dimanche 14 septembre 2014

Lettres de Shandili

De Philippe Pratx, publié chez Thot éditions.


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lettres de shandili - philippe pratx




Quatrième de couverture :
Philippe Pratx, créateur et webmestre du site Indes réunionnaises, professeur de Lettres ayant exercé en France métropolitaine, en Afrique Noire, en Guyane et à la Réunion, photographe à ses heures, a très tôt touché à la création littéraire. Il poursuit en ce domaine un parcours personnel à l'écart des modes comme des traditions, jouant sur le brouillage des genres, les échos textuels et les limites du pouvoir des mots.
Après de longues années sur cette voie, il réunit pour les deux aeuvres publiées dans ce volume, les fruits de deux passions : pour la civilisation indienne et pour l'écriture.
Le recueil de nouvelles - métissé de roman épistolaire - Lettres de Shandili explore un univers indien à la fois consciencieusement scruté et réinventé. Mais ses enjeux littéraires vont au-delà : disant beaucoup tout en laissant toujours l'essentiel dans le pâle éclat du non-dit, les textes du recueil constituent en eux-mêmes et dans le tissu de correspondances qu'ils entretiennent, un paysage spirituel.
En regard, les poèmes du Devîsadangei, attribués au poète tamoul Aridam, sont un prolongement ou un préalable à ce paysage. Parce qu'une traduction se donne par essence comme perpétuellement par défaut, ces textes à la légèreté presque fruste veulent témoigner de la difficulté de tout langage à appréhender le spirituel.



Lettres de Shandili, évoquant par le titre un roman épistolaire, est en fait un recueil de nouvelles, bien qu’émaillé des lettres d’une jeune femme à un mystérieux destinataire. Ces lettres créent une forme de cohésion entre tous ces récits distincts, comme un recueil caché dans le recueil. Ce qui n’empêche pas les nouvelles elles-mêmes de se répondre ; elles s’effleurent les unes les autres, avec plus ou moins d’insistance, mais toujours en subtilité.
L’écriture est belle et tout en finesse, comme j’avais déjà pu l’apprécier dans Le Soir, Lilith du même auteur. J’ai retrouvé la même magie qui sourdait des résumés de films auxquels avait participé Lilith, mais pas seulement. Il se dégage de ces deux livres la même ambiance fantastique, bien que le roman soit plus sombre que le recueil.
Les récits qui composent ce singulier ouvrage sont très souvent écrits à la première personne, témoignant d’un événement marquant dans la vie du narrateur qui le rend ainsi d’emblée plus accessible au lecteur, l’impliquant intimement dans son histoire, même s’il trouvera sans doute un peu perturbant parfois de passer d’un confident à l’autre. Ce sont des nouvelles tissées d’ambiances et d’impressions plus que d’action ; elles forment un ensemble poétique qui cristallise la fragilité fugace d’instants qui sont ou deviennent hors du commun. Elles sont parfois terre-à-terre, à ce qu’il peut sembler de prime abord, souvent évanescentes ou ouvertement mystiques, elles se révèlent, en tout cas, toujours inspirées et parlent à l’âme du lecteur, le poussent à ressentir et réfléchir. Elles sont les étapes d’un cheminement, comme des lettres immenses sur un parchemin qu’on ne peut lire car on en fait partie.
L’ouvrage s’ouvre sur une nouvelle troublante, Urvashî, dont j’ai aimé l’ambiance floue, qui rappelle un délire fiévreux et qui séduira tout amateur de fantastique. Celle-ci donne le ton. Vient ensuite une succession de textes tout aussi fascinants que je ne pourrais tous évoquer sans gâcher la découverte à qui veut bien me lire. Il est très difficile d’évoquer une nouvelle sans lui enlever sa substantifique moelle.
J’ai adoré L’inventaire du coffre aux épices, ode aux sens, extrêmement poétique, La rivière et ses réflexions autant philosophiques que spirituelles… Et je ne peux omettre de mentionner Jeu de miroirs, texte brillant, un des joyaux de ce recueil et en même temps fermoir qui les relie tous.
Le Voleur est un des textes qui resteront le plus ancrés dans ma mémoire. Je l’ai lu à haute voix, il s’est imprégné dans mon esprit et m’accompagne encore, tout comme Arrière-saison, récit puissamment évocateur et fascinant qui fut pour moi comme un coup de poing reçu dans l’estomac.
Légèrement imprégnées de fantastique ou de réalisme magique, quelquefois de mythologie et mysticisme, ces nouvelles nous emmènent jusqu’en Inde, nous parlent de dieux, d’aspirations et de mystères, autant que de la vie quotidienne des gens que l’on croise en les lisant. Elles mettent à notre portée différentes facettes de l’âme indienne, tout en nous entraînant dans une quête personnelle et spirituelle d’harmonie.
J’ai aimé les fins ambiguës de certains textes, le fait que le chemin soit plus important que le lieu d‘arrivée. C’est un recueil qui se savoure et se médite.


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1 commentaire:

  1. Bonsoir avec un grand plaisir ,je lirai ce livre ou peut on l acheter si on habite l orient? Merci

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