus âgés et un est son jumeau, ne semblent pas avoir de partenaires ni d’enfants. Certes, ils ont le droit, mais ça fait beaucoup d’adultes de plus de trente ans célibataires dans la même famille, non ? Ce sont des plantes vertes dans un décor en carton. Néanmoins cela pourrait passer, si la romance était plus construite. Pas forcément plus profonde (je n’en attendais pas tant), mais plus vivante.
Malheureusement, dans le même esprit d’économie d’intrigue ou de descriptions, il ne se passe pas grand-chose. Will dit « je veux » et Abbie répond « j’ai peur », pendant une centaine de pages (le roman en compte 119). Le schéma est vraiment répétitif car la majeure partie du récit se concentre sur l’analyse des sentiments des personnages. On se focalise sur l’un ou sur l’autre et sur leurs questionnements qui tournent en spirales. Ils ressassent leurs désirs et angoisses parce qu’ils ont peur du rejet et surtout de n’être pas aimés en retour autant qu’ils aiment, chacun étant persuadé que ses sentiments sont si forts que l’autre ne pourra pas le supporter… L’autrice aurait pu rendre cela plus vivant en racontant certains de leurs souvenirs, pour montrer comment ils sont tombés amoureux ou en les faisant davantage interagir durant ces retrouvailles, toutefois elle a préféré les monologues intérieurs. On sort de ce roman sans réellement connaître Abbie et Will.
Je trouve cela dommage parce que pour une fois le personnage masculin n’est pas un gars toxique. Will respecte les limites de la femme qu’il aime et c’est bienvenu quand on sait que la romance fait plutôt la part belle aux pervers narcissiques en général. En revanche, si Abbie est un personnage plutôt crédible (pas forcément sympathique, mais dont on peut en tout cas comprendre le comportement) je me suis souvent demandé de quelle planète venait Will… Comme si être gentil était forcément synonyme d’abruti dans la tête de l’autrice... il a le QI d’une huître et la capacité d’attention d’un chiot. Sérieusement, j’ai essayé de l’apprécier mais il est complètement à l’ouest les trois quarts du temps. J’ai même eu pitié. C’est à se demander comment ce gars retenait ses dialogues. Ceci dit, il explique lui même qu’il doit tout à sa belle gueule et qu’il ne se sert pas souvent de son cerveau. Au moins il en a conscience et sa créatrice aussi… Alors oui, un gars distrait peut avoir un certain charme, mais lui raisonne et agit comme un enfant.. C’est perturbant. Enfin, au moins il m’aura fait rire. De consternation, mais c’est déjà ça.
J’ai bien conscience d’être aussi revêche qu’Abbie dans cette chronique, cependant j’ai vraiment essayé de voir les bons côtés de ce roman. Je crois qu’il aurait gagné à être étoffé. N’en attendez pas trop, mais si vous voulez une lecture rapide et peu exigeante, une romance moderne sans macho ultra possessif, il pourrait vous plaire.


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dimanche 26 décembre 2021

Meurtres et pépites de chocolat - Les enquêtes d'Hannah Swensen T1

Un roman de Joanne Fluke, publié chez Le Cherche Midi pour la version papier et Audible pour la version audio. Celle-ci est lue par Flora Brunier.


Hannah Swensen est une jeune femme qui approche des trente ans, est « tragiquement célibataire » comme sa mère n’arrête pas de le lui rappeler, accro à la caféine et dingue de son chat. Vous voyez le topo : l’autrice aime bien les clichés. Hannah a interrompu ses études universitaires pour revenir à Lake Eden, sa ville natale, afin de soutenir sa mère après la mort de son père. Honnêtement, cette dernière ne semble pas en avoir besoin car elle a une vie sociale très active (elle n’a pas besoin de travailler). Tenter de caser sa fille aînée semble être son loisir favori alors c’était peut-être ça le but. Hannah ignore de son mieux les tentatives de sa mère et a créé une pâtisserie spécialisée dans les cookies qui a beaucoup de succès. Elle mène une vie tranquille dans sa bourgade d’environ trois mille habitants, jusqu’au jour où elle tombe sur un cadavre dans la ruelle à l’arrière de son magasin et que, pour aider son beau-frère à obtenir une promotion, elle va petit à petit se mêler de l’enquête.
Ce premier tome des Enquêtes d’Hannah Swensen semble un peu suranné. Il se passe au début des années 2000 alors les gens n’ont pas souvent recours à des téléphones portables ou à internet, c’est là qu’on se rend compte de la façon dont ces technologies ont envahi notre vie. Il est toutefois agréable de faire un petit bond dans le passé.
L’enquête est sympa, quoique facile. Les gens racontent tout à Hannah avec une aisance déconcertante et elle tombe toujours pile au bon moment, mais ça passe. Il n’y a guère que la fin qui m’a un peu ennuyée tant elle est expéditive. Cependant je n’attendais pas quelque chose d’exceptionnel. Le problème de ce récit tient surtout dans le fait que les personnages ne sont pas sympathiques. Hannah oscille entre vivacité d’esprit et manque de discernement presque ridicule. Sa mère et sa sœur sont des clichés sur pattes (encore que malgré cela j’aime bien la frangine) et ça ne donne pas une image très positive de la gent féminine. Non, je ne pense pas qu’il faille encenser les femmes, cependant certains clichés me tapent sur les nerfs. La mère d’Hannah est insupportable (et stupide). Toutes les femmes du roman adorent colporter des ragots et jugent à l’emporte-pièce. Elles passent leur vie à critiquer l’apparence les unes des autres, ça en devient vite pénible… C’est donc un mystery pas si cozy que ça au final. J’espère que cela s’arrange dans la suite car je vais persister. J’ai bien aimé le fait que l’histoire se passe dans un coin paumé du Minnesota (où les hivers sont rudes) et le fait que l’autrice émaille son récit des recettes qu’évoquent les personnages. Eh oui, pour moi les recettes sont le point fort de ce livre… Il faut dire qu’elles font envie. Elles sont données en mesures américaines, mais il y a une table de conversion à la fin.
Le roman est suivi d’une nouvelle de noël qui commence bien, même si elle est aussi un peu clichée. Cependant, comme le roman, elle s’enlise sur la fin et m’a laissé sceptique.
J’ai opté pour la version audio. J’aime beaucoup écouter des livres quand je tricote ou que je pâtisse et les cozy mysteries sont parfaits pour cela. Celui-ci est idéal pour les vacances de fin d’année. La lectrice est agréable même si parfois sa prononciation de certains mots laisse perplexe (comme Moshe le chat qui devient Moche). Ce n’est pas le meilleur cozy que j’ai pu écouter, mais il est distrayant et il vous donnera certainement envie de faire des biscuits.
J’ai écrit cette chronique il y a plusieurs semaines et je l’a laissée dans mes brouillons comme quelques autres.. J’y disais que je comptais écouter le deuxième tome pour passer le temps quand je confectionnerais mes biscuits de Yule et les pains d’épices de Noël, parce que ça prend du temps. C’est ce que j’ai fait. Je n’ai pas encore terminé ce tome, mais j’apprécie que l’enquête soit liée à des personnages rencontrés dans Meurtres et pépites de chocolat. La continuité est aussi un avantage de ce genre de séries, on a le temps de mieux connaître les protagonistes et de voir se développer les axes secondaires.

dimanche 19 décembre 2021

Typo & Graillon

Un livre de Barbora Klárová et Tomáš Končinský, illustré par Daniel Špaček et traduit par Eurydice Antolin. Publié aux éditions du Père Fouettard.

Présentation de l'éditeur :

Pas facile d'être un lutin entropique. Tous les jours, il faut faire pourrir la nourriture, trouer des chaussettes, tacher les canapés de chocolat chaud et mettre plein de fautes dans les journaux. Et tout ça, sans se faire choper par les humains !
Vous êtes-vous parfois demandé pourquoi les choses s’abîment même quand vous ne les utilisez pas ? Ou encore d’où sort cette coquille dans le texte que vous venez d’imprimer et que vous aviez pourtant relu trois fois ? La réponse est à la fois plus simple et plus complexe que toutes celles que vous avez pu imaginer : c’est la faute des lutins entropiques. Leur boulot c’est de faire se dégrader… tout ce qui leur passe sous la main. Ce sont les mites ultimes de l’univers en résumé. Ils oeuvrent avec zèle car ils croient en l’absolue nécessité de la dégradation.
Typo est un jeune lutin encore en apprentissage. Il va à l’école et il accompagne parfois son père (expert en détérioration de livres) à la bibliothèque pour semer quelques fautes de frappe, en attendant d’avoir son diplôme et de pouvoir travailler seul. Sa grande ambition, que ne comprend pas trop son paternel, est de travailler dans l’informatique où il pourra glisser des coquilles traîtresses dans les programmes.
Typo nous raconte son quotidien, nous parle de son école, de son meilleur ami et de toutes ses réflexions de jeune lutin à propos de l’entropie… Jusqu’à la sortie scolaire qui va bouleverser ses convictions.
Ce fut un plaisir de passer un moment avec ces lutins entropiques toujours prêts à inventer les machines les plus extravagantes pour les aider dans leur grand œuvre. Bien qu’elle soit destinée à un jeune public, cette lecture est exigeante sur le fond comme la forme. Elle requerra sans doute l’aide d’un adulte (ou d’un dictionnaire pour les jeunes lecteurs les plus indépendants), mais comme je passe mon temps à déplorer l’indigence du vocabulaire des livres pour enfants publiés actuellement, je suis ravie. Cela étant, ce livre est aussi drôle que réfléchi (et il explique bien des choses, comme le fait que les fils des écouteurs soient toujours emmêlés sans raison apparente. Honnêtement, l’intervention des lutins entropiques est l’explication la plus logique à ce phénomène). Il évoque avec humour, intelligence et finesse des questions philosophiques que l’humanité se pose depuis toujours et continuera sans doute à se poser jusqu’à ce que la Dent du Temps nous ait tous grignotés.
Je suis tombée sous le charme de cette histoire, même si comme tout être humain j’ai tendance à vouloir lutter (en vain) contre ces pauvres lutins qui ne font que leur boulot. Les illustrations sont charmantes et pleines de détails cocasses. J’ai adoré celles des machines entropiques dans les marges. Et puis les lutins sont vraiment craquants.
Ce fut une lecture aussi agréable qu’enrichissante et je vous la conseille vivement.

P.S. : Je n’ai jamais autant corrigé de coquilles dans une chronique. Merci de ton implication Typo, mais tu devrais aller aider quelqu’un d’autre, de préférence MAINTENANT.

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vendredi 10 décembre 2021

The Sandman - Acte I

Adaptation en feuilleton audio du comics scénarisé par Neil Gaiman. Adaptée par Dirk Maggs et produite par Audible.
Disponible en CD (uniquement pour la version en langue anglaise. Elle est accompagnée d'un livret et de trois autocollants) ou en version dématérialisée (en anglais, français, espagnol, allemand ou italien) sur Audible.
La chronique porte sur la version française.


Je vous épargne le résumé de l'éditeur qui en dit trop à mon goût.

La hype autour des comics semble ne plus avoir de limites en ce moment et c’est une excellente chose si cela permet la création d’œuvres telles que celle-ci. D’autant que cela change un peu de ce que l’on nous offre habituellement. L’originalité est dans l’histoire, certes, cependant je fais aussi référence au format. Je n’ai rien contre les films et séries, toutefois je trouve qu’une adaptation audio est une excellente idée. Cela est à la fois original, car peu courant pour une série de comics, et tout à fait traditionnel car l’œuvre s’inscrit dans la longue tradition des feuilletons radiophoniques (malheureusement peu prisés dans nos contrées bien qu’on puisse en écouter de temps en temps sur certaines radios) mais qui sont toujours appréciés et surtout de qualité au Royaume-Uni.
La narration est très différente de celle d’un livre audio, cela s’apparente plus à un film sans l’image et cela plaît ou rebute dès les premières minutes. N’étant pas par nature une visuelle, j’apprécie beaucoup ce format qui laisse place à l’imagination, tout en étant aussi très évocateur si l’on prête attention aux détails de la mise en scène — très soignée dans le cas présent — et à toutes les perceptions inconscientes qu’elle induit. On perçoit notamment où se trouvent les personnages les uns par rapport aux autres. La sonorité est étudiée pour donner une notion de l’espace et les bruitages ne sont pas qu’un fond sonore ; ils enrichissent le récit.
J’ai lu beaucoup de commentaires de gens qui se plaignent qu’on perd toute une dimension de l’histoire sans les images, mais je ne suis pas d’accord. Je n’aime pas particulièrement la partie esthétique des Sandman. C’est juste une question de goût et le talent des différents illustrateurs de la série n’est plus à prouver. Je ne pense pas qu’il faille opposer les deux formats. C’est surtout par snobisme que certains rejettent cette adaptation, de la même façon que la série télévisée, en cours de production, reçoit beaucoup de critiques sur le choix des acteurs alors que l’on n’a pas encore eu  le loisir d’apprécier leur performance. Certains fans de comics sont parfois très sectaires et c’est d’autant plus vrai dans le fandom de Sandman, ce qui est vraiment dommage. Chacune de ces différentes façons d’appréhender des histoires aussi complexes a beaucoup à nous apporter.
Ce feuilleton d’une dizaine d’heures est découpé en épisodes qui pourront peut-être vous sembler sans liens au début (si vous n’avez pas lu les comics), mais vous verrez que tout a un sens dans ces récits et qu’ils se répondent. Vous apprendrez à faire attentions aux détails, même les plus triviaux. L’adaptation couvre les trois premiers volumes de Sandman, soit Préludes et Nocturnes, La Maison de poupée, Le Domaine du rêve. J’ai une affection particulière pour La Maison de poupée et j’ai trouvé la transposition brillante, encore plus flippante que dans les comics. Ces histoires sont de celles qu’on adore ou qu’on déteste.
Sandman n‘est pas pour tout le monde. Certains de ces récits sont très violents et j’ai l’impression que le format accentue le malaise que l’on peut ressentir. Il est parfois pire de deviner sans voir. Je pense surtout à l’épisode « 24h » pour ceux qui connaissent l’histoire…
Quoi qu’il en soit, que la rencontre entre l’auditeur et le feuilleton se fasse ou non, on doit reconnaître le talent avec lequel cette adaptation a été créée. À mon grand désappointement, j’ai dû opter pour la VF, parce que la VO m’égarait avec ses effets de voix et certains accents. Je le regrette, néanmoins je dois dire que la version française est d’excellente qualité aussi.
Je n’avais pas vraiment d’attentes, cependant j’ai été très agréablement surprise. Je me suis laissé emporter très facilement dans toutes ces histoires, même celles qui n’ont pas ma préférence.
J’aime les livres audio traditionnels, mais j’aime aussi beaucoup les feuilletons, surtout quand ils sont aussi vivants et bien interprétés que celui-ci. On devrait nous proposer plus souvent des œuvres de qualité telles que celle-ci. Le deuxième acte est déjà disponible en anglais, la version française est prévue pour fin janvier et je l’ai déjà pré-commandée, ce qui vous prouve mon enthousiasme.

mardi 7 décembre 2021

Dash & Lily


Dash & Lily est une série d’une seule saison en huit épisodes d’environ vingt-cinq minutes chacun. Elle est tirée du roman Dash & Lily’s Book of Dares de Rachel Cohn et David Levithan. Ce roman a eu deux suites. Je ne l’ai pas lu, mais c’est le fait d’en avoir entendu parler qui m’a fait m’intéresser à la série lors d’une journée à buller pendant les vacances de Noël de 2020. Je n’avais pas lu le résumé puisque je connaissais vaguement celui du livre et je pensais qu’il s’agissait d’un film… Autant dire que j’ai été très surprise par le générique de fin du premier épisode. Or, il se trouve que Dash & Lily c’est comme les schokobons : on n’en mange qu’à noël, mais quand on en prend un, il est difficile de s’arrêter. Bon, je vous rassure tout de suite, ce n’est pas aussi écœurant et vous ne risquez pas d’être malade si vous enchaînez les épisodes comme moi l’an dernier, même si vous êtes allergiques aux séries pour ados et aux films de Noël.
Tout commence avec un carnet rouge d’une célèbre marque, déposé dans le rayon d’une librairie tout aussi célèbre, juste à côté de Franny & Zooey de Salinger. Dash, dix-sept ans, promène sa déprime de fin d’année dans ledit rayon (ses deux parents lui donnent la vive impression de ne pas vouloir de lui pendant les fêtes et le bonheur ambiant l’étouffe). Bien sûr il tombe sur le carnet, l’ouvre et y découvre les énigmes laissées par une fille de son âge.
Comme Dash, Lily est une solitaire, mais dans son cas ce n’est pas par choix. Elle peine à se faire des amis, elle se trouve trop bizarre et elle n’a pas les mêmes centres d’intérêt que les jeunes de son âge. Et c’est encore plus dur cette année car elle se retrouve seule avec son frère (qui débute une nouvelle relation amoureuse et n’est pas disposé à passer du temps avec elle). Lily adore Noël, mais le fait d’être privée de sa famille et de voir tout le monde en couple autour d’elle lui pèse, d’où le carnet rouge, véritable bouteille lancée à la mer.
Dash et Lily vont apprendre à se connaître par l’entremise de ce carnet. Ils vont se défier aussi, sortir de leur zone de confort, s’aider à grandir un peu également. Mais vont-ils finir par se rencontrer ? Et surtout l’image qu’ils se sont faite l’un de l’autre sera-t-elle à la hauteur ?
Résumé comme cela, on pourrait croire à une histoire de romance à trois sous, mais c’est beaucoup mieux que ça. Cette série a été une excellente surprise. C’est mignon tout plein et bien dans l’esprit de Noël, c’est drôle et intelligent.
J’ai beaucoup aimé les deux personnages principaux. Dash est un gars un peu grincheux et dépressif, trop intelligent pour son propre bien, mais qui au fond a juste du mal avec les interaction sociales. Quant à Lily, derrière tout son enthousiasme et son côté optimiste guimauve, elle cache de nombreuses blessures ainsi qu’une grande envie de trouver sa place. Ce que j’aime particulièrement chez elle, c’est qu’elle ne veut pas pour autant cesser d’être elle-même, ce qui serait une solution de facilité. Je les ai trouvés l’un et l’autre aussi crédibles qu’attachants.
Les personnages secondaires sont moins fouillés, mais se jouent des clichés pour la plupart, ce qui est somme toute rafraîchissant. J’aurais vraiment voulu une deuxième saison qui leur aurait donné plus d’espace. Ceci dit, la première a une bonne fin et se suffit à elle-même. Je l’ai revue avec plaisir et je pense qu’elle est en train de devenir un de mes classiques de Noël.

De Rachel Cohn et David Levithan, j’ai lu La playlist infinie de Nick et Norah. Je ne l’ai pas chroniqué, mais c’est un chouette livre. Norah est un rien geignarde, cependant je me dois de saluer une romance YA moderne qui sort des clichés habituels.


mercredi 1 décembre 2021

Les dix mille portes de January

Un roman d'Alix E. Harrow, publié chez Hachette dans la collection Heroes.

Présentation de l'éditeur :

Un voyage aux confins des mondes, une aventure fantastique, entre Terremer et À la Croisée des mondes.

Selon January Ruddy, il n’y a qu’une façon de s’échapper de sa propre histoire : c’est de se faufiler dans celle de quelqu’un d’autre…grâce à une des Dix Milles Portes…

Pénétrez, vous aussi, dans le monde magique de l’Ecrit…où certaines paroles tracées ont le pouvoir de modifier le réel, alors que le Mal qui ferme les Portes une à une est sur vos talons…Attention, la magie vient toujours avec un prix…
Tout commence avec une enfant orpheline de mère. C’est toujours comme ça dans les contes et vous trouverez dans ce récit de nombreux clichés tels que celui-ci. Ils sont néanmoins toujours bien employés.. Le père, quant à lui, est absent (bien sûr). Il voyage à travers le monde pour rapporter des objets précieux à un certain M. Locke, dans l’ombre duquel sa fille grandit.
January — tel est le nom de la gamine rêveuse et bien seule qu’il laisse derrière lui — trompe l’ennui en lisant des livres, bercée par la longueur des jours d’attente et contrainte par une éducation stricte qui vise à faire d’elle une « enfant sage qui sait où est sa place ». Tout un programme pour cette enfant à la couleur de peau aussi indéfinissable que ses origines… Elle s’interroge beaucoup, mais ne se rend pas toujours compte qu’elle étouffe auprès de ce protecteur qu’elle aime tant, même après avoir trouvé sa première Porte. Cependant, tout ne peut pas rester figé à jamais et January va devoir choisir entre être une enfant sage ou vivre sa vie.
Qui n’a jamais rêvé à ces passages magiques que nous décrivent les contes et les romans ? Portes magiques, armoires, terriers de lapin et arbres creux ont bercé les rêves d’enfant de chaque lecteur. N’avez-vous jamais eu envie de trouver l’une de ces Portes vers la Féerie ou le Merveilleux ? C’est sur les cordes de tous ces souvenirs que ce roman joue sa mélodie à la fois familière et singulière.
January a soif d’aventure autant que de réponses. Dans ce petit monde policé qui semble se refermer sur elle de plus en plus à mesure qu’elle grandit, les livres sont son oxygène, son unique fenêtre sur l’extérieur, même s’ils lui en donnent une image déformée.
J’ai pris grand plaisir à lire son histoire. January est une jeune fille futée, courageuse et attachante. L’univers dans lequel elle évolue est rapiécé, fruit d’une réalité conventionnelle et des pouvoirs qu’accorde l’imagination à ceux qui en font bon usage.
La narration est construite de manière subtile, assurée en partie par January et complétée par les extraits d’un livre qu’elle a trouvé et dont le rédacteur, tout en lui révélant de nombreux secrets, fait preuve de réticence à tout dévoiler d’un coup. On a beau deviner son identité, comme certains rebondissements à venir, c’est une histoire qui fonctionne avec cette double narration qui génère du suspense, même s’il est artificiel, et évite au lecteur de trouver le récit trop lent. En somme, c’est un bon roman d’aventures qui éveille beaucoup de souvenirs quand on a eu une enfance de lecteur compulsif et beaucoup rêvé de voyages entre les mondes. Les personnages secondaires, alliés comme ennemis, soutiennent bien l’intrigue. J’ai particulièrement aimé Jane et Bad. C’est inventif, très distrayant et bien écrit, une bonne manière d’utiliser les poncifs et motifs qui ont nourri la littérature jeunesse (et adulte quand elle veut bien l’admettre). J’ai passé un excellent moment avec ce roman.

mercredi 17 novembre 2021

La disparition d'Agatha Christie

 Un feuilleton audio de Giuseppe Paternò di Raddusa, uniquement disponible chez Audible.


Il ne s’agit pas d’une adaptation de roman, mais d’un feuilleton original produit par Audible, avec un casting de différents interprètes. L’histoire est tirée de faits réels et l’auteur semble s’être attaché à les romancer le moins possible.
J’ai choisi ce feuilleton un peu par hasard. L’extrait m’avait plu et je ne demandais pas mieux que de m’immerger dans un récit un peu sombre et bien narré, assez typique des vicissitudes humaines ainsi que de l’hypocrisie de la bonne société. Cependant, cela n’a pas pris au-delà du premier chapitre.
Cet épisode de la vie d’Agatha Christie est bien connu, il a fait les choux gras de la presse en son temps et il n’y a guère de suspense le concernant. Je m’attendais cependant à un récit dont la profondeur ferait oublier qu’on en connaît l’issue. Ce n’est pas le cas et on s’ennuie vite.
Le détective Kenward est dépeint de manière très antipathique malgré l’excellent jeu de son interprète. Le personnage donne surtout l’impression de s’écouter parler, ce qui devient pénible à la longue tant il est blasé et méprisant. On en oublie de compatir, ce qui est assez triste quand on sait combien cette affaire a affecté l’homme derrière le personnage. Il aurait mérité d’être mieux traité et qu’on lui rende davantage justice.
Agatha, quant à elle, paraît encore plus inconséquente, capricieuse et décérébrée que son mari, ce qui n’est pas peu dire. Elle ne mérite pas cela et si le chapitre consacré à ses sentiments et pensées équilibre un peu la donne — en cela qu’il rappelle que les gens qui ont vécu cette histoire sont réels et que leur souffrance l’est aussi — il échoue néanmoins à combler les lacunes de ce feuilleton.
Le vrai problème de cette histoire est qu’il n’y a pas grand-chose à raconter. Je comprends bien qu’il faille coller aux faits mais du coup quel est l’intérêt de ce type de récit s’il est aussi aride ?
Je me suis donc ennuyée et ne vous conseille pas cette écoute, malgré le travail remarquable qu’ont fourni les interprètes pour le peu de matière qu’on leur a donné.

lundi 1 novembre 2021

The Great Witches Baking Show

Un roman de Nancy Warren, publié chez Ambleside Publishing.

Présentation de l'éditeur :

Poppy Wilkinson is thrilled to be chosen as a contestant on The Great British Baking Contest. As an American with English roots, winning the crown as Britain’s Best Baker would open doors she’s dreamed of. In more ways than one. Appearing on the reality show is her chance to get into Broomewode Hall and uncover the secrets of her past.

But strange things are happening on the show’s set: accusations of sabotage, a black cat that shadows Poppy, suspiciously unsociable residents at Broomewode Hall—and the judges can be real witches.There are murmurs that Broomewode is an energy vortex. It certainly makes Poppy see and do things that aren’t exactly normal, and seems to draw interesting characters to the neighborhood.

When a fellow contestant dies in mysterious circumstances, Poppy has more to worry about than burned pies and cakes that won’t rise. There’s a murderer on the loose and it’s up to Poppy and her new friends to solve the crime before it becomes a real show-stopper.

Après de nombreux mois d’efforts et de préparation, Poppy a enfin réussi à intégrer le casting du Great British Baking Contest. Pâtissière émérite, ce n’est pourtant pas pour cela — et encore moins pour grappiller un peu de notoriété — qu’elle a tant tenu à rejoindre le concours. Poppy a un secret. En fait, elle en a même plusieurs et elle est là pour résoudre le mystère de ses origines. Abandonnée dans une boîte en carton quand elle était bébé, elle ne sait rien de ses parents biologiques, mais elle pourrait avoir hérité d’eux certains talents pour le moins inhabituels.
Dès le premier jour, elle se lie d’amitié avec un autre concurrent, Gerry le charmeur. Mais très vite celui-ci commence à proférer des accusations de sabotage. Est-il un mauvais perdant ou a-t-il mis le doigt sur un réel complot contre lui ?
Ce tome est le premier d’une série de cozy mysteries qui me semble très prometteuse. C’est sans prétention et néanmoins très agréable à lire (ou écouter dans mon cas). Je me suis vite laissé entraîner dans l’histoire. Poppy est un personnage très attachant et sympathique. L’ambiance du concours est parfaitement rendue et j’ai hâte de mieux connaître les autres candidats dans les prochains tomes. Ils sont nombreux et on n’a pu seulement entrevoir certains de leurs traits de caractère pour l’instant. Je suis certaine qu’il y aura beaucoup à en dire.
C’est un tome d’exposition et l’enquête n’est pas transcendante, on s’attache davantage à la mise en place du décor et à faire connaissance avec les personnages principaux. Cependant, j’ose espérer que l’autrice approfondira le tout dans la suite. Je lis également son autre série : The Vampire Knitting Club. J’ai donc pu constater que pour celle-ci aussi le premier tome constitue surtout une mise en place et que la suite se révèle bien meilleure.
Quoi qu’il en soit, Nancy Warren sait comment créer de belles ambiances et des décors qu’on a envie d’arpenter aux côtés de ses personnages. Même s’il y a une touche de romance dans ses histoires, elle ne se focalise pas là-dessus. D’ailleurs, il n’en est pas encore question dans ce premier tome, même si on devine que cela risque de changer par la suite. Elle est plus attachée à donner de la personnalité et du relief à ses personnages. Ses enquêtes sont typiques du genre et elles fonctionnent plutôt bien en général.
Je pense que je vais préférer cette série, avec ses sorcières et ces fantômes (je me lasse très vite des vampires même si j’aime beaucoup Lucy, la sorcière du Vampire Knitting Club). Et je suis vraiment intriguée par les mystères entourant la naissance et l’abandon de Poppy.
J’ai choisi de découvrir ce roman dans sa version audio et j’ai profité d’une offre regroupant les trois premiers tomes sur Audible. Je n’étais pas emballée par la narratrice dans les premiers chapitres et je suis revenue sur cette opinion de manière plutôt drastique. Hollis McCarthy fait vraiment un excellent travail. J’ai pris plaisir à l’écouter et je serai ravie de la retrouver dans la suite.
À noter aussi que ce roman contient une recette de tarte au citron (celle que Poppy est censée avoir présentée au concours). C'est le genre d'ajout que j'adore et la recette fait vraiment envie, même si je n'échangerais celle de mon père pour rien au monde. ;)

lundi 18 octobre 2021

Le Serment de Jaufré

Un roman d'Anaël Train, publié aux éditions du 123.

Présentation de l'éditeur :

Il deviendra l'un des troubadours les plus prisés de la cour de l'inoubliable Aliénor d'Aquitaine, mais à 7 ans, Jaufré Rudel peine encore à comprendre l'injustice qui frappe sa famille, privée de ses terres par le puissant duc d'Aquitaine.

Alors qu'il vient de perdre sa mère, le petit garçon se découvre une passion pour le chant et la musique. Et si, face aux nombreuses épreuves qui l'attendent, cet art se révélait sa meilleure arme ?

Un roman passionnant où magie et chevalerie s'entrelacent en un tableau somptueux.


Cette lecture a été très pénible. Disons-le sans ambages : j’ai oscillé entre ennui et exaspération. Je me réjouissais de lire un roman historique, ce qui ne m’était plus arrivé depuis trop longtemps, mais me suis trouvée embourbée dans un récit falot, tissé de clichés tous plus éculés les uns que les autres, et dont le moindre retournement de situation s’est révélé désespérément prévisible.
Je m’attendais à un récit contant la jeunesse et les années d’apprentissage de Jaufré Rudel, cependant la narration est divisée en deux. Nous avons d’une part, à la première personne, l’histoire que j’escomptais et, en parallèle, les aventures des jumelles de Grimwald au service de l’Angleterre ainsi que d’une mystérieuse prophétie… Les chapitres consacrés aux jumelles sont narrés à la troisième personne, contrecarrant ainsi l’aspect biographique qu’a voulu donner l’auteur a son roman. Cela fait sens quand on sait que les personnages seront amenés à se rencontrer mais reste construit de telle sorte qu’il est très difficile de se laisser emporter dans cette histoire.
La partie consacrée à Jaufré est de loin la plus agréable à lire, même si en fait il ne se passe pas grand-chose. Je m’attendais à ce qu’elle soit beaucoup plus développée. Celle qui concerne les jumelles est en comparaison plus riche en action, mais pleine de contradictions, de facilités et de poncifs. Les méchants sont très méchants, les puissants sont capricieux et l’amour fleurit au premier regard…
L’histoire aurait gagné, je crois, à se focaliser sur l’apprentissage des personnages — la musique et la poésie pour l’un, la magie pour les autres — afin de les montrer dans leur domaine d’expertise puis de laisser au lecteur le loisir de les voir grandir et évoluer. Au lieu de cela, ils sont simplement ballottés par les événements et on ne prend jamais vraiment le temps de les connaître ni de s’attacher à eux. Ce manque de profondeur, dans l’intrigue comme dans les caractères, les rend plutôt antipathiques. Ils ne sont pas aidés par les personnages secondaires, caricaturaux au possible. 
Cette histoire est en outre pleine de longueurs et de contradictions. Un exemple : Tu as abusé de ton pouvoir pour forcer une jeune fille qui est sous ma protection à partager ton lit ? Pour te réprimander, je t’en envoie une autre, on verra ce que tu en feras… Exaspérant, vous dis-je.
Ce roman se veut préquelle du Lit d’Aliénor, un roman de Mireille Calmel — mère de l’auteur — que j’ai lu et apprécié il y a… une bonne vingtaine d’années. Mais si Le Lit d’Aliénor, malgré sa trame magico-druidique, au demeurant fort plaisante, avait une assise historique intéressante, ce n’est pas le cas de sa préquelle. On sent que l’auteur a fait des recherches en amont, mais c’est sans doute son sujet qui pèche et peut-être un peu le style. C’est raconté de manière très plate alors qu’il y a déjà trop peu à dire et le brin d’intérêt que j’ai réussi à trouver à l’enfance de Jaufré et à la jeunesse des jumelles de Grimwald est dû à ma lecture du Lit d’Aliénor et de La Rivière des âmes.
Je n’avais jamais souhaité me pencher sur les suites que l’autrice a apporté à ce cycle et honnêtement cette préquelle ne me donne pas envie d’y remédier. Je ne crois pas non plus qu’elle se suffise à elle-même, mais si vous avez aimé ces romans et que vous voulez prolonger un peu l’histoire, peut-être y trouverez-vous plus d’agrément que moi.

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mardi 7 septembre 2021

Biotanistes

Un roman d'Anne-Sophie Devriese, publié aux éditions ActuSF.


Présentation de l'éditeur :
Quelque part dans le futur.

La terre est sèche. Des grappes d’humains survivent dans les dernières oasis. Terminé les ruisseaux, terminé les animaux, terminé… la domination masculine. Parce qu’elles semblent être les seules à survivre à une maladie qui décime l’humanité, les femmes ont pris le pouvoir et les hommes sont relégués au rang de reproducteurs.

Rim, jeune sorcière élevée au convent, voit son premier saut dans le passé approcher avec impatience et fébrilité : et si elle n’atterrissait pas en zone utile et devait renoncer pour toujours à voyager dans le temps ? Et puis, qui est Alex, cette nouvelle venue qui la déroute tant, la pousse à reconsidérer ses certitudes ? Et si… Et si les hommes, en vérité, pouvaient survivre au fléau ?

Encore une pépite de l’excellente collection Naos !
Futur, date indéterminée, une maladie a décimé la population et continue de faire rage sans que son mode de contagion ne soit identifié. Les désastres environnementaux engendrés par l’humanité ont ravagé la terre. Les abeilles ne sont plus et peu de flore leur a survécu. Sans parler de la faune... Après avoir envahi et détruit l’écosystème, le plastique est devenu une denrée aussi précieuse qu’elle est rare. De l’humanité, il ne subsiste que quelques communautés éparses qui survivent tant bien que mal dans un immense désert. Leurs déplacements sont limités par l’effondrement technologique et l’accès aux ressources aussi bien qu’au savoir est problématique. 
Le salut de ces gens tient surtout au bon vouloir de celles que l’on nomme les Sorcières. Touchées par la maladie, mais sorties indemnes de celle-ci, elles ont développé un talent précieux : elles peuvent voyager dans le passé. Un seul endroit, une seule époque, elles ne choisissent pas et ne peuvent rien ramener de matériel. En revanche, elles peuvent apprendre par cœur toutes les informations qui leur permettront de rassembler le savoir utile, mais perdu, accumulé par leurs semblables au cours des siècles précédents. À l’époque de notre récit, elles sont craintes et jalousées, mais aussi respectées. Il n’en a pas toujours été ainsi et on se rendra vite compte que leur histoire complexe et fascinante, tout comme leur ascension au pouvoir, recèle de nombreux secrets.
Rim est une sorcière, bien malgré elle, seule rescapée de sa famille anéantie par le fléau. Elle a été sauvée par Ulysse le conteur itinérant et ramenée dans un convent où elle a grandi sous la protection d’Anthoïna, une talentueuse biotaniste. Dans cette société matriarcale — où les femmes dominent puisqu’elles seules peuvent survivre au fléau — Rim s’interroge sur beaucoup de choses, sur la notion d’égalité entre les sexes autant que sur l’usage que font ses « sœurs » de leur pouvoir, sur la source du fléau et la raison pour laquelle les hommes n’y survivent pas. Elle sait confusément que toutes les questions ne sont pas bonnes à poser dans ce dernier bastion de la connaissance humaine. Cependantn son prime saut approche. Quelle influence aura-t-il sur ses croyances et sur sa vie d’adulte ?
Biotanistes est un excellent roman, aussi prenant que créatif. J’ai adoré découvrir comment cette société s’est reconstruite pour survivre, les choix bons comme mauvais qu’ont fait ces humains pour s’adapter au fil des ans à un environnement de plus en plus hostile et leurs théories à ce sujet. Rim est un personnage intéressant. Passionnée et idéaliste, elle a aussi les défauts de ses qualités. Elle est impulsive et colérique. Cela ne la rend que plus humaine. Toutefois, si elle demeure au centre de l’histoire, elle n’en est pas moins accompagnée par d’autres personnages aussi complexes et que j’ai aimés suivre, notamment Alex, Anthoïna, Ibrahim et Ulysse. Je déplore cependant trop de manichéisme dans la construction des antagonistes. Par exemple, si l’on entrevoit sur la fin de l’histoire les raisons qui peuvent expliquer le comportement d’un personnage odieux tel qu’Olympe, elle manque encore trop de relief à mon goût. Des personnages plus nuancés auraient donné encore davantage d’ampleur à ce récit.
Cependant, au-delà de la construction des personnages, l’histoire elle-même est géniale. L’inversion des pouvoirs entre les sexes et le sexisme dont font preuve les femmes sont le reflet de notre propre situation. On se rend compte que les problèmes et les attitudes sont malheureusement les mêmes, peu importe qui domine. Les abus sont nombreux, les hommes discrédités et réifiés. J’ai été très intéressée par la façon dont est détournée la culture populaire, notamment les contes, pour remodeler l’histoire et renforcer l’assise de cette société matriarcale si loin de l’utopie.
J’ai aussi apprécié le contraste entre certains progrès technologiques — Anthoïna est par exemple capable de créer de minuscules créatures mécaniques ou des tenues vivantes qui s’autorégulent — et des retours en arrière drastiques dans d’autres domaines, faute de connaissances sur le sujet ou de matière première. Les véhicules les plus évolués sont des carrioles ou des chars à voiles. La médecine, ou plutôt la biotanique, peut produire des prothèses très évoluées, mais ses remèdes en sont réduits à quelques plantes.
Biotanistes est un roman d’aventure dans lequel on ne s’ennuie jamais. Au-delà de l’aspect distrayant du récit, l’autrice nous offre de nombreuses occasions de nous interroger sur notre propre société et l’avenir de la planète. Les bonds dans le passé nous confrontent à notre propre histoire, dénonçant au passage des injustices toutes contemporaines. Cependant, dans ce marasme qu’est devenu notre monde, il reste de l’espoir et l’amour de la lecture comme point d’ancrage de la sédition. Comment ne pas apprécier ?

vendredi 30 juillet 2021

Le TDAH au féminin

Un guide de Sari Solden et Michelle Frank, publié aux éditions de Mortagne. 

Présentation de l'éditeur :
« Lorsque les attentes intériorisées en matière de rôles masculins et féminins se conjuguent aux difficultés de fonction exécutive chez les femmes TDAH, ces dernières peuvent entretenir le genre d’image neurologique négative risquant de les conduire à des mécanismes d’adaptation qui les maintiennent bloquées, tels que la dissimulation, la simulation et l’évitement. » Vous sentez-vous différente en tant que femme avec un TDAH ? Vous a-t-on déjà conseillé de mieux gérer vos émotions ou de changer vos manières d’être et de penser pour réussir ou être acceptée ? Le TDAH est une différence, pas un défaut ! Il y a des avantages à composer avec lui. Chez bien des femmes, il est généralement diagnostiqué à l’âge adulte. Même encore, les préjugés contre ce trouble qu’on associe aux enfants turbulents le rendent bien souvent indétectable. Pour pallier un manque flagrant de ressources, ce livre propose des outils pratiques pour : augmenter votre concentration  communiquer avec confiance ; développer votre estime personnelle ; exploiter votre plein potentiel.

TDAH : Trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité. 
Ce trouble est encore assez mal connu en France et si la plupart des gens ont entendu parler d’hyperactivité, ils l’associent souvent à « une excuse pour qualifier le comportement de petits garçons mal éduqués » et non à une neurodivergence réelle. On a raconté beaucoup de choses sur l’hyperactivité, souvent à tort et à travers, sans diagnostique préalable ni discernement, et cela a pu faire beaucoup de mal à des gens souffrant réellement de TDAH, en particulier les femmes si peu, voire pas, prises en compte, diagnostiquées et aidées. Cela parce que le TDAH ne se manifeste pas toujours de la même manière chez tout le monde et parce que les femmes sont des caméléons quand il s’agit de cacher ce qu’elles perçoivent comme une faiblesse. Le cheminement est donc plus difficile pour elles avant d’accepter leur neuroatypie et d’apprendre à bien vivre avec elle.
Ce livre n’a pas pour but de vous expliquer le TDAH, mais de déconstruire les stéréotypes et de vous apprendre à accepter votre nature ainsi qu’à sortir de la honte que des années de dissimulation et d’intégration de schémas qui ne vous convenaient pas ont pu générer. Il vous propose des pistes de réflexions pour mieux vous comprendre et aller de l’avant. Le but des autrices est de vous aider à devenir un peu plus vous-mêmes dans la vie de tous les jours et surtout plus heureuses.
Au cours de ma lecture des premiers chapitres, cette insistance sur la honte associée au TDAH m’a fait me dire que ce n’était pas pour moi. Je n’ai jamais eu l’impression d’avoir honte de moi, cependant, force est de constater qu’en persistant et en me questionnant comme on m’y invitait, cet essai a fait remonter en moi pas mal de choses et m’a beaucoup donné à réfléchir. 
Au départ, j’étais plus intéressée par des stratégies et des exercices visant à mieux « fonctionner » qu’à recevoir une validation. Si vous êtes dans le même état d’esprit que moi, persistez, quitte à lire en diagonale certains chapitres (il y a un résumé des ponts-clés à la fin de chacun d’entre eux, ce qui est très pratique) et concentrez-vous davantage sur les encarts.
Ce livre ne vous donnera pas des techniques concrètes à appliquer au quotidien pour mieux gérer votre TDAH, mais il vous aidera à vous réapproprier votre vie. Il est très axé sur l’idée de sortir de la honte, mais aussi des entraves que l’on forge soi-même avec le temps. Et même si vous pensez que vous n’avez pas besoin de reprendre confiance en vous, l’introspection proposée par ce guide pourrait vous étonner. Vous vous rendrez aussi compte au passage que vous avez déjà développé vos propres stratégies pour mieux fonctionner...
J’ai particulièrement apprécié les encarts. Certains relatent des anecdotes pour remettre nos propres expériences en perspective face à celles d’autrui, d’autres invitent à la réflexion mais sont parfois quelque peu orientés à mon avis, même si cela part d’une bonne intention. On vous invite à tenir un journal pour y noter vos réflexions quant aux exercices et questions posées dans les encarts, ce qui peut être vraiment intéressant.
La mise en page aérée et les chapitres émaillés d’encarts — différemment mis en exergue selon la nature de leur contenu — facilitent la lecture. Néanmoins, l’ouvrage gagnerait à être plus concis. J’ai beaucoup de mal à supporter les répétitions, elles me forcent à être attentive pour rien, mais j’ai aussi conscience que ça peut faciliter la lecture à d’autres personnes qui ne tombent pas comme moi dans l’hypervigilence avec le langage écrit et qui ont besoin de répétitions pour mieux intégrer certains concepts. 
Cette lecture m’a été utile et je ne doute pas qu’elle puisse l’être à d’autres. Elle est en tout cas éminemment positive pour l’estime de soi. J’espère aussi que ce livre pourra ouvrir davantage à la différence l’esprit des gens qui n’ont pas de TDAH mais qui ont à cœur d’aider leurs proches qui en sont atteints.

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lundi 28 juin 2021

Un été avec Albert

Un roman de Marie Pavlenko, publié chez Flammarion jeunesse.

Présentation de l'éditeur : 
" Je l'aime ma mamie, je l'adore même, mais faut avouer, dans le classement international des vacances de folie furieuse, elle se situe assez loin derrière le camping entre potes et les amours de vacances au bord de l'océan. " Après le bac, l'été de Soledad était tout tracé. C'était compter sans le divorce de ses parents et le début de dépression de son père. Changement radical d'ambiance et direction les Pyrénées, chez sa grand-mère. Alors que Sol imagine ses vacances vouées à un ennui mortel, un événement inattendu vient totalement les bouleverser. Entre journées en plein soleil et nuits terrifiantes, Soledad va vivre un été hors du commun.
On ne dirait pas comme ça, parce qu’elle peut se montrer assez puérile, mais Soledad est au seuil de sa vie d’adulte. Elle vient d’obtenir son bac et au lieu des vacances au camping entre potes dont elle a rêvé toute l’année, elle se rend dans les Pyrénées chez sa grand-mère paternelle pour profiter du bon air et surtout dégager le plancher. En effet, son petit monde vient d’exploser. Sa mère est partie avec un autre homme et son père dépressif, pour qui elle avait annulé ses vacances, ne souhaite pas sa présence à ses côtés. Autant dire que Sol l‘a mauvaise et qu’elle vit assez mal cette mise au vert forcée. Aussi attachante qu’exaspérante, la jeune fille enchaîne les bons mots (au point que ça devient parfois lourd même s’ils sont bien tournés) et se plaint à qui mieux mieux. Pourtant, ces vacances loin de tout (et surtout de tout réseau) vont peut-être lui permettre de renouer avec sa grand-mère qu’elle adore mais dont elle s’est éloignée en grandissant.
Le temps file et les gens ne restent pas éternellement là à nous attendre. Rien de culpabilisant là-dedans, c’est la vie et on a tous besoin de s’émanciper pour grandir, puis de revenir vers les siens ensuite. Je trouve que ce roman illustre bien ce fait, mais il ne s’arrête pas là. Sol va prendre conscience de la solitude de sa grand-mère dont le mari est mort récemment, va accepter le divorce de ses parents et va aussi s’ouvrir davantage aux autres alors que paradoxalement elle se trouve très isolée et… apeurée. Oui parce que si les journées de la jeune femme sont monotones, ses nuits sont emplies d’angoisses qui s’intensifient au cours de son séjour. Un cinglé rôde dans ce petit coin de montagne où il ne se passe jamais rien d’ordinaire et ce qui au début n’inquiète que Sol, que son entourage juge un peu excessive, va vite peser sur cette petite communauté. Pourtant, la grand-mère de Sol persiste à rassurer sa petite-fille en lui disant que le chêne du jardin, prénommé Albert, veillera sur elles. Autant dire que Sol est plus que dubitative et s’inquiète en outre pour la santé mentale de son aïeule… Il est temps pour elle de se responsabiliser un peu plus pour veiller sur les gens qu’elle aime.
Un été avec Albert est un roman qu’on lit très vite, parce qu’il est bien écrit et que malgré quelques lourdeurs dans l’humour de Sol ou dans la répétition des actions, on se laisse bercer par l’histoire — un peu glauque quand même — et par les réflexions de la jeune femme sur sa vie. J’ai apprécié ma lecture, néanmoins mon avis demeure mitigé car je n’ai pas adhéré à l’aspect fantastique du récit, trop pataud à mon goût. Je m’attendais à lire un roman humain, sur les liens entre une grand-mère et sa petite-fille, sur le choc entre deux vies tellement différentes, avec un peu de mystère en prime, puis ça a sombré dans le thriller mal dégrossi et le fantastique en carton pâte. Le méchant de l’histoire manque de profondeur et de tangibilité. Ses actes sont choquants mais n’apportent pas grand-chose au récit à part dégoûter le lecteur. Du coup, j’ai moins saisi la finalité de tout ça puisque ça fait surtout remplissage. Ce n’est pas assez abouti. Cependant, ce roman est une belle ode à la nature, j’ai beaucoup apprécié la subtilité avec laquelle l’autrice nous en rappelle les merveilles, loin des clichés éculés, dans ses descriptions et commentaires sur la faune et la flore. Pas d’envolées lyriques malvenues ni de niaiseries, elle parle d’insectes aussi bien que de fleurs médicinales. Le message est clair : prenez soin de la nature et elle prendra soin de vous. J’ai aussi aimé les personnages ainsi que les liens qui les unissent. Il est agréable de voir Sol mûrir durant cet été. C’est ce que je choisis de retenir de cette lecture.

dimanche 30 mai 2021

Le Souffle du géant

 Une BD de Tom Aureille, publiée chez Sarbacane.

Présentation de l'éditeur :

Deux sœurs, à la vie, à la mort.

La légende raconte que les lointaines Terres du Nord cachent des Géants dont le souffle a le pouvoir de ressusciter les morts… Il n’en faut pas plus pour Iris et Sophia. Nourrissant l’espoir fou de ramener leur mère à la vie, ces deux jeunes orphelines aux dons magiques extraordinaires se lancent à corps perdu dans un voyage aussi long que périlleux, sans prendre garde à la silhouette tapie dans l’ombre qui les suit à la trace…

Rien n’est trop grand pour les deux soeurs, mais sauront-elles rester unies face aux dangers qui les guettent ?

Iris et Sophia sont orphelines et livrées à elles-mêmes. Leur père a disparu sans laisser d’adresse quand elles étaient petites et leur mère est morte dans des circonstances très traumatisantes. Leur vie n’était déjà pas bien rose et elles peinent à se remettre de ce nouveau drame. Aussi, poussées par les légendes qui ont toujours fasciné leur père et le pendentif qu’il leur a légué, elles entreprennent un périlleux voyage vers le nord dans l’espoir de ramener leur maman à la vie.
Iris, l’aînée, est forte et combative alors que sa cadette, plus douce, aime observer la nature et se poser des questions, l’esprit toujours avide de connaissances. Si leurs caractères sont opposés, elles n’en sont pas moins très soudées et pas si sans défense que leur jeune âge le laisse paraître. Pourtant, leur démarche reste naïve. Elles n’ont aucune idée des dangers vers lesquels elles se ruent. Et puis, est-ce une si bonne idée de ramener quelqu’un à la vie ?
Iris et Sophia sont deux personnages attachants et on compatit vite à leur chagrin, de même que l’on tremble pour elles face aux dangers qu’elles affrontent. En effet, elles ne sont pas les seules à vouloir s’emparer du souffle d’un géant pour ramener un être cher et de nombreux pièges jalonnent leur route. Heureusement, si elles croisent beaucoup de personnes mal intentionnées, il y a aussi des gens bien.
Le Souffle du géant est une jolie BD sur la partie la plus difficile du deuil : l’acceptation, mais aussi sur la famille, la précarité et ce qui au final compte vraiment dans l’existence. Les deux sœurs vont grandir et s’affirmer, chacune à sa manière et choisir dans l’adversité le genre de personnes qu’elles veulent être.
J’ai déploré un scénario quelque peu linéaire, malgré quelques flash-back, bienvenus mais taillés à la serpe, concernant la mère des deux filles. Les personnages ne sont pas assez développés à mon goût. On apprend assez peu de choses sur le père et encore moins sur l’origine des pouvoirs des deux sœurs. J’ai néanmoins apprécié cette lecture douce-amère. Les dessins sont jolis, bien qu’assez classiques et ils servent parfaitement l‘histoire.


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dimanche 11 avril 2021

Je choisirai la voie du vent

 Un roman de Régine Joséphine publié chez Marabooks.

Présentation de l'éditeur :

« Ce que je ferai dorénavant le sera pour la dernière fois. » Otzuka Akio, pilote kamikaze japonais, 1925 – 1945

Japon 1945 : Par un matin de printemps, un jeune pilote japonais Kiyoshi Anaka s’envole au-dessus de la mer vers le cuirassé américain qu’il doit faire exploser. Ce sera son dernier vol. Il ne laisse derrière lui qu’un carnet noir contenant une mèche de cheveux …

Lyon 2016 : Après avoir quitté la clinique de soins où elle a atterri suite à une dépression nerveuse, Colombe décide de quitter Lyon et d’accepter un poste de professeur dans l’école d’un village au beau milieu des montagnes. Ce n’est pas un hasard. Dans l’ancien moulin-bistrot du village, travaillait Louise, sa mère biologique, décédée dans d’étranges circonstances. Que s’est-il passé cette nuit fatidique où Louise a perdu la vie ? Que contient ce carnet noir qu’elle a légué à sa fille ?

Entre la rencontre d’un instituteur gothique désagréable, celles d’un bistrotier collectionneur de cuvettes de toilettes et d’un mystérieux artiste installateur de scènes miniatures, Colombe n’imagine pas à quel point sa décision va changer sa vie. 

Colombe, la vingtaine, traverse une grosse crise. Elle a raté son année de stage en tant que professeure des écoles pour une mystérieuse raison qui l’a envoyée en clinique pour quelques mois et se voit obligée, à cause des manipulations de sa mère, d’accepter un poste dans un village paumé. Cependant, c’est peut-être pour elle l’occasion d’en apprendre plus sur ses origines car Colombe a été adoptée et elle a vécu dans ce village les premières années de sa vie. Elle y déménage donc, avec dans ses valises le seul bien qui lui reste de sa mère biologique : un carnet écrit en japonais dont elle n’a pas la moindre idée du contenu.
Le récit oscille entre la vie de Colombe, ses difficultés à s’intégrer dans cette petite communauté déjà divisée ainsi que sa recherche d’informations concernant sa mère, et le journal intime d’un soldat japonais de la seconde guerre mondiale voué à devenir un kamikaze. Y a-t-il réellement un lien entre les deux ?
J’ai eu beaucoup de mal à finir ce roman qui pourtant se laisse lire sans demander trop d’attention. Le fait que j’ai trouvé Colombe détestable dès le début n’a pas aidé. Cependant, elle n’a rien à envier aux autres personnages, aussi caricaturaux et insupportables les uns que les autres. C’est la foire à la manipulation, à la puérilité et au jugement facile. J’ai essayé de les apprécier, car ils ont aussi de bons côtés, mais ça n’a pas fonctionné.
L’autrice n’a pas eu peur d’envoyer des clichés car tout y passe, dans le caractère de ses personnages comme dans la construction de son histoire… Ça m’a tapé sur les nerfs. Le récit est truffé d’erreurs et d’incohérences, des âges et des dates qui varient, des imbroglios et des facilités scénaristiques, des personnages qui changent d’avis en un claquement de doigts sans raison aucune, des coïncidences aussi discrètes dans le paysage que le serait la tour Eiffel déposée à côté du moulin dans la nuit… Bref, la cohérence boit à son aise sa chartreuse frelatée au bistrot du village et elle vous laisse vous débrouiller avec ça. Ici c’est le hasard qui fait tout et il est franchement prodigue. Mais quelle importance du moment que ça finit bien ? 
Je n’attendais pas quelque chose d’époustouflant ni de super original. J’espérais juste passer un moment agréable avec des personnages sympathiques. Mauvaise pioche...


lundi 5 avril 2021

Le jour où l'humanité a niqué la fantasy

 Un roman de Karim Berrouka, publié chez ActuSF.


Présentation de l'éditeur :

Au départ, il y a un lutin qui hurle « Vous avez niqué la fantasy ! » alors qu’il retient en otage plusieurs personnes dans une bibliothèque. Et puis il y a le coup d’un soir d’Olga qui se met à déconner et à foutre le feu à son appartement, avant d’aller brouter les pissenlits par la racine. Et il y a aussi les trois punks Jex,
Skrook et Pils qui doivent jouer au Festival du Gouffre tandis qu’il se passe de drôles de trucs dans la forêt d’à côté.

Karim Berrouka, auteur du Club des Punks contre l’apocalypse zombie (prix Julia Verlanger) revient avec Le jour où l’humanité a niqué la fantasy. Membre émérite de la World Grouilleux Academy of Fariboles et professeur de fantasy appliquée à Normal Sub, livre ici un récit autobiographique indispensable pour la compréhension de l’univers et le salut de l’humanité.

Tout commence quand un cinglé prend des gens en otage dans une bibliothèque parce que « l’humanité a niqué la fantasy ». Enfin non. Tout commence peut-être quand Olga ramène chez elle un type qui éjacule des flammes… Non, toujours pas. Alors tout commence peut-être au cours d’un festival punk dans un bled paumé dont les habitants sont bien trop accueillants. Quand une mamie vous fournit en speed, méfiez-vous quand même un peu.
Vous trouverez dans ce roman à la narration tressée des fées gélatineuses (et libidineuses), des lutins d’un mètre quatre-vingt, des licornes méprisantes, des ondines caractérielles, un gamin schizo (ou pas) avec son démon intérieur, deux filles qui n’avaient rien demandé mais ne s’en laissent pas conter, une apocalypse mal calibrée et des punks, bien sûr.
J’aime ces romans qui ne vous mâchent pas l’imagination ou les neurones avec une narration bien linéaire. Ici les pistes se croisent, forment des boucles en retour arrière et créent un motif qu’il est plaisant de voir se dessiner. La multiplicité des personnages freine peut-être un peu l’implication du lecteur dans certaines parties, s’il développe une préférence pour l’une ou l’autre. Cela n’a pas été mon cas. J’ai adoré Olga, Margo et les punks. Sans parler des auteurs...
Le jour où l’humanité a niqué la fantasy est un roman drôle, plein d’énergie, de chaos et d’absurdité, ainsi que d’êtres féeriques comme vous ne les avez jamais vus (et ne voulez surtout pas les voir), mais aussi d’intelligence et d’irrévérence. Il se joue des codes de la fantasy sans se prendre au sérieux pour autant.
J’ai apprécié ce récit déjanté et le jeu de références au point que je n’ai pas vu défiler les pages.