samedi 22 janvier 2011

Le livropathe

Une pièce de théâtre de Thierry Debroux, publiée chez Lansman.

Je ne peux pas appeler ce blog les carnets de lecture d'une livropathe sans rien écrire à propos de cette pièce de théâtre qui a marqué mon parcours de lectrice.
Tout lecteur passionné a de ces petites anecdotes qui lui rappellent pourquoi il aime tant les livres et qui lui démontrent à quel point ils le lui rendent bien. Le hasard est un très bon ami pour le lecteur et parfois il vous amène un de ces livres dont l'histoire se mêle à votre propre histoire... Quelquefois il a des choses à vous apprendre, mais le plus souvent il se contente d'engager avec vous une conversation étrange, tissée de symboles, de signes et de sensations, il est comme un écho partiel et lointain ou comme le reflet d'un miroir déformant. Quoi qu'il en soit, vous savez que son souvenir vous accompagnera longtemps, pour ne pas dire toujours.
C'est le titre de cet ouvrage-ci qui m'a attirée en premier. Il me parlait, me considérant depuis toujours comme une livropathe moi-même et usant de ce terme avec mes amies. Car, comme j'ai eu l'impression que le personnage le sous-entendait, livropathie et bibliophilie sont deux choses bien distinctes... Et il y a longtemps que j'ai appris où se trouvait la limite.
Théo, le livropathe de l'histoire, vit dans une immense bibliothèque, il est collectionneur, mais également, et surtout, lecteur, c'est le gardien de cet univers de papier qui bruisse de tant d'histoires différentes. Cependant Théo a un problème, il n'a jamais pris la peine de classer les livres, se fiant pour les retrouver à son odorat, car chacun a pour lui un parfum différent et parfaitement reconnaissable, facile à suivre à la trace  quand on le connaît, malgré le nombre impressionnant d'ouvrages. Seulement il a perdu son flaire à cause de la poussière et donc dû engager Ava pour l'aider à remettre bon ordre dans son royaume.
Étrange jeune femme que cette Ava, qui semble poursuivie par la mort, élève étonnante et sceptique chez qui Théo décèle le don de "sentir" les livres et à laquelle il va commencer à enseigner son art malgré sa réticence... Mais il y a ce livre interdit dans la vitrine, il y a cette précédente employée disparue sans prévenir ni laisser de traces et surtout il y a Victor qui promène sa mine maussade et ses répliques cyniques dans les allées en portant des accusations...
Qu'on la lise ou qu'on la voit jouée sur scène, cette pièce a de quoi fasciner ; une intrigue prenante et mystérieuse, un rien absurde, des personnages aux histoires respectives vraiment intéressantes... La dernière partie est plus difficile à cerner, tout comme elle est plus sombre, mais il y a un esprit vraiment très particulier dans cette pièce qui fait qu'on veut absolument savoir ce qui va advenir et qu'on songe encore au dénouement longtemps après.
Si elle m'a marquée à ce point c'est que j'y ai décelé des détails qui me parlaient sur les signes, les lecteurs, le hasard et les livres et aussi à cause de la synesthésie du personnage, mais au-delà de ces petits clins d'œil personnels, je crois qu'elle a de quoi plaire à tous les bibliophiles, les amateurs de théâtre, d'ambiances sombres et de bizarreries, les philosophes en herbes et bien d'autres encore pour peu qu'ils veuillent se montrer un peu curieux...

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