lundi 31 décembre 2012

Bilan de fin d'année

Ce fut une année bien remplie en ce qui concerne les lectures, peu de déceptions, beaucoup de merveilleux coups de cœur, des découvertes intéressantes et jamais assez de temps pour écrire toutes les chroniques que j'aurais voulu partager avec vous... Sans parler de l'impossibilité de lire toutes les nouveautés qui m'ont fait envie...
Un défi s'achève sans que j'aie vraiment fait l'effort de le relever et un autre a déjà commencé.
L'année 2013 promet déjà de beaux moments de lecture et ma pile de livres à lire menace plus que jamais de s'écrouler.

Et maintenant un petit mot concernant les livres qui m'ont marquée cette année. Il y en a eu beaucoup, alors j'en oublie sûrement et puis j'ai décidé de ne pas dépasser la dizaine.
Sans ordre de préférence, nous avons donc :

- Les larmes rouges de Georgia Caldera.
Parce que c'était juste génial et qu'il faut absolument le lire.
Il va être repris chez J'ai lu en 2013.

- Le cycle de Lanmeur de Christian Léourier.
Je crois que c'est ma plus belle découverte de 2012 (il était temps).
Vous pouvez lire mes chroniques sur le premier et le deuxième volumes de l'intégrale.

- L'aube de la guerrière de Vanessa Terral.
Ça c'est mon coup de cœur en urban fantasy.
Mon avis est sur le site de Vampires & Sorcières (sous le nom de Siana).

- Mémoires d'un maître faussaire de Graham Joyce.
J'ai lu beaucoup de très bon fantastique cette année et celui-ci en fait partie. Il se distingue de mes autres lectures par le fait qu'il mette en scène un environnement urbain et contemporain, mais la richesse de cet ouvrage va bien au-delà de ça.

- Brume d'Estelle Valls de Gomis.
Du fantastique, mais à l'ancienne cette fois.

- Les chroniques d'Oakwood de Marianne Stern.
Encore du fantastique... Il s'agit d'un roman-recueil cette fois. Il est très prenant.

- La somme des rêves de Nathalie Dau.
Et ça c'est mon coup de cœur en fantasy. C'est tout simplement une merveille.
Chronique à venir.

- Vampires d'une nuit de printemps de Lia Vilorë.
Pas un coup de cœur, mais une découverte des plus prometteuses.
J'ai hâte de pouvoir lire la suite !

- Idlewild de Nick Sagan.
J'ai lu la trilogie "Black Ep" en entier et je l'ai appréciée, même si j'ai trouvé les volumes deux et trois moins bons qu'Idlewild.
Mon avis est sur V&S, vous y trouverez aussi ceux concernant Edenborn et Everfree.

Mon coup de cœur éditorial de l'année va aux éditions du Chat Noir.
Parce que j’aime l’esprit de cette maison d'édition et que j’ai eu plaisir à attendre et suivre ses publications tout au long de cette année, tout simplement.

Ce fut une excellente année livresque, j'espère que la vôtre l'a été également et que la prochaine ne sera que meilleure !

lundi 17 décembre 2012

Éclipse lunaire : Phénix et Lukaina

Un roman d'Agnès K. Mongili publié chez Nergäl.

*
Mon nom est Ashandia Parker et je suis un Phénix. Selon la légende, le Phénix est un oiseau fabuleux qui s’immole par le feu et renaît de ses cendres. « Fabuleuse », tout dépend de mon humeur et de ma bonne volonté. « Oiseau », le jour où j’ai de vraies plumes sur le dos, je me prends en photo et je vous en offre avec dédicace ! Pour le reste, y’a de l’idée…
Jusqu’à maintenant, ma vie se résumait à survivre dans une ville où tout un tas de types pas très recommandables aurait eu grand plaisir à faire la peau à une Inaltère en voie de disparition comme moi ou, à défaut, à tenter de coucher avec moi. Enfin, ça, ça concernait surtout cet abruti de Seigneur Dragon d’Homayoon…
Aujourd’hui, mes préoccupations précédentes ont pris du plomb dans l’aile, tout comme la paix qui régnait jusque-là au sein de la communauté Inaltère de la région. La rébellion gronde, les trahisons s’élèvent et, avec elles, les têtes tombent. Les loups sont sur le pied de guerre et la chasse au traître a été ouverte.
De mon côté, je pourrais me contenter de pleurer les morts et de m’immoler de rage ou de tristesse, mais ma rencontre avec une certaine Eilidh Walden va chambouler mes plans. Bien plus, en fait, que tout ce que j’aurais pu m’imaginer…


Dans Éclipse lunaire, Dragons, licornes et Phénix côtoient les vampires et loups-garous que nous sommes bien plus accoutumés à croiser en fantasy urbaine. Pour le meilleur ou le pire ? Cela reste à définir. Mon avis sur cet ouvrage est plutôt mitigé.
J’étais emballée par l’idée même de retrouver dans un environnement urbain et sous forme humaine des créatures dont j’apprécie les histoires, mais qu’on confine plus facilement aux univers magiques de la fantasy. (Or, je ne lis pas tant que ça de fantasy. La lectrice de fantastique que je suis se rabat plus volontiers sur l’urban.) De ce point de vue-là, j’ai été relativement satisfaite. Je n’ai pas aimé tous les choix que l’auteur a faits, mais je reconnais que le fond mythique est bien employé et relativement respecté, notamment au niveau de l’antagonisme naturel de deux races mythiques que je ne citerai pas pour ne pas vous spoiler ou, plus simplement, en ce qui concerne les caractéristiques des créatures présentes dans le roman. La licorne, par exemple, exhale des effluves de violettes. Ce sont des détails que j’apprécie, ça prouve que l’auteur ne s’est pas lancée par hasard dans cette histoire.
Si j’ai un peu grincé des dents face à certains amalgames pas vraiment justifiés, c’est aussi que je suis un peu psychorigide. J’ai du mal avec le fait qu’on change une formule qui fonctionne pour quelque chose d’un peu bancal et qui ne gagne pas forcément en originalité. Mais bon, admettons…
Si je n’arrive toujours pas à définir si j’aime ou non ce roman, c’est surtout à l’intrigue que je le dois. Elle m’a occasionné une impressionnante succession de revirements d’opinion. Au final je dois admettre que ça se laisse lire, que certains aspects de cette histoire sont très bons et d’autres désarçonnants tant ils sont téléphonés.
J’ai apprécié les changements dans la narration et l’enquête dans sa première moitié, mais l’histoire en général se révèle un peu décevante. La fin, surtout, est vraiment bâclée. Le style n’arrange rien car il est plutôt brouillon et hésitant, pas forcément bien adapté à certains choix narratifs. Parfois on a l’impression d’une suite de scènes qui s’imbriquent mal, d’autres fois le récit est plus fluide et même prenant. Il y a de trop nombreuses coquilles et beaucoup de maladresses.
Les personnages, pour stéréotypés qu’ils sont, ont de l’intérêt, mais sont peu développés pour la majorité. Et le fait d’amener dans une histoire d’urban des créatures peu courantes n’en fait pas forcément l’originalité. Il y a de nombreuses questions sans réponses qui donnent quand même envie de savoir la suite, mais est-ce suffisant ?
Du bon et du moins bon, vous disais-je. À vous de vous faire votre opinion sur le sujet.

dimanche 16 décembre 2012

Grandville T1

Une BD de Bryan Talbot, publiée chez Milady Graphics.


Dans le Paris de la Belle Epoque, l'inspecteur LeBrock de Scotland Yard est sur la piste d'un mystérieux assassin. Inspiré par le travail du caricaturiste français du XIX e siècle JJ Grandville et l'illustrateur de science-fiction Robida - sans parler de sir Arthur Conan Doyle, Rupert l'Ours et Quentin Tarantino -, Bryan Talbot fait une fois encore la preuve de son immense talent.


Grandville est avant tout une uchronie steampunk dont les personnages sont des animaux anthropomorphes. Dans l’univers mis en place par Talbot, Napoléon n’a pas perdu à Waterloo, il a conquis toute l’Europe et a fait de Paris, qu’on surnomme Grandville, la capitale de son empire. Il n’a donné son indépendance à l’Angleterre qu’à cause des attentats répétés d’un groupe d’anarchistes. Au début de cet album, la situation politique est d’ailleurs tendue. La grogne populaire, le racisme, le danger lié aux groupes extrémistes sont partout.
Talbot a, de manière plutôt intelligente et relativement subtile, su mêler notre histoire passée et présente pour créer quelque chose d’original qui, tout en respectant les limites imposées par le genre de la BD et par la vraisemblance, a une dimension socio-politique intéressante qui ne peut qu’être évocatrice pour le lecteur. Rien de bien complexe, évidemment, mais le concept est excellent.
J’ai vraiment apprécié le goût du détail dont l’auteur a fait preuve, que ce soit dans l’histoire comme dans le dessin. Grandville est un album très visuel. J’entends par-là qu’il n’y a pas de dialogues inutiles ou de sur-explication. Pourtant on ne perd rien de cette histoire, on ne ressent pas de frustration quand la fin arrive car tout s’équilibre.
Il y a de nombreuses références, picturales comme littéraires, de la BD franco-belge du XXe siècle aux romans de Conan Doyle et c’est un plaisir de les débusquer tout au long de la lecture.
LeBrock, personnage principal de cette histoire, inspecteur de Scotland Yard est un personnage sympa, l’archétype du flic un peu bourru, mais au grand cœur. Il se prend un peu pour un mercenaire dans un monde pourri, mais on lui pardonne. C’est aussi un blaireau, au sens animalier du terme. Il faut dire qu’outre-manche cet animal n’a pas la même déplorable réputation que chez nous. Pour les Britanniques le blaireau est surtout loyal et tenace, il ne lâche jamais l’affaire et en cela l’incorruptible LeBrock est un bon représentant de son espèce.
Notre héros a aussi un petit côté James Bond, celui des romans plus que des films, à la fois dans ses relations avec les femmes et sa manière expéditive de régler les affaires sur lesquelles il travaille. En effet, s’il se pique d’utiliser les méthodes de notre bon vieux Sherlock (et en plus le jeu de mot avec un des mots pour blaireau fait la rime, si ça n’est pas merveilleux !) LeBrock est un peu loin du compte. C’est bien dommage. Il ne cherche pas de réelles preuves pour étayer ses intuitions, il ne déduit rien, il « sait » et il fonce… Heureusement que le hasard l’aide souvent… C’est bien le seul reproche que je pourrais faire à cette histoire, avec le fait qu’il n’y a guère de rebondissement. Les autres personnages sont un peu des faire-valoir, mais une BD ne permettant pas un grand développement des personnalités de tout un chacun, je ne vais pas chipoter davantage. C’est une lecture très plaisante.
Et puis il convient également de dire que Grandville est un très bel album, à commencer par la couverture, sobre mais élégante, dont le cartonnage épais rappelle un peu la BD des années 40-50 (puis qui personnellement m’évoque aussi les albums de Benjamin Rabier et pas seulement à cause des animaux anthropomorphes).
Les planches aussi sont superbes. J’avais déjà zyeuté le travail de Bryan Talbot dans Sandman et un des albums de Fables qui est encore à ce jour parmi mes préférés, cependant ça ne m’avait pas marquée plus que ça, je l’avoue. Ceci dit, en parcourant Grandville, j’ai eu plus de points de comparaison et effectivement j’ai pu faire un peu la part des choses avec mes souvenirs.
Le Dessin est fin, élégant, et la « mise-en-scène » des images excellente (c’est surtout sur ce dernier point que j’ai vu la ressemblance avec ce qu’a fait Talbot dans Romances). La colorisation, bien qu’elle soit tout droit sortie de photoshop a un petit côté rétro qui s’adapte parfaitement à l’histoire. Et puis le choix de cette palette de couleurs un peu sombres, mais pas trop froides a la classe.
En outre, que dire de toutes les références glissées dans les dessins comme dans le texte ? J’ai beaucoup aimé jouer à les chercher tout au long de ma lecture. Certaines m’ont parlé tout de suite, d’autres un peu moins, puis il y en avait aussi que je ne connaissais pas du tout et que découvrir fut un plaisir. J’ai d’autant plus apprécié la postface très complète de l’auteur, une exclusivité de la version française, car elle met en relief et explique tous ces clins d’œil. Talbot y donne également un exemple du travail de colorisation qu’a demandé cet album.
C’est vraiment une très belle BD que je vous encourage à découvrir. Il existe un second tome, Grandville mon amour, paru également en français chez Milady Graphics.

samedi 15 décembre 2012

Vertige. Les étoiles de Noss Head T1

Écrit par Sophie Jomain et publié chez Rebelle.


Hannah, bientôt dix-huit ans, était loin d’imaginer que sa vie prendrait un tel tournant. Ses vacances tant redoutées à Wick vont finalement se transformer en véritable conte de fée… puis en cauchemar. Sa petite vie tranquille, ses idées bien arrêtées, ses projets… tout va changer, brutalement. Elle devra affronter l’inimaginable, faire face à ce qu’elle n’aurait jamais pensé croire un jour, car les légendes n’en sont pas toujours… Leith ne s’attendait pas non plus à Hannah. Il tombe de haut, l’Esprit a choisi : c’est elle, son âme sœur. Pourra-t-il lui cacher sa vraie nature encore longtemps ? Osera-t-il lui avouer qu’il n’est pas tout à fait humain? Il n’a pas le choix, leur rencontre l’a mise en danger. Lui seul peut lui venir en aide.


La quatrième de couverture vous dit tout ce que vous avez besoin de savoir sur l’histoire, alors je ne vais pas en rajouter.
Vertige est un roman Young adult. En général c’est une appellation qui peut vouloir dire beaucoup de choses différentes, mais dans le cas présent ce roman est très équilibré. Il est jeunesse sans l’être trop, idéal pour des adolescents et néanmoins lisible pour des adultes.
C’est le premier roman de Sophie Jomain, alors il y a quelques petites maladresses. L’auteur passe très rapidement sur certaines choses, mais à l’inverse s’étend beaucoup sur d’autres de moindre importance. Ces longueurs ne sont pas non plus excessives, mais peuvent paraître incongrues face à certains raccourcis. Les rebondissements sont également un peu faciles. J’ai cependant vu des ouvrages d’auteurs confirmés beaucoup plus maladroits alors je ne vais pas chipoter.
Ces petits cafouillages peuvent certes agacer le lecteur exigeant, mais l’auteur se rattrape au niveau du style. C’est un roman bien écrit et très fluide. On le lit plutôt vite. Cet ouvrage n’a pas d’autre prétention que d’offrir une bonne petite histoire d’amour et j’ai apprécié cette simplicité. Pas de monde à sauver, pas de grande leçon d’humanité, c’est rafraîchissant et, même avec des loups-garous, c’est vraisemblable. Sophie Jomain a de plus élaboré une mythologie intéressante à partir d’éléments mythiques peu utilisés habituellement dans les histoires de loups-garous et c’est tout à son honneur.
Je pense que Vertige est un livre que j’aurais vraiment beaucoup aimé à quinze ans, mais je me sens maintenant un peu vieille pour ce genre de lecture. Les histoires d’amours adolescentes et leurs sempiternels balbutiements, même si celle-ci est bien plus sobre que la plupart de celles qui jalonnent la littérature YA, ont tendance à m’ennuyer très vite. Entendons-nous bien, c’est un bon livre, si j’ai levé les yeux au ciel quelquefois durant ma lecture c’est que je suis une vieille grincheuse. Ce n’est pas mièvre, c’est juste une première histoire d’amour avec ce que ça implique de maladresse dans le comportement d’une toute jeune fille qui ne sait trop quoi faire de tous ces changements dans sa vie.
Hannah (Ciel un palindrome ! Excusez, j’ai un peu de mal avec ce prénom…) est un personnage sympathique et crédible, si j'oublie le fait que ses genoux lâchent à chaque fois qu’elle voit Leith (faut pas abuser non plus). J’ai beaucoup apprécié le fait qu’elle soit très rationnelle et ne se laisse pas embarquer à la première occasion sur les sentiers de l’étrange comme si ça allait de soi. Par contre son manque de vivacité d’esprit dans la suite du roman m’a un peu étonnée.
Leith, avec sa tendance à souffler le chaud et le froid, m’a moins séduite que sa compagne. Bien qu’il ait ses raisons pour agir comme il le fait, j’ai trouvé le personnage un peu surfait. Il en va de même avec les personnages secondaires qui sont assez stéréotypés. Les parents d’Hannah, par exemple, sont de vrais hélicoptères de surveillance mais disparaissent du décor quand ça arrange l’auteur. Et ils ne doivent pas non plus avoir de nez… En général quand on reçoit quelques litres de bière brune sur la gueule, on sent la brasserie à des kilomètres. Comment des parents un peu psychorigides peuvent-ils ne pas froncer le nez face au parfum de Guinness de leur enfant unique qu’ils attendent pour être bien certains qu’elle ne dépasse pas son couvre-feu ?
Il y a donc quelques invraisemblances dans cette histoire, de petits accrochages sans réelle importance. Ma seule vraie déception a été ce méchant un peu trop caricatural.
Un détail stylistique m’a également gênée. C’est tout bête, je vous l’accorde, mais ça a vraiment perturbé ma lecture. Dans ce roman, les pensées de l’héroïne et narratrice sont parfois, et inexplicablement, entre guillemets. Or, les guillemets sont comme chacun sait une des marques du discours et ça fait vraiment bizarre de lire ce qu’elle ne peut s’empêcher de penser, mais ne dirait jamais à haute voix, entouré de guillemets. Certes ils peuvent marquer l’ironie ou un double-sens, mais c’était malvenu. L’italique aurait été un meilleur choix.
Oui, j’arrête avec mes délires psychotiques…
Je garderai de ce roman l’image d’un récit charmant, sans être exceptionnel, et qui se lit très vite. Je lirai la suite car j’espère que, la situation des personnages ayant évolué, ce qui a pu me gêner dans cette lecture ne sera qu’un souvenir dans le second tome.

vendredi 14 décembre 2012

Les âmes croisées

Un roman de Pierre Bottero, publié chez Rageot poche.



Nawel vit à Jurilan, le royaume des douze cités. Aspirante comme ses amis Philla et Ergaïl, elle va choisir la caste correspondant à ses aspirations profondes pour le reste de sa vie. Tout indique qu’elle entrera, selon le désir de ses parents, chez les prestigieuses Robes Mages. Mais Nawel s’interroge sur sa place dans cette caste et sur la voie qu’elle doit suivre…

Un roman de fantasy dont les fils croisent Les Mondes d’Ewilan et L’Autre, mais aussi une réflexion profonde sur le destin et la responsabilité, l’ambition et la sincérité, le hasard et la force des rêves.


Les âmes croisées est un superbe roman initiatique qui met en scène une jeune fille, Nawel, au seuil de sa vie d’adulte. De prime abord elle est arrogante, insupportable, mais se révèle pourtant fragile et humaine au fil des pages. Nawel est une jeune fille plutôt paradoxale. Elle abuse allègrement des privilèges de sa caste, mais demeure très naïve envers ce que son statut peut impliquer en retour. Tout se paie dans la vie et notre héroïne ne l’apprendra qu’à ses dépens. Confrontée à la vie, à la véritable nature de sa société, à elle-même et prenant conscience de la valeur de ses propres choix, Nawel évolue tout au long du récit. C’est ce qui en fait un magnifique personnage et donne toute sa poésie à ce roman d’une sensibilité à la fois pudique et sans fard, touchante.
C’est un roman très intelligemment construit et extrêmement poétique. J’ai beaucoup apprécié les écrits introspectifs de Nawel qui ponctuent un récit narré en grande partie à la troisième personne et permettent de se sentir plus proche de ce personnage un peu distant. On apprend ainsi à l’apprivoiser, à comprendre d’où est née cette froideur. Les chapitres sont courts et leurs fins souvent abruptes, demandant parfois quelques retours en arrière. Cela donne un peu l’impression que l’histoire est hachée mais se révèle au final plus homogène qu’on l’imagine et surtout très adapté aux aléas du récit.
Au début du roman Nawel est telle qu’on l’a façonnée et ne le sait pas, jusqu’au jour où un événement va détruire à jamais l’équilibre si parfait de sa petite vie de privilégiée. Le vernis commence à se craqueler et elle s’aperçoit que tout ce qui fait sa vie est vacuité, parfois même illusion. Elle se rend compte que ses ambitions sont celles de ses parents, que ses choix ne lui appartiennent pas et qu’elle est aussi abjecte qu’eux. Alors Nawel part à la reconquête d’elle-même et c’est ce qui fait la beauté de son histoire. Rien n’est simple ou lisse dans son passage à l’âge adulte. C’est une quête personnelle qui peut parler à chacun d’entre nous car malgré la fantasy de cet univers, les sentiments sont vrais et accessibles.
Au-delà du récit lui-même, ce livre m’attriste toujours autant car c’est le dernier de son auteur. Je ne peux m’empêcher à chaque fois de songer avec compassion à sa famille. Et puis, très égoïstement, j’aurais bien aimé avoir la suite car je me suis attachée à Nawel. Ce ne serait pas forcément nécessaire ceci dit car le roman se révèle très symbolique, surtout dans cette situation où il se fait écho de la vie elle-même au point que cela en devient troublant. Je ne peux vous l’expliquer davantage, il faut lire le livre et décrypter ce qui se cache entre les lignes. C’est triste et beau à la fois.
Ce qui se passe derrière la porte doit rester le secret de ceux qui en franchissent le seuil.
C’est un excellent roman pour les jeunes comme les adultes, pas édulcoré, bien écrit, vif et efficace, qui implique pas mal de réflexion et habitera longtemps l’imaginaire de ses lecteurs.

Ce livre a été relu pour le club de lecture de V&S (il partage le mois de décembre 2012 avec le premier tome d'Apocalypsis d'Eli Esseriam que je vais lire bientôt).
J'en profite pour l'ajouter à mon défi lecture de 2012 pou ne pas être trop ridicule vu le peu de livres qui y figurent.

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jeudi 13 décembre 2012

Bienvenue T1

De Marguerite Abouet et Singeon.
Une BD publiée chez Gallimard jeunesse, collection Bayou.

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Petite séquence émotion. J'avais le même carton à dessins. Enfin pas tout à fait, le mien était vert et noir, mais avec des rubans, exactement comme celui-ci. C'est une rareté à notre époque où on les préfère plus pratiques, avec des élastiques. Oui, j'ai bien conscience que ça n'intéresse que moi, mais cette BD m'a rappelé de nombreux souvenirs.

*

A noter qu’il s’agit de ce format moyen que l’on trouve de plus en plus souvent en BD et qui est un peu plus haut et large qu’un roman en grand format, mais beaucoup moins qu’une BD classique. C’est un format que j’apprécie vraiment, Il n’est pas trop lourd ni trop encombrant et est très agréable à lire.
L’ouvrage comporte une centaine de pages, de quoi bien entrer dans une très bonne histoire et profiter un minimum de la lecture. Les BD sont souvent trop courtes…
Celle-ci est censée être un ouvrage jeunesse, mais je suis dubitative sur le sujet. Je ne sais pas à quel âge est destinée la collection Bayou, mais personnellement je conseillerais plutôt cet album à partir de 17 ans. Ce n’est évidemment que mon point de vue.

Enfin, passons aux choses sérieuses…
Bienvenue est une jeune femme de 21 ans, étudiante aux beaux-arts, elle partage une chambre de bonne avec sa cousine Lola qui veut devenir actrice. Perpétuellement fauchées, les deux jeunes femmes sont vraiment en galère au début de ce tome et doivent absolument trouver du boulot. Tandis que Bienvenue joue les nounous, Lola s’essaie aux castings de danseuse.
Il s’agit d’une BD très réaliste (plus dans le scenario que le dessin) et c’est un vrai régal. Bienvenue est une fille sympa, malgré son côté un peu grincheux et caustique. On peut néanmoins avoir envie de la secouer pour lui remettre les idées en place, lui montrer aussi qu’elle reproche aux autres leur égoïsme et leur inattention, mais qu’elle n’est guère mieux au final. C’est toutefois un personnage attachant et très crédible, tout comme l’épatante galerie de personnages secondaire qui l’accompagne. Tous ont une histoire, pas encore parfaitement développée évidemment, mais que l’on sent poindre dans ce premier volume et qui donne envie d’en savoir plus.
Le récit est prenant, les personnages attachants. Ils sont bourrés de défauts, mais n’en paraissent que plus humains. Bienvenue se plaint tout le temps, de sa vie, de ses proches, de son prénom. Elle n’a pas tort ceci dit, avec un tel prénom tous les faux départs de la vie ne paraissent que très ironiques.
Le ton est très juste, l’histoire est simple mais extrêmement crédible, elle nous montre le quotidien d’une jeune fille pas très sociable et les interactions qu’elle a pourtant avec les autres (un peu malgré elle parfois), les voisins à problèmes, les enfants, ses profs et condisciples, ses amis et sa famille. Toutes ces personnalités qui se croisent, avec leur vie, leurs soucis, tissent une histoire commune dans laquelle les joies et les peines s’équilibrent.
On s’attache vite à tout ce petit monde et l’histoire file sans qu’on s’en rende compte, pour laisser le lecteur sur sa faim à la dernière page. Le récit est consistant, mais j’ai pourtant été désappointée par cette fin. C’était un arrêt un peu brutal pour moi. Cela ne manque pas de logique ceci dit, cette BD étant avant tout une tranche de vie prise dans le vif.
Le dessin en lui-même me plaît bien sans être vraiment remarquable, des traits pas toujours très fins en ce qui concerne les visages, mais une certaine classe dans la représentation de la ville, les décors en général, l’usage de la couleur. Ça fait un peu BD des années 50, sans que je sache vraiment comment l’expliquer. On a des couleurs pleines à la texture simple, mais agréable, à mi-chemin entre cet aspect rétro et quelque chose de plus moderne.
Pour une obscure raison ça me rappelle certains tomes de l’espiègle Lili que je lisais quand j’étais gamine, puis surtout Tom-Tom et Nana, probablement parce que les enfants que garde Bienvenue leur ressemblent beaucoup (surtout la fillette). Je vous avouerai toutefois que je me suis plus concentrée sur l’histoire que sur le dessin.
J’ai été un peu gênée par la police d’écriture. Ce n’est qu’un détail et c’est évidemment très subjectif, mais le côté irrégulier est un peu pénible à lire dans mon cas et esthétiquement parlant ça n’apporte rien de bien spécial. La simplicité est encore ce qu’il y a de mieux.
Quoi qu’il en soit, cet ouvrage a été un énorme coup de cœur et pas seulement parce qu’il me rend un peu nostalgique en me rappelant ma vingtaine. Bienvenue est une très belle découverte. Maintenant il me faut la suite et ça tombe bien, elle vient tout juste de paraître, je vais donc pouvoir me jeter avidement dessus.

mercredi 12 décembre 2012

Challenge "Je lis des nouvelles et des novellas"

Ou comment participer à un challenge qui m'enthousiasme du début à la fin.


J'ai choisi le niveau intermédiaire de "Joyeuse lectrice":
Niveau "Joyeux lecteur/Joyeuse lectrice" ou encore "Je lis des nouvelles et des novellas et j'aime ça" : lire et chroniquer 12 nouvelles ou recueils ou novellas.

Mais je vois loin, avec un peu de motivation et si le temps ne file pas trop vite, comme on peut changer de niveau en cours de route, j'arriverai peut-être au très ambitieux palier suivant qui demande 24 recueils, anthologies ou novellas. Tout un programme !

Je suis une grande lectrice de nouvelles, de recueils, d'anthologies, de novellas, donc ça ne devrait pas être très difficile, n'est-ce pas ?
Moui, le problème en fait ce n'est pas de les lire, mais de les chroniques et c'est en cela que résidera tout le challenge. C'est un format très difficile à commenter, surtout pour l'anthologie. Mais ça me forcera à le faire et c'est une bonne chose car j'espère que ça vous donnera envie de lire certains de ces ouvrages à côté desquels on passe trop souvent. Et puis c'est aussi un bon moyen de découvrir certains auteurs.

Souhaitez-moi donc bonne chance, le challenge démarre aujourd'hui et finira le 11/12/13 !

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Livres lus :

- For I Have Sinned de Darynda Jones (nouvelle).
- Gilles a suivi Jeanne de Valérie Simon (nouvelle).
- Sanshôdô : la voie des trois vérités de Jean Millemann (recueil de nouvelles).
- Nous finirons bien par en venir à bout... de Laurent Queyssi (nouvelle)
- Le Rêve du Prunellier de Rozenn Illiano (recueil de nouvelles)
- L'assassinat de la maison du peuple de Sylvie Denis (novella)
- La Suriedad d'Estelle Faye (nouvelle)
- Fin(s) du monde, 20 récits pour en finir avec l’Apocalypse des Artistes Fous (anthologie)
- Sang d'ocre de Lydie Blaizot (novella)
- Villa Giudita et autres nouvelles de José Wolfer (recueil de nouvelles)
- Le livre qui rend dingue de Frédéric Mars (novella)
- Vampire Blues, Ladainian Abernaker ep1 de Lydie Blaizot (nouvelle)
- La plage du Xenos et Éclipse partielle de Graham Joyce (nouvelles)
- A Bloody Melody de Maëlig Duval (nouvelle)
- L'après-dieux de Maëlig Duval (novella)
- Ainsi commence la nuit de Vanessa Terral (recueil)
- À n’importe quel prix de Claire et Robert Belmas (nouvelle)
- Chronique de la vallée de Jacques Boireau (nouvelle)
- Dedans, dehors de Sylvie Denis (nouvelle)
- Clamatlice de Vanessa Terral (mini recueil de nouvelles)
- Au service des insectes de Cindy Van Wilder (nouvelle)
- L’héritage et autres nouvelles de Megan Lindholm / Robin Hobb (recueil de nouvelles)
- Sales bêtes ! Animaux étranges et délires zoomorphiques des Artistes Fous (anthologie)
- L'ombre du maître espion, Le Baron Noir T1 d'Olivier Gechter (novella)
- La boîte de Schrödinger – spéciale Halloween (anthologie)
- Nouvelles en vrac : Voler (de ses propres ailes) de Cécile Duquenne, La clé de l'eau d'Agnès Evans, Carpe Sesamum d'Esteban Bogasi.
- Nouvelles en vrac (2) : 1888 de Céline Etcheberry, En Adon je puise mes forces de Dominique Lémuri, Hérésie minérale de Stéphane Desienne, Anastasis d’Aude Cenga.
- Nouvelles en vrac (3) : Beef de Joey Burger, Trois coups contre ma porte de Michael Roch, Louie de Lou Wagram, Cosmic Karma de Jérémy Semet.