vendredi 31 décembre 2021

Bilan 2021

2021 n’a pas été une année faste, en quantité comme en qualité (41 livres terminés, deux encore en cours). Sans parler de problèmes de santé divers et variés qui m’ont empêchée de lire autant que je l’aurais souhaité. Enfin, de ma quarantaine de lectures (audiolectures comprises), je retiendrai quand même quelques ouvrages qui sortent du lot. 
L’ordre de présentation n’a pas d’importance, à l’exception du premier et je vous invite à cliquer sur les liens des chroniques pour plus d’information.

Eh oui, mon favori de 2021 n’est pas un roman, mais un feuilleton audio.


Ce roman a été une excellente surprise. Comme son personnage, l’autrice semble avoir été une lectrice vorace, ce qui crée forcément une connivence avec le lecteur s’il l‘est aussi.
J’ai beaucoup aimé la façon dont elle utilise des motifs pour le moins classiques au service de sa propre originalité.


Diamants s’apparente davantage à une épopée qu’à un roman. Cette fantasy élégante et poétique possède la saveur d’un mythe. Or qu’est-ce qu’un mythe si ce n’est une vérité racontée avec des symboles ?


Cet album destiné aux enfants est une merveille d’humour irrévérencieux et d’intelligence.


Cet excellent roman YA donne à réfléchir sur notre société actuelle, le futur que nous nous préparons et les injustices sociales que nous laissons perdurer.


Enfin, j’évoquerai, comme je le fais souvent dans ces bilans, le premier tome d’une série que je juge prometteuse :
La façon dont l’autrice utilise l’Histoire pour forger son uchronie m’a séduite et j’ai hâte de voir ce qu’il adviendra des personnages.



Je vous souhaite par avance une excellente nouvelle année et de bonnes lectures.
À bientôt pour toutes les chroniques en retard !

mardi 28 décembre 2021

Dans tes bras

Un roman de Talia Hibbert, publié exclusivement en numérique dans la collection Kobo Originals.


C’est parti pour une petite romance de Noël.
D’un côté nous avons Abbie, revêche mais juste assez pour cacher ses faiblesses. Parce qu’Abbie a grandi dans une tribu de garçons et qu’apparemment être gentille équivalait à tendre le bâton pour se faire battre, même si ses frères l’adorent. Et puis la vie ne l’a pas aidée à s’ouvrir aux autres. Elle sort d’un mariage désastreux et pense que le seul mec qui l’intéresse vraiment est devenu inaccessible. Donc Abbie est dévorée par toutes sortes d’angoisses, mais elle travaille là-dessus.
De l’autre côté nous avons Will, qui a grandi juste à côté de chez Abbie et qui s’est quasiment fait adopter par la fratrie. Il est devenu acteur, a conquis le monde entier, mais il reste le gars simple qu’il a toujours été. Le fait de n’avoir pas toujours eu la vie facile l’aide bien à garder les pieds sur terre.
Bien sûr ces deux-là sont amoureux depuis l’enfance, mais n’ont jamais osé se le dire… Peut-être en trouveront-ils l’occasion durant ces fêtes de Noël, censées se passer en famille dans la ferme écossaise de la grand-mère d’Abbie. En tout cas, c’est ce qu’espère Will. Et il a un plan.
Bon, disons-le tout de suite, je n’ai pas été enchantée par cette romance. C’est mignon, ça se lit vite et ça commençait plutôt bien, mais ça manque de relief. Ce roman est un squelette sans muscles ni chair. Il n’est pas abouti et c’est là son problème majeur. 
On dirait que l’autrice a voulu terminer son histoire le plus vite possible. Cela est flagrant dans la façon dont elle ébauche à peine ses personnages secondaires. Par exemple, les trois frères d’Abbie, dont deux sont plus âgés et un est son jumeau, ne semblent pas avoir de partenaires ni d’enfants. Certes, ils ont le droit, mais ça fait beaucoup d’adultes de plus de trente ans célibataires dans la même famille, non ? Ce sont des plantes vertes dans un décor en carton. Néanmoins cela pourrait passer, si la romance était plus construite. Pas forcément plus profonde (je n’en attendais pas tant), mais plus vivante.
Malheureusement, dans le même esprit d’économie d’intrigue ou de descriptions, il ne se passe pas grand-chose. Will dit « je veux » et Abbie répond « j’ai peur », pendant une centaine de pages (le roman en compte 119). Le schéma est vraiment répétitif car la majeure partie du récit se concentre sur l’analyse des sentiments des personnages. On se focalise sur l’un ou sur l’autre et sur leurs questionnements qui tournent en spirales. Ils ressassent leurs désirs et angoisses parce qu’ils ont peur du rejet et surtout de n’être pas aimés en retour autant qu’ils aiment, chacun étant persuadé que ses sentiments sont si forts que l’autre ne pourra pas le supporter… L’autrice aurait pu rendre cela plus vivant en racontant certains de leurs souvenirs, pour montrer comment ils sont tombés amoureux ou en les faisant davantage interagir durant ces retrouvailles, toutefois elle a préféré les monologues intérieurs. On sort de ce roman sans réellement connaître Abbie et Will.
Je trouve cela dommage parce que pour une fois le personnage masculin n’est pas un gars toxique. Will respecte les limites de la femme qu’il aime et c’est bienvenu quand on sait que la romance fait plutôt la part belle aux pervers narcissiques en général. En revanche, si Abbie est un personnage plutôt crédible (pas forcément sympathique, mais dont on peut en tout cas comprendre le comportement) je me suis souvent demandé de quelle planète venait Will… Comme si être gentil était forcément synonyme d’abruti dans la tête de l’autrice... il a le QI d’une huître et la capacité d’attention d’un chiot. Sérieusement, j’ai essayé de l’apprécier mais il est complètement à l’ouest les trois quarts du temps. J’ai même eu pitié. C’est à se demander comment ce gars retenait ses dialogues. Ceci dit, il explique lui même qu’il doit tout à sa belle gueule et qu’il ne se sert pas souvent de son cerveau. Au moins il en a conscience et sa créatrice aussi… Alors oui, un gars distrait peut avoir un certain charme, mais lui raisonne et agit comme un enfant.. C’est perturbant. Enfin, au moins il m’aura fait rire. De consternation, mais c’est déjà ça.
J’ai bien conscience d’être aussi revêche qu’Abbie dans cette chronique, cependant j’ai vraiment essayé de voir les bons côtés de ce roman. Je crois qu’il aurait gagné à être étoffé. N’en attendez pas trop, mais si vous voulez une lecture rapide et peu exigeante, une romance moderne sans macho ultra possessif, il pourrait vous plaire.


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dimanche 26 décembre 2021

Meurtres et pépites de chocolat - Les enquêtes d'Hannah Swensen T1

Un roman de Joanne Fluke, publié chez Le Cherche Midi pour la version papier et Audible pour la version audio. Celle-ci est lue par Flora Brunier.


Hannah Swensen est une jeune femme qui approche des trente ans, est « tragiquement célibataire » comme sa mère n’arrête pas de le lui rappeler, accro à la caféine et dingue de son chat. Vous voyez le topo : l’autrice aime bien les clichés. Hannah a interrompu ses études universitaires pour revenir à Lake Eden, sa ville natale, afin de soutenir sa mère après la mort de son père. Honnêtement, cette dernière ne semble pas en avoir besoin car elle a une vie sociale très active (elle n’a pas besoin de travailler). Tenter de caser sa fille aînée semble être son loisir favori alors c’était peut-être ça le but. Hannah ignore de son mieux les tentatives de sa mère et a créé une pâtisserie spécialisée dans les cookies qui a beaucoup de succès. Elle mène une vie tranquille dans sa bourgade d’environ trois mille habitants, jusqu’au jour où elle tombe sur un cadavre dans la ruelle à l’arrière de son magasin et que, pour aider son beau-frère à obtenir une promotion, elle va petit à petit se mêler de l’enquête.
Ce premier tome des Enquêtes d’Hannah Swensen semble un peu suranné. Il se passe au début des années 2000 alors les gens n’ont pas souvent recours à des téléphones portables ou à internet, c’est là qu’on se rend compte de la façon dont ces technologies ont envahi notre vie. Il est toutefois agréable de faire un petit bond dans le passé.
L’enquête est sympa, quoique facile. Les gens racontent tout à Hannah avec une aisance déconcertante et elle tombe toujours pile au bon moment, mais ça passe. Il n’y a guère que la fin qui m’a un peu ennuyée tant elle est expéditive. Cependant je n’attendais pas quelque chose d’exceptionnel. Le problème de ce récit tient surtout dans le fait que les personnages ne sont pas sympathiques. Hannah oscille entre vivacité d’esprit et manque de discernement presque ridicule. Sa mère et sa sœur sont des clichés sur pattes (encore que malgré cela j’aime bien la frangine) et ça ne donne pas une image très positive de la gent féminine. Non, je ne pense pas qu’il faille encenser les femmes, cependant certains clichés me tapent sur les nerfs. La mère d’Hannah est insupportable (et stupide). Toutes les femmes du roman adorent colporter des ragots et jugent à l’emporte-pièce. Elles passent leur vie à critiquer l’apparence les unes des autres, ça en devient vite pénible… C’est donc un mystery pas si cozy que ça au final. J’espère que cela s’arrange dans la suite car je vais persister. J’ai bien aimé le fait que l’histoire se passe dans un coin paumé du Minnesota (où les hivers sont rudes) et le fait que l’autrice émaille son récit des recettes qu’évoquent les personnages. Eh oui, pour moi les recettes sont le point fort de ce livre… Il faut dire qu’elles font envie. Elles sont données en mesures américaines, mais il y a une table de conversion à la fin.
Le roman est suivi d’une nouvelle de noël qui commence bien, même si elle est aussi un peu clichée. Cependant, comme le roman, elle s’enlise sur la fin et m’a laissé sceptique.
J’ai opté pour la version audio. J’aime beaucoup écouter des livres quand je tricote ou que je pâtisse et les cozy mysteries sont parfaits pour cela. Celui-ci est idéal pour les vacances de fin d’année. La lectrice est agréable même si parfois sa prononciation de certains mots laisse perplexe (comme Moshe le chat qui devient Moche). Ce n’est pas le meilleur cozy que j’ai pu écouter, mais il est distrayant et il vous donnera certainement envie de faire des biscuits.
J’ai écrit cette chronique il y a plusieurs semaines et je l’a laissée dans mes brouillons comme quelques autres.. J’y disais que je comptais écouter le deuxième tome pour passer le temps quand je confectionnerais mes biscuits de Yule et les pains d’épices de Noël, parce que ça prend du temps. C’est ce que j’ai fait. Je n’ai pas encore terminé ce tome, mais j’apprécie que l’enquête soit liée à des personnages rencontrés dans Meurtres et pépites de chocolat. La continuité est aussi un avantage de ce genre de séries, on a le temps de mieux connaître les protagonistes et de voir se développer les axes secondaires.

dimanche 19 décembre 2021

Typo & Graillon

Un livre de Barbora Klárová et Tomáš Končinský, illustré par Daniel Špaček et traduit par Eurydice Antolin. Publié aux éditions du Père Fouettard.

Présentation de l'éditeur :

Pas facile d'être un lutin entropique. Tous les jours, il faut faire pourrir la nourriture, trouer des chaussettes, tacher les canapés de chocolat chaud et mettre plein de fautes dans les journaux. Et tout ça, sans se faire choper par les humains !
Vous êtes-vous parfois demandé pourquoi les choses s’abîment même quand vous ne les utilisez pas ? Ou encore d’où sort cette coquille dans le texte que vous venez d’imprimer et que vous aviez pourtant relu trois fois ? La réponse est à la fois plus simple et plus complexe que toutes celles que vous avez pu imaginer : c’est la faute des lutins entropiques. Leur boulot c’est de faire se dégrader… tout ce qui leur passe sous la main. Ce sont les mites ultimes de l’univers en résumé. Ils oeuvrent avec zèle car ils croient en l’absolue nécessité de la dégradation.
Typo est un jeune lutin encore en apprentissage. Il va à l’école et il accompagne parfois son père (expert en détérioration de livres) à la bibliothèque pour semer quelques fautes de frappe, en attendant d’avoir son diplôme et de pouvoir travailler seul. Sa grande ambition, que ne comprend pas trop son paternel, est de travailler dans l’informatique où il pourra glisser des coquilles traîtresses dans les programmes.
Typo nous raconte son quotidien, nous parle de son école, de son meilleur ami et de toutes ses réflexions de jeune lutin à propos de l’entropie… Jusqu’à la sortie scolaire qui va bouleverser ses convictions.
Ce fut un plaisir de passer un moment avec ces lutins entropiques toujours prêts à inventer les machines les plus extravagantes pour les aider dans leur grand œuvre. Bien qu’elle soit destinée à un jeune public, cette lecture est exigeante sur le fond comme la forme. Elle requerra sans doute l’aide d’un adulte (ou d’un dictionnaire pour les jeunes lecteurs les plus indépendants), mais comme je passe mon temps à déplorer l’indigence du vocabulaire des livres pour enfants publiés actuellement, je suis ravie. Cela étant, ce livre est aussi drôle que réfléchi (et il explique bien des choses, comme le fait que les fils des écouteurs soient toujours emmêlés sans raison apparente. Honnêtement, l’intervention des lutins entropiques est l’explication la plus logique à ce phénomène). Il évoque avec humour, intelligence et finesse des questions philosophiques que l’humanité se pose depuis toujours et continuera sans doute à se poser jusqu’à ce que la Dent du Temps nous ait tous grignotés.
Je suis tombée sous le charme de cette histoire, même si comme tout être humain j’ai tendance à vouloir lutter (en vain) contre ces pauvres lutins qui ne font que leur boulot. Les illustrations sont charmantes et pleines de détails cocasses. J’ai adoré celles des machines entropiques dans les marges. Et puis les lutins sont vraiment craquants.
Ce fut une lecture aussi agréable qu’enrichissante et je vous la conseille vivement.

P.S. : Je n’ai jamais autant corrigé de coquilles dans une chronique. Merci de ton implication Typo, mais tu devrais aller aider quelqu’un d’autre, de préférence MAINTENANT.

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vendredi 10 décembre 2021

The Sandman - Acte I

Adaptation en feuilleton audio du comics scénarisé par Neil Gaiman. Adaptée par Dirk Maggs et produite par Audible.
Disponible en CD (uniquement pour la version en langue anglaise. Elle est accompagnée d'un livret et de trois autocollants) ou en version dématérialisée (en anglais, français, espagnol, allemand ou italien) sur Audible.
La chronique porte sur la version française.


Je vous épargne le résumé de l'éditeur qui en dit trop à mon goût.

La hype autour des comics semble ne plus avoir de limites en ce moment et c’est une excellente chose si cela permet la création d’œuvres telles que celle-ci. D’autant que cela change un peu de ce que l’on nous offre habituellement. L’originalité est dans l’histoire, certes, cependant je fais aussi référence au format. Je n’ai rien contre les films et séries, toutefois je trouve qu’une adaptation audio est une excellente idée. Cela est à la fois original, car peu courant pour une série de comics, et tout à fait traditionnel car l’œuvre s’inscrit dans la longue tradition des feuilletons radiophoniques (malheureusement peu prisés dans nos contrées bien qu’on puisse en écouter de temps en temps sur certaines radios) mais qui sont toujours appréciés et surtout de qualité au Royaume-Uni.
La narration est très différente de celle d’un livre audio, cela s’apparente plus à un film sans l’image et cela plaît ou rebute dès les premières minutes. N’étant pas par nature une visuelle, j’apprécie beaucoup ce format qui laisse place à l’imagination, tout en étant aussi très évocateur si l’on prête attention aux détails de la mise en scène — très soignée dans le cas présent — et à toutes les perceptions inconscientes qu’elle induit. On perçoit notamment où se trouvent les personnages les uns par rapport aux autres. La sonorité est étudiée pour donner une notion de l’espace et les bruitages ne sont pas qu’un fond sonore ; ils enrichissent le récit.
J’ai lu beaucoup de commentaires de gens qui se plaignent qu’on perd toute une dimension de l’histoire sans les images, mais je ne suis pas d’accord. Je n’aime pas particulièrement la partie esthétique des Sandman. C’est juste une question de goût et le talent des différents illustrateurs de la série n’est plus à prouver. Je ne pense pas qu’il faille opposer les deux formats. C’est surtout par snobisme que certains rejettent cette adaptation, de la même façon que la série télévisée, en cours de production, reçoit beaucoup de critiques sur le choix des acteurs alors que l’on n’a pas encore eu  le loisir d’apprécier leur performance. Certains fans de comics sont parfois très sectaires et c’est d’autant plus vrai dans le fandom de Sandman, ce qui est vraiment dommage. Chacune de ces différentes façons d’appréhender des histoires aussi complexes a beaucoup à nous apporter.
Ce feuilleton d’une dizaine d’heures est découpé en épisodes qui pourront peut-être vous sembler sans liens au début (si vous n’avez pas lu les comics), mais vous verrez que tout a un sens dans ces récits et qu’ils se répondent. Vous apprendrez à faire attentions aux détails, même les plus triviaux. L’adaptation couvre les trois premiers volumes de Sandman, soit Préludes et Nocturnes, La Maison de poupée, Le Domaine du rêve. J’ai une affection particulière pour La Maison de poupée et j’ai trouvé la transposition brillante, encore plus flippante que dans les comics. Ces histoires sont de celles qu’on adore ou qu’on déteste.
Sandman n‘est pas pour tout le monde. Certains de ces récits sont très violents et j’ai l’impression que le format accentue le malaise que l’on peut ressentir. Il est parfois pire de deviner sans voir. Je pense surtout à l’épisode « 24h » pour ceux qui connaissent l’histoire…
Quoi qu’il en soit, que la rencontre entre l’auditeur et le feuilleton se fasse ou non, on doit reconnaître le talent avec lequel cette adaptation a été créée. À mon grand désappointement, j’ai dû opter pour la VF, parce que la VO m’égarait avec ses effets de voix et certains accents. Je le regrette, néanmoins je dois dire que la version française est d’excellente qualité aussi.
Je n’avais pas vraiment d’attentes, cependant j’ai été très agréablement surprise. Je me suis laissé emporter très facilement dans toutes ces histoires, même celles qui n’ont pas ma préférence.
J’aime les livres audio traditionnels, mais j’aime aussi beaucoup les feuilletons, surtout quand ils sont aussi vivants et bien interprétés que celui-ci. On devrait nous proposer plus souvent des œuvres de qualité telles que celle-ci. Le deuxième acte est déjà disponible en anglais, la version française est prévue pour fin janvier et je l’ai déjà pré-commandée, ce qui vous prouve mon enthousiasme.

mardi 7 décembre 2021

Dash & Lily


Dash & Lily est une série d’une seule saison en huit épisodes d’environ vingt-cinq minutes chacun. Elle est tirée du roman Dash & Lily’s Book of Dares de Rachel Cohn et David Levithan. Ce roman a eu deux suites. Je ne l’ai pas lu, mais c’est le fait d’en avoir entendu parler qui m’a fait m’intéresser à la série lors d’une journée à buller pendant les vacances de Noël de 2020. Je n’avais pas lu le résumé puisque je connaissais vaguement celui du livre et je pensais qu’il s’agissait d’un film… Autant dire que j’ai été très surprise par le générique de fin du premier épisode. Or, il se trouve que Dash & Lily c’est comme les schokobons : on n’en mange qu’à noël, mais quand on en prend un, il est difficile de s’arrêter. Bon, je vous rassure tout de suite, ce n’est pas aussi écœurant et vous ne risquez pas d’être malade si vous enchaînez les épisodes comme moi l’an dernier, même si vous êtes allergiques aux séries pour ados et aux films de Noël.
Tout commence avec un carnet rouge d’une célèbre marque, déposé dans le rayon d’une librairie tout aussi célèbre, juste à côté de Franny & Zooey de Salinger. Dash, dix-sept ans, promène sa déprime de fin d’année dans ledit rayon (ses deux parents lui donnent la vive impression de ne pas vouloir de lui pendant les fêtes et le bonheur ambiant l’étouffe). Bien sûr il tombe sur le carnet, l’ouvre et y découvre les énigmes laissées par une fille de son âge.
Comme Dash, Lily est une solitaire, mais dans son cas ce n’est pas par choix. Elle peine à se faire des amis, elle se trouve trop bizarre et elle n’a pas les mêmes centres d’intérêt que les jeunes de son âge. Et c’est encore plus dur cette année car elle se retrouve seule avec son frère (qui débute une nouvelle relation amoureuse et n’est pas disposé à passer du temps avec elle). Lily adore Noël, mais le fait d’être privée de sa famille et de voir tout le monde en couple autour d’elle lui pèse, d’où le carnet rouge, véritable bouteille lancée à la mer.
Dash et Lily vont apprendre à se connaître par l’entremise de ce carnet. Ils vont se défier aussi, sortir de leur zone de confort, s’aider à grandir un peu également. Mais vont-ils finir par se rencontrer ? Et surtout l’image qu’ils se sont faite l’un de l’autre sera-t-elle à la hauteur ?
Résumé comme cela, on pourrait croire à une histoire de romance à trois sous, mais c’est beaucoup mieux que ça. Cette série a été une excellente surprise. C’est mignon tout plein et bien dans l’esprit de Noël, c’est drôle et intelligent.
J’ai beaucoup aimé les deux personnages principaux. Dash est un gars un peu grincheux et dépressif, trop intelligent pour son propre bien, mais qui au fond a juste du mal avec les interaction sociales. Quant à Lily, derrière tout son enthousiasme et son côté optimiste guimauve, elle cache de nombreuses blessures ainsi qu’une grande envie de trouver sa place. Ce que j’aime particulièrement chez elle, c’est qu’elle ne veut pas pour autant cesser d’être elle-même, ce qui serait une solution de facilité. Je les ai trouvés l’un et l’autre aussi crédibles qu’attachants.
Les personnages secondaires sont moins fouillés, mais se jouent des clichés pour la plupart, ce qui est somme toute rafraîchissant. J’aurais vraiment voulu une deuxième saison qui leur aurait donné plus d’espace. Ceci dit, la première a une bonne fin et se suffit à elle-même. Je l’ai revue avec plaisir et je pense qu’elle est en train de devenir un de mes classiques de Noël.

De Rachel Cohn et David Levithan, j’ai lu La playlist infinie de Nick et Norah. Je ne l’ai pas chroniqué, mais c’est un chouette livre. Norah est un rien geignarde, cependant je me dois de saluer une romance YA moderne qui sort des clichés habituels.


mercredi 1 décembre 2021

Les dix mille portes de January

Un roman d'Alix E. Harrow, publié chez Hachette dans la collection Heroes.

Présentation de l'éditeur :

Un voyage aux confins des mondes, une aventure fantastique, entre Terremer et À la Croisée des mondes.

Selon January Ruddy, il n’y a qu’une façon de s’échapper de sa propre histoire : c’est de se faufiler dans celle de quelqu’un d’autre…grâce à une des Dix Milles Portes…

Pénétrez, vous aussi, dans le monde magique de l’Ecrit…où certaines paroles tracées ont le pouvoir de modifier le réel, alors que le Mal qui ferme les Portes une à une est sur vos talons…Attention, la magie vient toujours avec un prix…
Tout commence avec une enfant orpheline de mère. C’est toujours comme ça dans les contes et vous trouverez dans ce récit de nombreux clichés tels que celui-ci. Ils sont néanmoins toujours bien employés.. Le père, quant à lui, est absent (bien sûr). Il voyage à travers le monde pour rapporter des objets précieux à un certain M. Locke, dans l’ombre duquel sa fille grandit.
January — tel est le nom de la gamine rêveuse et bien seule qu’il laisse derrière lui — trompe l’ennui en lisant des livres, bercée par la longueur des jours d’attente et contrainte par une éducation stricte qui vise à faire d’elle une « enfant sage qui sait où est sa place ». Tout un programme pour cette enfant à la couleur de peau aussi indéfinissable que ses origines… Elle s’interroge beaucoup, mais ne se rend pas toujours compte qu’elle étouffe auprès de ce protecteur qu’elle aime tant, même après avoir trouvé sa première Porte. Cependant, tout ne peut pas rester figé à jamais et January va devoir choisir entre être une enfant sage ou vivre sa vie.
Qui n’a jamais rêvé à ces passages magiques que nous décrivent les contes et les romans ? Portes magiques, armoires, terriers de lapin et arbres creux ont bercé les rêves d’enfant de chaque lecteur. N’avez-vous jamais eu envie de trouver l’une de ces Portes vers la Féerie ou le Merveilleux ? C’est sur les cordes de tous ces souvenirs que ce roman joue sa mélodie à la fois familière et singulière.
January a soif d’aventure autant que de réponses. Dans ce petit monde policé qui semble se refermer sur elle de plus en plus à mesure qu’elle grandit, les livres sont son oxygène, son unique fenêtre sur l’extérieur, même s’ils lui en donnent une image déformée.
J’ai pris grand plaisir à lire son histoire. January est une jeune fille futée, courageuse et attachante. L’univers dans lequel elle évolue est rapiécé, fruit d’une réalité conventionnelle et des pouvoirs qu’accorde l’imagination à ceux qui en font bon usage.
La narration est construite de manière subtile, assurée en partie par January et complétée par les extraits d’un livre qu’elle a trouvé et dont le rédacteur, tout en lui révélant de nombreux secrets, fait preuve de réticence à tout dévoiler d’un coup. On a beau deviner son identité, comme certains rebondissements à venir, c’est une histoire qui fonctionne avec cette double narration qui génère du suspense, même s’il est artificiel, et évite au lecteur de trouver le récit trop lent. En somme, c’est un bon roman d’aventures qui éveille beaucoup de souvenirs quand on a eu une enfance de lecteur compulsif et beaucoup rêvé de voyages entre les mondes. Les personnages secondaires, alliés comme ennemis, soutiennent bien l’intrigue. J’ai particulièrement aimé Jane et Bad. C’est inventif, très distrayant et bien écrit, une bonne manière d’utiliser les poncifs et motifs qui ont nourri la littérature jeunesse (et adulte quand elle veut bien l’admettre). J’ai passé un excellent moment avec ce roman.