jeudi 28 avril 2016

Techno Faerie

Un fix up de Sara Doke, publié chez les moutons électriques.


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Présentation de l'éditeur :


Les fées existent, bien sûr, et elles sont de retour ! Les fées ont cessé de se cacher des hommes : elles sont revenu et bon an mal an l'univers de la Faerie s'est intégrées à la société technologique. Depuis les premiers contacts d'enfants-fae avec la civilisation de l'automobile jusqu'aux premiers voyages spatiaux, ce livre conte l'histoire d'une évolution différente de notre monde. L'auteur, Sara Doke, vit à Bruxelles et est traductrice. La poésie puissante de son inspiration, l'orginalité de sa vision d'un monde soudain enrichi des faes, sont saisissantes. Avec des documents, des fiches couleur sur les 88 principales faes et de nombreuses illustrations, par Bigot, Booth, Calvo, Cardinet, Caza, Ellyum, Fructus, Gestin, Jozelon, Larme, Lathrop, Malvesin, Mandy, Muylle, Nunck, Tag, Verbooren, Zandr et Zariel. Le retour des fées, dans un livre d'exception.



Techno Faerie est un très bel ouvrage à la croisée des genres. Si la Science-Fiction a la part belle dans ces pages, le travail de Sara Doke forme presque un essai. Le sujet est traité de manière atypique. L’auteur part du principe que les Faes, longtemps retranchées loin de notre monde, ont décidé d’y revenir. Leur technologie, qui a pris appui sur la nôtre, est toutefois plus développée. Mais que souhaitent-elles apporter à l’humanité ?
Le livre est divisé en deux parties. La première est consacrée aux nouvelles, qui forment un fix up. Elles illustrent l’évolution du retour féérique et son impact sur nos civilisations. En se basant sur les légendes et la mythologie traditionnelles, Sara Doke a créé une fiction spéculative complexe, intelligente, et surtout très crédible. Elle la développe avec brio au fil des textes. Chacun marque un jalon dans le retour des Faes et ses conséquences sur notre avenir. Le plus souvent, des individus sont au cœur de ces nouvelles, mais l’on perçoit en filigrane l’évolution des mœurs, au-dessus comme dessous la Colline, et les avancées scientifiques qui vont changer le monde.
Les textes s’imbriquent et s’articulent autour de personnages récurrents, dont le plus central se trouve être Arthur Passeur, un humain, mais aussi d’événements qui se répercutent. Les ellipses sous-tendent ces récits, les soutiennent de leurs silences. Le lecteur imagine, devine, extrapole. Il est invité à participer activement à cette construction. Cela est d’autant plus prégnant que ces textes prennent diverses formes et des styles variés. On lit tour à tour des dialogues, des nouvelles, des articles, des témoignages, des journaux intimes… Cette diversité est aussi plaisante que nécessaire afin d’appréhender toutes les facettes de cette fiction. Quelle que soit leur forme, les récits sont denses, très axés sur les ressentis des personnages, ce qui occasionne parfois des longueurs un peu emphatiques. Ces personnages ne manquent pas d’ego… Cependant, la réflexion, qu’elle soit en avant ou en arrière de la scène, est toujours intéressante.
Sara Doke nous invite à nous interroger sur l’altérité, le traditionalisme dans ce qu’il a de meilleur comme de plus pernicieux, sur l’identité, sur la génétique, le vivre ensemble et la créativité. Les sujets de réflexion sont nombreux. Elle a fait un travail formidable et il est dommage de ne pas l’avoir développé davantage.
Le seul vrai reproche que je pourrais faire à Techno Faerie, outre quelques contradictions (notamment sur l’incapacité de mentir des Faes), est que l’on y trouve beaucoup de coquilles. Cela est désolant pour un ouvrage par ailleurs de grande qualité.
La deuxième partie, toute de papier glacé, est constituée de fiches sur les être féeriques, accompagnées d'illustrations que l’on doit à divers artistes. Ces fiches permettent de prolonger la magie des textes et d’en savoir plus sur les créatures que l’on y a croisées. Certaines sont connues, même si quelquefois le nom qu’on leur donne est différent de celui usité dans nos légendes, d’autres sont des inventions de l’auteur mais s’intègrent parfaitement dans la masse. Le tout est homogène et compose un petit dictionnaire complet qui se suffit à lui-même. Les Faes y sont classées par groupes : végétales, liées au feu ou encore esprits domestiques, etc. Il est très intéressant de voir la façon dont elles s’impliquent dans l’univers créé par Sara Doke.
Techno Faerie est un ouvrage original et travaillé qui mérite une lecture attentive. Sara Doke a su intégrer la technologie à la Faerie, ce qui n’est pas une mince affaire. Par exemple, elle n’a pas mis de côté l’allergie au fer des Faes, elle s’en est servie. Elle a su allier Fantasy et Science-fiction, mythes et anticipation, pour envisager un futur possible, ne laissant pas de côté les détails, d’où le fait que je le compare à un essai. Je ne peux que vous encourager à le lire à votre tour et à rêver d’un futur non pas féérique, mais riche de possibilités.


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Avec cette lecture, je cartonne dans les challenges !


CRAAA


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sfff-diversite


Cette lecture compte pour le challenge SFFF et diversité dans la catégorie suivante :
– Lire une œuvre de SF ou Fantasy ou Fantastique (SFFF) francophone mais non française.

dimanche 24 avril 2016

Fées et Amazones

Un artbook d'Olivier Ledroit, publié chez Glénat.

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Présentation de l'éditeur :

Une ode au beau sexe, par le flamboyant dessinateur de Wika

Connu pour son talent à réaliser d incroyables planches épiques fourmillant de détails, Olivier Ledroit sait aussi se montrer délicat pour évoquer le corps et la sensualité. Il nous le montre ici de la plus belle des manières ! Pour le plaisir des yeux : fées, geishas, démones, et autres sorcières se succèdent, toutes plus somptueuses les unes que les autres, le tout avec ce soupçon de steampunk si cher au dessinateur de Wika.
Variant les techniques, en couleur ou en noir et blanc, sans jamais basculer dans la pornographie, cet auteur à nul autre pareil met à l honneur le beau sexe dans un splendide recueil d illustrations, sobrement intitulé Fées et Amazones.
Fées et Amazones est un artbook en grand format d’environ 180 pages. De fait, on y trouve peu de texte. Quelques paragraphes, apparemment signés de Thomas Day, si j’en crois les remerciements, sont disséminés de-ci de-là. Il y a juste de quoi expliquer le contexte en évoquant les idées qui ont nourri l’imaginaire de l’illustrateur. Le postulat est classique, mais a le mérite de réveiller l’imagination de chacun et de servir à merveille les dessins. Ils sont sublimes et c’est cela le plus important.
Olivier Ledroit nous entraîne une nouvelle fois dans un univers féerique, uchronique et steampunk. On y parcourt des capitales, au rythme de l’évolution du monde, qui est soumise à celle de l’æther, et des tocades qu’il prête à ses fées. De Londres à Tokyo, en passant par la Nouvelle-Orléans, on rencontre des fées aux grandes ailes, magnifiques et sexy. Tenues steampunk, souvent légères, seins nus ou corselets, guêpières et chapeaux hauts-de-forme sont au programme…
Les illustrations sont, comme toujours, très travaillées et l’ouvrage superbe. Qui aime le style d’Olivier Ledroit ne peut manquer ce très bel album.

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vendredi 22 avril 2016

Le retour d'Antoinette

Une BD d'Olivia Vieweg publiée chez EP média.


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Présentation de l'éditeur :


Un roman graphique sarcastique et surprenant sur le harcèlement à l’école. La révélation de la jeune artiste allemande Olivia Vieweg et de son style naturel et dépouillé.


Antoinette doit y retourner une fois encore.
Retourner dans son village natal.
Retourner dans l’ombre des forêts et des maisons à colombages.
Retourner sur les lieux de ses tourments et humiliations.
Une dernière fois…
Retourner en enfer.



Antoinette semble avoir bien réussi sa vie. Elle habite à Los Angeles, travaille pour une agence de publicité en vogue, a épousé un acteur populaire… Alors pourquoi ment-elle à tout le monde sur sa nationalité ? Et surtout pourquoi sa manie de regarder sur le net les images de son village natal vire-t-elle à l’obsession ?
Elle s’est juré de ne jamais retourner en Allemagne, cependant il est temps pour elle d’affronter son passé et d’exorciser de vieux fantômes.
Cette bande-dessinée traite d’un sujet délicat et d’actualité : le harcèlement scolaire. Des années après les faits, et malgré sa réussite sociale, les blessures d’Antoinette ne sont pas cicatrisées. Elle revient sur son parcours et les souvenirs se superposent au présent pour raviver le dérangeant contraste entre les deux. Les anciens bourreaux de la jeune femme semblent des gens tout à fait banals, ils ont à peine conscience de ce qu’ils lui ont fait. Depuis longtemps, les faits se sont atténués dans leur esprit et ils se sont trouvé des excuses. Comme si de rien n’était, ils l’accueillent à bras ouverts, comme une vieille amie. Après tout, n’est-elle pas devenue quelqu’un qu’on pavoise de connaître ? Leur attitude est glaçante et Antoinette semble pétrifiée par ce contraste…
Cela crée une atmosphère des plus bizarres. On ressent le malaise de la jeune femme, on voit combien elle a souffert. On voudrait qu’elle se rebelle… Mais plus les pages défilent, plus on se rend compte qu’elle est quand même un peu louche… Je ne savais plus trop où j’allais alors que je découvrais, stupéfaite, l’étendue des dégâts et leurs conséquences.
Il y a une large part de fantasme dans ce récit. Qui, ayant été malmené durant l’enfance par ses camarades, n’a pas rêvé d’une réussite éclatante qui leur clouerait le bec ? Qui n’a pas rêvé de se venger également… Et jusqu’où peut-on aller pour se sauver et oublier ? On peut interpréter les choses de manières très différentes et la façon de traiter le sujet n’y est pas étrangère. Je n’ai pu m’empêcher de songer à une légende allemande très connue et de voir un peu de fantastique dans cette histoire. Mais rien n’est certain et j’avoue que cela me plaît.
J’ai aussi été séduite par le graphisme. Au départ, c’est la couverture qui m’a attirée. Une belle illustration, très colorée, avec des coquelicots et cette vision, comme un reflet sépia, superposé devant les yeux du personnage… Par contre, j’ai été surprise quand j’ai zieuté les planches. La colorisation est très différente. Du noir, du blanc, du jaune et des myriades de tons ocrés. Cela rappelle parfois cet aspect sépia que j’aime bien, propre aux souvenirs, mais les couleurs sont vraiment très particulières, un peu nauséeuses en fait. Elles évoquent autant le passé que le mal-être.
Le retour d’Antonette se lit très vite. La BD fait environ 80 pages et il y a peu de texte. Ceci dit, j’ai passé un excellent moment avec cet album. Outre la façon dont l’auteur a travaillé son sujet, j’ai apprécié l’ambiance, bien qu’elle soit un peu glauque. L’ambiguïté des dernières planches a achevé de me convaincre. Cette BD est vraiment particulière, dans le fond comme la forme, cela la rend fascinante.

jeudi 21 avril 2016

[Tag] Test chronométré

J’ai piqué ce tag à Chani, qui l’a trouvé chez Pocket jeunesse.


J’ai mis 2 minutes 55, en écrivant les réponses à l’arrache…


Je vous copie les questions brutes pour que vous puissiez faire le tag sans être influencés par mes réponses.


Pouvez-vous citer... ?


1) Un livre avec des anges,


2) Un livre écrit par une auteure française,


3) Un livre avec du rouge sur sa couverture,


4) Un roman Pocket Jeunesse,


5) Un livre qui ne fait pas partie d'une série,


6) Un livre avec un chiffre/un nombre dans le titre,


7) Un livre où le héros/l'héroïne à moins de 15 ans,


8) Un livre avec au moins une main sur la couverture,


9) Un livre qui parle d'animaux/où des animaux sont au coeur de l'intrigue,


10) Le dernier livre que vous avez terminé et aimé,


11) Le livre que vous attendez le plus,


12) Un livre qui brille/dont la couverture a des reflets,


13) Une romance,


14) Un livre où le prénom du héros/de l'héroïne commence par un K,


15) Un livre qui se passe au bord de la mer.


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Et voici mes réponses…


C’est bizarre de voir quels titres viennent à l’esprit quand on doit se dépêcher.
Les commentaires ont quasiment tous été rajoutés après coup, évidemment.


1) Un livre avec des anges
The dirty streets of Heaven, Tad Williams
J'ai mis le titre V.O. parce que pour la suite en français on peut courir...


2) Un livre écrit par une auteure Française
Le Gardien de la source, Vanessa Terral


3) Un livre avec du rouge sur sa couverture
Masques de femmes, Élie Darco et Cyril Carau
On ferait difficilement plus rouge... J'adore cette couverture.


4) Un roman Pocket Jeunesse
Marina, Carlos Ruiz Zafon


5) Un livre qui ne fait pas partie d'une série
Apostasie, Vincent Tassy
Je suis en train de le lire…


6) Un livre avec un chiffre/un nombre dans le titre
À la une, à la deux, à la proie, Janet Evanovitch
Le hasard a fait que j’en parlais le matin-même…


7) Un livre où le héros/l'héroïne à moins de 15 ans
Harry Potter à l’école des sorciers, JK Rowling
Non Chani, je n’ai pas copié. Faut dire que c'était la réponse facile...


8) Un livre avec au moins une main sur la couverture
La chirologie pratique !
Véridique, j’ai ça quelque part dans la bibliothèque...


9) Un livre qui parle d'animaux/où des animaux sont au cœur de l'intrigue
Les Animaux fantastiques, JK Rowling
Association de pensées…


10) Le dernier livre que vous avez terminé et aimé
Laïka, Nick Abadzis.
Et j’ai pleuré, pleurééééé…
Hum, en fait j’ai lu et aimé au moins un autre livre après celui-ci, mais faut croire que je suis restée bloquée sur Laïka.


11) Le livre que vous attendez le plus
Euh…………. Et ça défile… Le troisième tome de Testament !
De Jeanne-A Debats, bien sûr.


12) Un livre qui brille/dont la couverture a des reflets
Strange angels de Lili St. Crow (non il n’y a pas de faute à son nom).
Qui traîne dans les strates de la bibliothèque et que je n’ai jamais lu, mais je me souviens qu’il est tout shiny…


13) Une romance
Nuit de Noël à Friday Harbor, Lisa Kleypas


14) Un livre où le prénom du héros/de l'héroïne commence par un K
Hunger games, Suzanne Collins
Facile…


15) Un livre qui se passe au bord de la mer.
Euh… Mais… B***** !
Que…
Argh !!!
Tic, tac, tic, tac...
Le Cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates !!! (Titre compte triple !!!)
Bah quoi, une grande partie se passe à côté de la mer...

mercredi 20 avril 2016

Wika et la fureur d'Obéron, Wika T1

Un album scénarisé par Thomas Day, illustré par Olivier Ledroit et publié chez Glénat.


Il existe une version de luxe de ce premier tome. Mais je ne peux vous en parler dans cette chronique, ne l'ayant jamais feuilletée.


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Présentation de l'éditeur :


Une réécriture des contes de fées dans un décor steampunk


Il était une fois un couple de fées, le duc Claymore Grimm et la duchesse Titania, et leur petite fille, Wika. Alors que le prince Obéron, ancien amant de Titania aux pouvoirs redoutables, prend d'assaut le château Grimm, la petite Wika est confiée, après avoir eu les ailes sectionnées pour dissimuler sa nature, à un couple de fermiers chez qui elle grandira à l abri de tous... Treize ans plus tard, Wika, émancipée, se rend dans la capitale contrôlée par Obéron. Elle y rencontre le jeune Bran, voleur talentueux qui, entre larcins et arnaques, lui dévoile les secrets de la cité. Mais petit à petit, les pouvoirs de Wika semblent se développer, révélant sa nature de fée, et éveillent l'intérêt du prince tyrannique, celui-là même qui voulut sa perte des années auparavant...
Référence dans le monde de l'illustration et de la bande dessinée de fantasy, Olivier Ledroit signe de son dessin baroque et fouillé une réécriture jouissive des contes classiques dans un univers steampunk féerique, sur le premier scénario de Thomas Day en bande dessinée !
Inclus : un cahier graphique réservé à la première édition.



Wika et la fureur d’Obéron est le fruit d’une collaboration entre Thomas Day, pour le scénario, et Olivier Ledroit pour les illustrations. La série est prévue en quatre volumes, mais seul le premier est sorti pour l’instant.
Férue de féerie, ainsi que de Steampunk, et alléchée par le potentiel du duo Day et Ledroit, je n’allais pas manquer Wika. La préface de Pierre Dubois nous met tout de suite dans l’ambiance. J’attendais un texte intelligent dans de magnifiques décors, cependant, j’étais sans doute un peu trop exigeante. C’est un premier tome, il lui faut le temps de mettre en place personnages et univers, ce qui malheureusement ne se fait pas avec autant de fluidité que je l’aurais souhaité.
L’intrigue de départ est plutôt simple : Obéron souhaite se venger de Titania, son ancienne compagne, qui a conçu un enfant avec un autre elfe. Il l’attaque et la tue ainsi que son époux, mais la petite Wika est sauvée in extremis, quoique privée de ses ailes.
Partez du principe qu’ici la mythologie est à tendance nordique, mais que fée semble être le féminin d’elfe… Les fées et elfes majeurs sont dotés d’ailes, les autres sont de diverses races sans que leur origine soit clairement définie. Obéron est fasciné par la technologie et détruit peu à peu la magie ainsi que les fées majeures. Le royaume glisse donc lentement vers le Steampunk, ce que j’espère voir développé dans les prochains tomes.
Comme toujours, les illustrations d’Olivier Ledroit sont d’une grande finesse et extrêmement travaillées. Chaque dessin foisonne de détails. Les couleurs sont très vives, ajoutant encore à cette impression de profusion qui peut égarer. Malgré tout, c’est un style assez froid, surtout dans la représentation des personnages. On aime ou pas, mais on ne peut nier la grande qualité du travail. Personnellement, j’ai préféré les décors aux personnages, mais l’ensemble m’a plu.
Je suis néanmoins quelque peu perplexe quant à l’apparence même de Wika. Quand elle arrive en Avalon, elle a treize ans et fait terriblement plus vieille. Fée ou pas, je trouve cela dérangeant. En outre, est précisé dans les notes de fin d‘ouvrage qu’Olivier Ledroit souhaitait créer une BD que sa fille – de treize ans à l’époque de la sortie de ce premier tome – pourrait lire. Sans me la jouer pudibonde, ayant moi-même probablement lu pire à cet âge, entre le langage, les multiples allusions salaces et l’hyper-sexualisation des personnages féminins, ce n’est quand même pas un album qu’il me viendrait à l’idée d’offrir à de jeunes ados. À vous de voir…
Cette bande-dessinée me rappelle un peu Elfquest, que je lisais plus jeune. Le scénario me semble un peu trop cousu de fil blanc pour l’instant, mais je suis certaine que cela va s’arranger par la suite. Les personnages secondaires, qu’il s’agisse des fées noires autant que des loups d’Obéron, sont très prometteurs et vont, à mon sens, accentuer le mélange des genres qui fait la richesse de cette BD.
Il ne reste plus qu’à attendre cette fameuse suite…


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Cette lecture compte pour le challenge SFFF et diversité dans la catégorie suivante :
– Lire un roman graphique ou une BD ou un comic avec une femme pour héroïne.

lundi 18 avril 2016

Kiki la petite sorcière

Comme j'ai décidé d'ajouter les Ghibli sur Vampires et Sorcières, ne vous étonnez pas d'en entendre parler ici aussi par ricochet... ;)


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Kiki la petite sorcière est un film d’animation sorti en 1989. Je ne sais pas vous, mais je n’avais pas l’impression qu’il était si vieux… Il semble nettement plus moderne, même dans l’animation, que Si tu tends l’oreille, sorti un an plus tard. Produit par le Studio Ghibli et réalisé par Hayao Miyazaki, cet anime est adapté d’un roman pour la jeunesse paru en 1985 et écrit par Eiko Kadono.
Kiki a treize ans. C’est une jeune sorcière débonnaire, pleine d’optimisme et de bonne volonté. Pour parfaire son apprentissage, elle doit quitter son foyer et se débrouiller toute seule pendant un an. Malgré l’inquiétude de sa mère, elle part donc avec son adorable chat noir, Jiji, pour s’installer dans une ville où ne se trouve aucune autre de ses congénères. Elle devra travailler pour subsister et trouver sa spécialité en tant que sorcière. Les débuts ne sont pas simples, mais Kiki a tout de même de la chance. De rencontres en mésaventures, elle se fait petit à petit une place dans son environnement et développe une activité singulière : la livraison en balai volant.
J’adore les sorcières ainsi que les récits d’apprentissage et ai donc une tendresse toute particulière pour ce dessin-animé. Comme la plupart des Ghibli, il est plein d‘espoir, même si tout n’est pas idyllique. Sous les dehors sympathiques du réalisme magique et une colorisation qui rend l’atmosphère très lumineuse, les thèmes abordés sont sérieux. On y parle de l’identité et de l’intégration, de la difficulté de grandir et de poser les points d’ancrage de son existence dans un environnement où tout est à faire. C’est en quelque sorte un conte moderne qui se joue des clichés, tout en s’inscrivant dans la tradition.
Les personnages de cet anime sont lumineux et plein de vie, sans doute parfois un peu trop gentils pour être vrais, mais on y croit quand même. Kiki est très attachante. Malgré son opiniâtreté, elle est encore une petite fille, pleine de doutes et fragile. Cela apporte une certaine dose de réalisme.
Personnellement, quand j’ai besoin de réconfort et de me rappeler pourquoi j’ai fait certains choix, je regarde cet anime…
Comme souvent pour les films de Miyazaki, la fin est abrupte. Elle saisit un moment d’envol (c’est le cas de le dire) et de grâce. C’est une façon comme une autre de montrer qu’il n’y a pas de fin. Toutefois, les images du générique nous renseignent brièvement sur des événements ultérieurs, laissant le spectateur imaginer à sa guise le développement de l’histoire.
Si vous ne l’avez pas encore visionné, n’attendez plus ! C’est un film à voir et à revoir.

samedi 16 avril 2016

Laïka

Une bande-dessinée de Nick Abadzis, publiée chez Dargaud.

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Présentation de l'éditeur : 

La véritable et poignante histoire du premier être vivant envoyé dans l'espace : la chienne Laïka. Une saga scientifique et historique qui révèle plusieurs histoires : celle de l'ingénieur en chef du programme soviétique, la course à l'Espace entre les USA et l'URSS, et celle de Laïka, bien sûr, chien errant qui n'échappa à l'euthanasie que pour devenir un cobaye sacrifié sur l'autel de la réussite humaine et, au final, un symbole de progrès. Une histoire racontée avec une immense finesse et la plus grande précision historique.

Cette bande-dessinée est basée sur des événements réels. Peut-être avez-vous déjà entendu parler de Laïka, en tout cas je l’espère. Cette petite chienne fut le premier être vivant envoyé dans l’espace. Dans les années cinquante, L’U.R.S.S. et les U.S.A. jouaient à qui pisserait le plus loin. La conquête spatiale faisait rêver, c’était une façon comme une autre d’entretenir leur rivalité. Tout moyen était bon à prendre pour prouver sa supériorité. C’est dans ce contexte délicieux qu’en 1957, un mois après le lancement du satellite artificiel Spoutnik, les soviétiques ont envoyé Laïka, une petite chienne de trois ans, à bord de Spoutnik II, sans se soucier de n’avoir aucun moyen de la ramener en vie. Elle avait été trouvée errante dans les rues de Moscou. Rien ne la prédisposait à ce destin aussi grandiose que tragique et vide de sens. Cette bande-dessinée raconte son histoire, lui inventant un début de vie loin d’être rose, mais tâche de lui donner le plus de réalisme possible et de s’appuyer sur des faits pour la suite. On montre même l’entraînement subi par les chiens du programme spatial. Ces pauvres bêtes ont beaucoup supporté… Laïka n’est pas la seule à avoir péri. J’en profite d’ailleurs pour rappeler que trois années sont juste un cinquième de la vie d’un chien, sachant que les petits gabarits, surtout les bâtards, ont même une espérance de vie supérieure à quinze ans. Certes, envoyer à la mort un chien plus âgé n’aurait pas rendu cela moins atroce, mais c’est d’autant plus sordide que cette chienne était à l’orée de sa vie. Aucun animal ne mérite ça et la BD le retranscrit parfaitement, malgré le sentimentalisme romancé des premières pages, quand l’auteur imagine à Laïka un début de vie à propos duquel on ne possède aucun renseignement réel. Je ne suis pas particulièrement fan du graphisme, mais l’important est de faire davantage connaître le destin de cette petite chienne, victime de la bêtise humaine déguisée en course vers le progrès. En cela, la BD est très réussie. On a envie de d’empêcher l’inéluctable, mais si ce n’est pas la petite Koudriavka, ce sera une autre chienne… On ressent l’horrible attente qui pèse sur l’animal et certains de ses soigneurs, le climat lourd de méfiance et de menaces d’une époque où la moindre opposition pouvait vous valoir le goulag... C’est très triste, évidemment, mais c’est aussi un bel hommage. Parce que je savais à quoi m’attendre, j’ai beaucoup pleuré en lisant… La moindre des choses que nous pouvons faire pour Koudriavka – Laïka – est de ne jamais l’oublier. Un chien offre une confiance sans réserve à ceux qui le soignent… Ce sont des animaux naturellement bienveillants et prêts à supporter sans broncher les situations les plus extrêmes pour plaire à leur maître. C’est d’autant plus vrai pour ceux qui ont été recueillis et sont de fait très reconnaissants envers leurs sauveurs. Imaginez la détresse de ce pauvre animal, enfermé dans cet engin, seul, dans le bruit, la chaleur, le chaos… Elle a agonisé entre cinq et sept heures, espérant probablement jusqu'à sa dernière seconde de conscience qu'on vienne la chercher. Longtemps, on a raconté que Laïka était morte après avoir consommé de la nourriture empoisonnée, laissée à sa disposition comme un acte d’humanité… C’est faux, la chaleur l’a tuée. Et ce sacrifice n’aura quasiment rien apporté à la science, il a juste nourri l’ego d’un gouvernement. Ce n’est pas à l’école ni en regardant un reportage ou en lisant une revue que j’ai appris l’histoire de Laïka. J’étais adolescente, j’écoutais la radio, et j’ai entendu la chanson de Mecano qui lui est dédiée… Je ne vous cache pas que je trouve aberrant d’avoir dû l’apprendre par ce biais. Des années plus tard, le destin tragique de Laïka me bouleverse toujours autant. C’est pour cela que j’ai voulu lire et chroniquer cette bande-dessinée (même si j’admets n’avoir pas beaucoup parlé du livre lui-même). C’est ma contribution, si humble soit-elle, à faire connaître son histoire et à faire en sorte qu’on ne l’oublie jamais. Il est si facile d’effacer ce qui nous dérange…

Laika

vendredi 15 avril 2016

M. Pénombre, libraire ouvert jour et nuit

Un roman de Robin Sloan paru en grand format chez Michel Lafon et disponible en poche chez Points.

*m. penombre, libraire ouvert jour et nuit - robin sloan 

Il n'y a pas à dire, la couverture du grand format est beaucoup plus belle que celle du poche... 

Présentation de l'éditeur :

(J'ai choisi le résumé de l'édition poche car il en dit beaucoup moins.)

Graphiste-designer au chômage, Clay erre dans San Francisco. Le hasard le mène à l'étrange librairie ouverte jour et nuit de M Pénombre. Tard le soir, les membres d'un club de lecture viennent y emprunter de vieux volumes cryptés. Appartiennent-ils à une secte, sont-ils des lecteurs d'un genre nouveau ? Embauché en tant que vendeur, Clay est bien décidé à percer le mystère de ces érudits légèrement allumés...

Clay Jannon est un jeune homme sympathique, mais tout ce qu’il y a de plus banal. Il est intelligent, a fait des études, mais ne possède pas vraiment de compétence qui le fasse sortir du lot. Il peine à trouver sa place sur le marché du travail et sent confusément qu’il pourrait louper cette délicate période charnière de son existence. Puis, il découvre par hasard l’étrange librairie de M. Pénombre où il se fait engager comme vendeur. Cette boutique sort juste assez de l’ordinaire pour faire rêver tout grand lecteur et Clay, s’il n’est pas bibliophage, est sans nul doute un rêveur dont les jeunes années ont été bercées par les littératures de l’imaginaire. Il a besoin d‘apprendre de nouvelles choses et d’évoluer, mais le travail à la librairie ne semble pas avoir grand-chose à lui offrir de ce côté-là. Enfin, c’est ce qu’il croit. J’ai éprouvé un réel plaisir à suivre ce personnage, même si l’histoire s’est révélée très différente de ce que j’attendais. La librairie de M. Pénombre m’a fait rêver. J’aurais adoré pouvoir résoudre les énigmes avec ces lecteurs tous plus décalés les uns que les autres. Mais moi je n’aurais pas triché… Le roman est divisé en trois parties et le mystère reste très longtemps en périphérie du récit. Cela ne m’a pas ennuyée. J’ai bien aimé suivre le quotidien tranquille de Clay. Il fréquente des gens brillants et plus ou moins hauts en couleur. Sloan a créé une atmosphère à la fois sereine et baroque, dans laquelle je me suis volontiers laissé dériver. Puis, petit à petit, les bizarreries de la librairie reprennent le dessus. Qui finance ce magasin si peu fréquenté ? Et surtout que viennent chercher les lecteurs plus ou moins loufoques qui empruntent les livres du « fonds du fond » que Clay a interdiction d’ouvrir ? Sans s’en rendre compte, le lecteur se trouve embringué dans une quête. À mon grand dam, ce n’est pas un vrai jeu de piste, parce que Clay triche. Le lecteur ne peut que suivre et, s’il tire des conclusions de ses propres observations, il n’a pas la chance de pouvoir participer plus activement à la résolution du mystère. Cela s’arrange néanmoins dans la dernière partie. L’auteur a le goût du détail, ce que le lecteur attentif ne peut qu’apprécier. Les noms, notamment, ont de l’importance. L’intrigue n’est pas exceptionnelle, mais elle est prenante la plupart du temps. Les personnages, indubitablement le point fort du roman, semblent former une constellation et sont tous intéressants. Aux deux tiers du récit, il y a bien quelques longueurs… Et puis la technophilie de Clay devient lourde. Apple, Kindle, Google… En plus de rimer, cela fait placement de produits. Mais ce sont les seuls défauts que j’ai pu trouver à ce très bon roman. La fin m’a beaucoup plu, me faisant passer outre mes griefs. M. Pénombre, libraire ouvert jour et nuit est un roman pour les chercheurs et les faiseurs, pour les lecteurs qui ont le goût du détail autant qu’une imagination débordante.

mercredi 13 avril 2016

L'Origine des Victoires

Un roman d'Ugo Bellagamba, publié chez ActuSF dans la collection Hélios.

Cette version a été retravaillée et augmentée.

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Présentation de l'éditeur :

"Je suis une Victoire, ma chérie... Si tu préfères, un soldat, engagé dans une lutte dont l'origine se perd dans la nuit des temps."

L'Orvet a fait de l'humanité son terrain de chasse, causant famines, guerres et destructions. De la Rome antique jusqu'aux étoiles les plus lointaines, ce roman retrace le combat et les sacrifices des Victoires, ces femmes qui luttent dans l'ombre pour nous protéger.
Lettrées, guerrières ou amantes, voici huit portraits de ces vigies qui jalonnent l’histoire et redessinent en creux notre futur.

Ugo Bellagamba est l'une des plus belles plumes de l'Imaginaire. Il l'a prouvé au fil de la demi-douzaine de livres qu'il a publiés, qui lui ont valu la reconnaissance de nombreux prix, dont le Grand Prix de l'imaginaire ou encore le prix Utopiales pour Tancrède, une uchronie. L'Origine des Victoires est peut-être son roman le plus personnel, tout en finesse et en subtilité, ancré dans les paysages du sud de la France.
Jeunes ou vieilles, guerrières et intellectuelles, les Victoires sont des femmes libres et puissantes qui ne craignent ni le combat ni le sacrifice. Depuis l'éveil de la conscience humaine, elles arpentent le monde, tâchant d'arracher leurs contemporains à l'attraction maléfique de l'Orvet, mi-prédateur mi-parasite. Cette créature extraterrestre se délecte du mal, du chaos et de la souffrance. L’Orvet manipule l’humanité, l’aidant même à développer ses connaissances quand cela l’arrange, pour mieux la dévorer.
L’Origine des Victoires est un fix up constitué de récits éclatés dont la succession ne tient pas compte de la chronologie, même si l’on fait en quelque sorte la rencontre de la première et de la dernière des Victoires. Chaque chapitre est dévolu à l’une de ces héroïnes froides et déterminées. Ces portraits de femmes sont fulgurants, figeant la Victoire à l’apogée de son allégorie. Ce sont les multiples facettes de la femme en général, mises en exergue par ce combat particulier contre le chaos. Cette lutte, pourtant à peine entraperçue entre les lignes des destinées de nos huit Victoires – et de leurs sœurs tout juste évoquées – est aussi fascinante que complexe, détaillée juste ce qu’il faut pour laisser l’imagination du lecteur travailler. La nature de l’humanité en général, mais plus particulièrement celle des femmes, est dépeinte avec brio dans ces pages.
L’intrigue laisse une large part aux ellipses. Si vous préférez les histoires développées à l’extrême, cela ne vous séduira probablement pas. Toutefois, il serait malvenu de considérer ces nouvelles – quelquefois sans début, souvent sans fin – comme des ébauches superficielles. Incisives, elles tranchent dans le vif d’un combat millénaire pour en extraire les moments clés et capturer l’essence des Victoires. Cette narration parcellaire m’a beaucoup plu et, d’un point de vue philosophique, cette lecture fut très intéressante. J’ai rechigné à abandonner certaines de ces femmes car leurs récits m’ont fascinée. Cependant, l’auteur joue de cette frustration.
Je n’ai pas toujours compris ou cautionné les actes de ces femmes. Je pense notamment à Claudia dans le premier texte. Enfin si, je ne comprends que trop son but, sans parvenir néanmoins à trouver son choix judicieux. Si elle n’avait pas tant attendu, elle n’aurait peut-être pas eu à le faire.
Il faut dire que cette première histoire m’a perturbée. Elle commence par un souvenir, la tiédeur d’un après-midi complice entre une mère et sa fille… Mais si l’une croit que l’on peut échapper à son destin, ce n’est pas le cas de l’autre. Selon moi, les femmes ont ancrées en elles, comme l’une des autres nouvelles le fait d’ailleurs remarquer, cette certitude que fuir parfois, ruser souvent, n’est pas de la lâcheté. Il faut quelquefois se ménager pour durer et perdre des batailles pour gagner une guerre, comme il faut savoir, aussi, quand il est nécessaire de se sacrifier.
Cette lecture m’a offert de nombreuses pistes de réflexion. La seule chose qui m’a retenue au début fut que je n’adhérais pas à l’idée-même de l’Orvet, non pas en tant que créature, mais comme principe du mal. On envisage assez vite qu’il ne fait qu’exacerber les mauvais penchants des êtres qu’il possède et on voit au fur et à mesure qu’il manipule l’humanité depuis très longtemps pour qu’elle soit à son goût, mais ses victimes n’en sont pas moins des marionnettes. Dans les premiers textes, cela les dédouane presque de leurs actes, comme si le mal était vraiment extérieur à l’humanité. Je trouvais cela trop manichéen, cependant ma perception a évolué à la lumière des récits. L’idée de base est plus profonde et l’auteur la ménage. L’ambivalence de la nature de l’Orvet, tout comme celle des Victoires, apparaît petit à petit. Ainsi, j’ai fini par trouver cette vision des choses très cohérente et vraisemblable.
L’auteur développe une vraie réflexion sur le mal et l'âme humaine au fil de textes parfaitement ciselés. Le style très travaillé s’accorde à merveille à l’intelligence du propos. Les silences font autant partie du récit que les références littéraires ou historiques.
La version poche parue au sein de la collection Hélios est une réédition retravaillée et augmentée. Le chapitre de Coppélia qui y a été ajouté est un plus non négligeable.
L’Origine des Victoires est un ouvrage atypique qui contourne habilement les évidences et m’a désarçonnée parfois. Ce n’est peut-être pas une lecture pour tout le monde. Elle demande de l’implication, une certaine disponibilité d’esprit et de la patience pour l’apprécier à sa juste valeur. Je l’ai, pour ma part, beaucoup appréciée.
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CRAAA

sfff-diversite

Cette lecture compte pour le challenge SFFF et diversité dans la catégorie suivante :
– Lire un livre de SFFF féministe. Ouvertement féministe ou gommant les genres.

lundi 11 avril 2016

Bienvenue à Valnuit

Valnuit

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Bonsoir chers auditeurs.


Pour commencer, on m’a demandé de lire cette brève déclaration :


Le conseil municipal annonce l’ouverture d’un parc à chiens aux coins des rues Lecomte et Couchant, près de Chez Raphael. Il souhaite rappeler à tous que les chiens ne sont pas autorisés à entrer dans le parc à chiens.
Les gens ne sont pas autorisés à entrer dans le parc à chiens.


Il est possible que vous aperceviez des Figures Encapuchonnées dans le parc à chiens.
Ne les approchez pas.
N’approchez pas du parc à chiens.
La clôture est électrifiée et extrêmement dangereuse.
Essayez de ne pas regarder en direction du parc à chiens et, tout particulièrement, ne regardez pas, sous aucun prétexte, en direction des figures encapuchonnées.
Le parc à chiens ne vous fera aucun mal.



Bienvenue à Valnuit est l’adaptation française, produite par un groupe de bénévoles, d’un podcast américain créé par Joseph Fink et Jeffery Cranor. Vous pouvez l'écouter ou le télécharger ici.
C’est en voyant la sortie du roman dérivé, Bienvenue à Night Vale, chez Bragelonne que je m’y suis intéressée. Je suis tombée un peu par hasard sur la version française, c’est pourquoi je l’ai écoutée en premier. Elle est de qualité. Je n’attendais rien de spécial, mais ça m’a beaucoup plu.


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Ces podcasts sont sous forme d’émissions radiophoniques, toutes animées par Cecil – Émile en français – sur la radio communautaire d’une petite ville perdue dans le désert.
Le quotidien à Valnuit est tout sauf ordinaire. Cecil/Émile enchaîne les récits, avec nonchalance ou véhémence, cependant même les sujets les plus anodins glissent vers l’absurde, le comique, parfois l’effroi. Rien n’est linéaire ou couru d’avance à Valnuit.
On passe par beaucoup de stades en écoutant ces émissions. J’en apprécie l’humour grinçant et les multiples références littéraires ou audiovisuelles, comme celles à Lovecraft ou Twin Peaks.
À Valnuit, toutes les théories du complot sont réelles. La mairie entretient une police municipale perpétuellement à l’affût, la dirigeante du journal local (auquel l’abonnement est obligatoire) a récemment décidé qu’une édition imaginaire pourrait faire l’affaire et la chambre de commerce vient de construire une superbe marina avec les fonds publics… dans le désert, je le rappelle.
Franchement, qui n’a pas envie de séjourner à Valnuit ?
Que vous choisissiez la VO ou la VF, c’est un podcast à écouter absolument.


Ceci est un message de notre sponsor :
Gloire au nuage luminescent !


Merci de votre attention.

dimanche 10 avril 2016

Avril et le monde truqué

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Avril et le monde truqué est un film d’animation, fruit d’une coproduction française, belge et canadienne. Il a été réalisé par Franck Ekinci et Christian Desmares. On doit le scénario à Franck Ekinci, Benjamin Legrand et Jacques Tardi. L’univers graphique a été imaginé par ce dernier.
En bonne trentenaire, j’ai beaucoup apprécié cette animation à l’ancienne. Les décors sont très travaillés et la colorisation superbe. Les personnages, quant à eux, sont évidemment très proches de la bande-dessinée. J’ai lu beaucoup de critiques à ce sujet et cela m’exaspère. À ceux qui trouvent La Reine des neiges plus réaliste, allez vous pendre, on en discutera après.
Bref…
Cet anime met en scène un monde ucrhonique et steampunk, partant du postulat que Napoléon III est mort à la veille de la guerre contre les prussiens, changeant ainsi l’avenir de la France. Mais ce n’est pas tout… Les plus grands savants de l’époque sont mystérieusement enlevés un à un au fil des ans. Le progrès freine, puis stagne. Le charbon est encore l’énergie principale. Il occasionne pollution et guerres. Les quelques scientifiques qui n’ont pas été enlevés sont réquisitionnés par l’État pour créer de nouvelles armes. La famille d’Avril, qui n’est pas étrangère à l’événement déclencheur de cette uchronie, se cache donc pour continuer ses expérimentations et échapper à la fois à l’État et aux kidnappeurs, mais reste au centre de toutes les attentions.
Avril et le monde truqué est vraiment un joli film d’animation. La rêveuse que je suis a adoré les engins steampunk que les personnages empruntent au fil de leurs courses poursuites. Visuellement, c’est très réussi et on se laisse emporter, malgré le scénario très prévisible. On court beaucoup dans cette histoire… Cependant, certains personnages sont très attachants. J’ai particulièrement aimé Darwin, le chat qui parle, et Pops le grand-père d’Avril, brillant et débonnaire. Il est d’autant plus sympathique que Jean Rochefort lui prête sa voix. Et puis il y a Rodrigue et Chimène, qui m’ont quand même bien fait rire…
J’ai passé un bon moment avec cet anime, mais malgré tout quelque chose me gêne un peu. Il défend des valeurs scientifiques qui ne me conviennent pas. Vous me direz, ce n’est qu’un dessin-animé… Justement, ils sont faits pour les enfants. Quelle image de la science souhaitons-nous leur transmettre ? J’aurais préféré plus de nuance dans le propos. Mais bon, chacun est libre de se faire sa propre opinion…
Cet anime reste à voir pour tous les amateurs de Steampunk, mais n’attendez pas trop de l’histoire.

jeudi 7 avril 2016

Alouettes, Testaments T2

Un roman de Jeanne-A Debats, publié chez ActuSF.

Vous pouvez également consulter mon avis sur le premier tome : L'Héritière.

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Présentation de l'éditeur :

Je m’appelle Agnès, et je suis orpheline. Ah ! Et sorcière, aussi. Mon oncle m’a engagée dans son étude notariale. Ne croyez pas que le job soit ennuyeux, en fait, ce serait plutôt le contraire. En ce moment, tout l’AlterMonde est en émoi à cause d’une épidémie de Roméo et Juliette. Imaginez : des zombies tombant amoureux de licornes, des vampires roucoulant avec des kitsune, des sirènes jurant un amour éternel à des garous. Et tout ce beau monde défile dans notre étude pour se passer la bague au doigt. Mais la situation commence à sérieusement agacer les hautes autorités.

Et comme l’AlterMonde n’est pas Vérone, à nous de faire en sorte que cette fois l’histoire ne se termine pas dans un bain de sang...
Je me suis précipitée sur ce roman avec enthousiasme, prenant plaisir à retrouver Agnès, telle une vieille connaissance qu'on croise de loin en loin. Mais j’étais surtout alléchée par le résumé de l’éditeur que je trouvais très prometteur. Mes attentes étaient grandes et ne furent pas déçues. Jeanne-A Debats nous a concocté une intrigue audacieuse et loufoque, tissée avec autant de soin que d’intelligence. Elle a de la suite dans les idées, c’est le moins qu’on puisse dire ! On ne s’ennuie jamais avec elle. J’adore son humour, qui peut se révéler aussi rentre-dedans que subtil et spirituel. Cela faisait longtemps que je n’avais pas autant ri en lisant… Toutefois, il ne faut pas s’y tromper, l’humour reste au service de l’histoire qui est, quant à elle, excellente.
J’aime le théâtre shakespearien, ceci dit Roméo et Juliette n’est pas ma pièce préférée, loin de là. Grâce à Alouettes, je la verrai autrement désormais. L’auteur a su se servir de ce terreau fertile, que ce soit dans les grandes lignes ou le détail, pour créer un récit jubilatoire. Les références littéraires – de tout bord – abondent, à ma grande joie, relevant la saveur de l’intrigue. Je m’en suis délectée.
De surcroît, je ne le dirai jamais assez, j’apprécie l’originalité du contexte et des personnages mis en scène. L'auteur a choisi de nous décrire le quotidien d'une étude notariale au service des surnaturels. C’est une bouffée d’air frais dans le paysage actuel de l’urban fantasy ; ça change des détectives et autres flics chasseurs de démons. Agnès et ses collègues font partie intégrante de cet AlterMonde mais ne sont pas des justiciers, même s’ils ont le devoir de faire respecter un certain équilibre. Dans ce tome, leur tâche va être singulièrement compliquée. Autant dire que la pauvre Agnès, qui est la paléographe de l’étude, ne va pas passer son temps derrière un bureau à compulser de vieux papiers…
Trois années se sont écoulées depuis les événements de L'Héritière. Agnès a un peu changé, elle a mûri. Je me suis sentie plus proche d’elle. C’est une jeune femme pleine de contradictions, elle reste agaçante parfois, mais je l’aime beaucoup. Avec ses qualités et ses failles, elle est un personnage crédible et très contemporain. Elle tient à son indépendance chèrement gagnée et, si elle manque parfois d’à-propos, elle est loin d’être stupide. J’ai particulièrement apprécié les réflexions que lui prête sa créatrice quant à la condition féminine.
En filigrane, on en apprend un peu plus concernant les origines de la jeune sorcière ainsi que le passé de Géraud. Cependant cela reste anecdotique et je suis impatiente d’en savoir davantage.
Les personnages de cette série font indubitablement une grande partie de son charme et de sa richesse. On retrouve évidemment Navarre et c’est intéressant de le voir par le filtre du regard d’Agnès. Celle-ci, malgré le faible qu’elle a pour lui, reste assez lucide à son égard. Les personnages secondaires ne font pas juste de la figuration. Ils ont une histoire, une personnalité qui apporte de la couleur au récit. J’adore Zalia, qu’on voit un peu moins, mais qui est toujours aussi déjantée. Et… Non, je ne dirai rien à propos de mon préféré. Vous verrez.
Alouettes est encore meilleur que L’Héritière. Ce roman drôle, irrévérencieux et sortant des sentiers battus a été un ravissement d’un bout à l'autre. J’ai balayé d’un geste désinvolte les quelques petites invraisemblances qui m’ont fait tiquer sur la fin, parce qu’elles ne pesaient rien face à un tel plaisir de lecture. Et maintenant, j’ai le blues de la dernière page… Vivement la suite !

mardi 5 avril 2016

Inner City

Un roman de Jean-Marc Ligny.

La version publiée chez ActuSF dans la collection Hélios a été remaniée.
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Présentation de l'éditeur :

En quelques années, Paris est devenue une ville fantôme. Ses derniers habitants sont plongés en permanence dans les réalités virtuelles, bien protégés par une enceinte qui garde à l'extérieur, en banlieue, les pauvres et les miséreux. Mais leur vie dorée est menacée par un tueur agissant dans la Haute Réalité tandis que de l'autre côté du périf, la révolte gronde. Dans ce climat explosif, Hang traque les scoops les plus sanglants pour mieux les injecter (et les vendre) dans ces mondes virtuels pendant que Kriss enquête pour neutraliser ce serial killer...
ActuSF poursuit les rééditions des ouvrages de Jean-Marc Ligny avec Inner City, roman Cyberpunk originellement paru en 1996. Cette version a été retravaillée pour prendre en compte les progrès technologiques de ces vingt dernières années.
L’action d’Inner City se déroule dans un futur difficile à situer, mais qui ne doit pas se trouver bien loin de notre propre époque. Paris est coupée de la banlieue, devenue une zone de combat quasi permanent où règne la loi du plus fort, par une barrière qui grille sur place toute personne qui voudrait la traverser sans autorisation. La province, quant à elle, est désertée. Les dictatures fleurissent de par le monde dans l’indifférence générale. Il y a deux types de personnes dans Inner City : ceux qui sont connectés à MAYA et ceux qui ne le sont pas. Entre eux, le fossé se creuse.
MAYA est un vaste réseau virtuel par lequel tout passe, des appels téléphoniques à la livraison des courses, sans parler des jeux et de la vie, de plus en plus virtuelle, de la majorité des connectés. Les inners se perdent dans ce dédale, qu’ils nomment Haute-Réalité, et y laissent parfois leur raison. Kris est psychoriste, elle récupère et tente d’aider les inners en perdition. Cependant, au cours de ses incursions en réalité profonde, elle va être confrontée à un mystérieux tueur dont l’existence même est sujette à conjectures.
Dans ce roman on suit plusieurs personnages. Il incombe au lecteur de placer à mesure les pièces du puzzle. Qui est le tueur ? Comment la société « connectée » en est-elle arrivée-là ? A-t-elle conscience qu’elle ne tient qu’à un fil ? Je me suis plus intéressée à Alice, la grand-mère de Kris qui vit en Bretagne, et à son amie déjantée Betsy, ainsi qu’à Zora et sa bande d’outers en banlieue, qu’au devenir de Kris et Hang qui sont pourtant les personnages principaux.
Je vais être franche, les réalités virtuelles, intelligences artificielles et, de manière générale, les ouvrages qui traitent de l'immersion dans ces « réalités » ne sont pas du tout ma tasse de thé. De fait, j’ai eu du mal à entrer dans cette histoire. Je n’ai rien contre le Cyberpunk qui, à mon sens, est un genre amenant à la réflexion. Ici, il est question d’immersion dans les réseaux virtuels et de la capacité du cerveau à faire ou non la part entre ce qui est vrai ou pas, la vieille polémique sur la dangerosité des jeux vidéo, mais aussi de l’abrutissement des masses. Les inners deviennent totalement inaptes à la vie en-dehors de MAYA, ils en feraient presque pitié. Ils sont assistés en permanence, dépendant du réseau et des robots qui font tant bien que mal fonctionner leur société déliquescente. À côté de ça, les non connectés ont leur lot de problèmes. Tout dépend de MAYA, même l’électricité. Il n’y a plus de transports, sauf de marchandises… Il est devenu très difficile de survivre en basse-réalité. De ce point de vue, Inner City est intéressant, mais il ne s’agit que du contexte. L’intrigue principale un peu fouillis et le background pas suffisamment développé à mon goût m’ont fait traîner les pieds. J’ai fini par accrocher à cette intrigue au cours des derniers chapitres, quand les événements s’enchaînent de façon plus intense, mais c’était un peu tard.
La fin est ouverte, je commence à avoir l’habitude avec cet auteur et cela ne me gêne pas. Bien au contraire, j’ai cette fois apprécié de pouvoir me faire ma propre idée sur le devenir de certains personnages. Toutefois, il reste des zones d’ombre, des choses que je ne m’explique pas, comme le rôle de Max dans tout ça. Quelles étaient ses motivations et l’origine de son implication ?
J’ai beaucoup aimé la nouvelle bonus qu’on trouve en fin d’ouvrage car elle met en scène des personnages que j’apprécie et qui sont complètement décalés. Elle apporte un peu de légèreté après cette ambiance plutôt sombre et désenchantée.
Inner City m’a laissé une impression mitigée. Je n’étais sans doute pas dans le bon état d’esprit au moment de sa lecture. N’hésitez pas à me faire part de votre opinion, je serais assez curieuse de discuter de ce roman avec d’autres lecteurs.

dimanche 3 avril 2016

Le Secret de la manufacture de chaussettes inusables

Un roman d'Annie Barrows publié chez Nil (bientôt disponible en poche).


Texte intégral lu par Claire Tefnin pour Audiolib.


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le secret de la manufacture de chaussettes inusables - annie barrows

 

Présentation de l'éditeur :


(J'ai pris le résumé de la version grand format, celui d'audiolib étant complètement à côté de la plaque...)


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Ce n'était pas le projet estival dont Layla avait rêvé.
Rédiger l'histoire d'une petite ville de Virginie-Occidentale et de sa manufacture de chaussettes, Les Inusables Américaines.
Et pourtant...


Été 1938. Layla Beck, jeune citadine fortunée, refuse le riche parti que son père lui a choisi et se voit contrainte, pour la première fois de sa vie, de travailler. Recrutée au sein d'une agence gouvernementale, elle se rend à Macedonia pour y écrire un livre de commande sur cette petite ville.
L'été s'annonce mortellement ennuyeux. Mais elle va tomber sous le charme des excentriques désargentés chez lesquels elle prend pension. Dans la famille Romeyn, il y a... La fille, Willa, douze ans, qui a décidé de tourner le dos à l'enfance... La tante, Jottie, qui ne peut oublier la tragédie qui a coûté la vie à celui qu'elle aimait... Et le père, le troublant Félix, dont les activités semblent peu orthodoxes. Autrefois propriétaire de la manufacture, cette famille a une histoire intimement liée à celle de la ville.
De soupçons en révélations, Layla va changer à jamais l'existence des membres de cette communauté, et mettre au jour vérités enfouies et blessures mal cicatrisées.



J’avais apprécié Le Cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates et j’avais besoin d’un roman tranquille, bien écrit mais reposant, à écouter en tricotant sans perdre des mailles à chaque rebondissement. Vous voyez le genre ? C’est ainsi que j’ai jeté mon dévolu sur Le Secret de la manufacture de chaussettes inusables. Malheureusement, si outre le titre à rallonge (qui n’est dû qu’à l’éditeur français) il a bien les mêmes défauts que le précédent roman d’Annie Barrows, il n’en a pas les qualités.
Le Cercle est un roman tendre et lumineux, plein de bons sentiments parfumés à la guimauve, mais offrant l’assurance de passer un moment agréable. Même si on voit chaque événement arriver de loin, on a envie d’y croire un peu. Par contre, La manufacture force davantage le trait et perd ainsi toute vraisemblance. Je ne peux pas dire que ce roman est insipide, mais si je l’avais lu et non écouté, je ne suis pas sûre que j’aurais eu la patience d’en venir à bout.
Le début était pourtant prometteur. La narration plurielle est émaillée de courriers, ce qui en général me plaît bien. Le lecteur est propulsé en 1938 dans une petite ville de Virginie-Occidentale, à la rencontre d’une famille déchue de la bourgeoisie du cru. Ces gens recèlent bien des secrets, mais pas de quoi perdre une maille en route… J’avais choisi ce livre en connaissance de cause, néanmoins c’était trop superficiel, sans finesse, sans légèreté.
Cet été-là, lors de la préparation des festivités du cent-cinquantenaire de la petite ville de Macedonia, le statu quo qui règne chez les Romeyn, grâce à un mouchoir habilement jeté sur le passé, va être bouleversé par une fillette et une locataire un peu trop fouineuses. Willa a douze ans et commence à se rendre compte que les adultes lui cachent des choses. Layla en a vingt-quatre, n’est pas très futée, mais essaie de se faire une place dans son nouvel environnement. Cela aurait pu être chouette, mais c’est surtout très lent.
Chez Annie Barrows, les personnages sont caricaturaux. Quand je m’y attends, ça ne me gêne pas outre mesure, cependant c’était trop cette fois. Comme dans Le Cercle, nous avons en bordure d’intrigue quelques personnages fats et arrogants qui en deviennent comiques, mais ils ne parviennent pas à offrir au récit cette aura de loufoquerie qui excuse leur manque d’envergure. Les héros eux-mêmes ne sont pas plus plausibles. La plupart sont sympathiques de prime abord, mais peu le demeurent et la façon dont ils se comportent n’est pas toujours vraisemblable.
Layla est sans nul doute la moins crédible de tous. Elle passe de gamine gâtée superficielle à jeune femme autonome et intelligente d’un claquement de doigts. Elle se fait tout de suite à sa nouvelle condition et à son travail alors que, riche et choyée par ses parents, elle craignait la vie active comme s’il s’était agi d’une maladie vénérienne… L’auteur lui prête des élans de féminisme et de militantisme qui sonnent faux dans sa bouche et le personnage en lui-même est tout simplement aberrant. Le résumé la fait passer pour le personnage principal alors qu’elle reste dans l’ombre de Jottie et Willa, juste là pour remplir les blancs. Selon le besoin de l’intrigue, elle est soit brillante et indépendante, soit ingénue à la limite de la bêtise… Elle m’a exaspérée la plupart du temps.
Les autres sont presque tous des éléments de décor, sauf Willa et Jottie. Cette dernière, touchante et pleine de vie, est celle que j’ai le plus appréciée. Du moins jusqu’aux derniers chapitres… J’avoue qu’à ce moment je pensais surtout qu’il était temps d’en finir, l’histoire s’embourbait trop et versait vraiment dans le mauvais goût. Même Jottie commençait à perdre de sa cohérence… J’ai été déçue par cette fin qui se délite, trop facile, trop empruntée. Tout ça pour ça…
Pour finir, parlons un peu de la version audio. La lectrice grasseye beaucoup, ce qui donne un genre aux personnages qu’ils n'ont peut-être pas, et puis c'est agaçant à la longue. Ceci dit, je comprends sa difficulté à trouver suffisamment de façons différentes afin de marquer le changement de personnage. Cela mis à part, Claire Tefnin est une lectrice très agréable. J’apprécie souvent les audiolib pour la très simple raison que leurs lecteurs sont choisis avec soin. Ils n’en font pas trop (Le Hobbit reste l’exception), contrairement à d’autres qui parviennent à rendre le récit ridicule… (Vous avez déjà entendu des extraits des premiers tomes de Harry Potter ou du Trône de fer ? C’est pathétique…)
Le Secret de la manufacture de chaussettes inusables est le genre de roman à lire lors des vacances estivales, quand on s’interrompt souvent et qu’on ne veut pas se prendre la tête. Ça peut être une bonne distraction. J’ai brossé un tableau assez négatif, pourtant je l’ai terminé et tout ne m’a pas déplu, même si je vais bien vite oublier cette histoire…