Un roman de Katia Lanero Zamora, publié chez ActuSF.
Présentation de l'éditeur :
Nés dans le confort de la famille noble des Cabayol, Vian et Andrès sont deux frères inséparables. Mais dans un pays où la révolution gronde et où les anciens royalistes fourbissent leurs armes pour renverser la toute jeune République, ils vont devoir choisir leur camp... Grande fresque familiale où les batailles politiques rejoignent les bouillonnements personnels, La Machine est une œuvre forte, absolue et puissante.Après son roman très remarqué Les Ombres d’Esver, Katia Lanero Zamora nous y dessine des destins inoubliables.
La Machine nous conte un pays en pleine révolution sociale qui se trouve à un carrefour de son histoire, mais aussi le destin de deux frères qui s’adorent tout en ayant choisi des voies diamétralement opposées. Andrès et Vian Cabayol ont grandi dans le confort malgré une origine roturière qui peine à se faire oublier dans un monde où les aristocrates et membres du clergé sont très jaloux de leurs privilèges. Le grand-père des garçons, s’étant illustré pendant la guerre, a reçu en récompense un domaine et un titre dont il a tiré parti au mieux, reniant en bloc ses origines paysannes. Il a tenu d’une main de fer aussi bien sa famille que ses affaires. Pour autant, les deux derniers héritiers de sa lignée ne sont pas ce qu’il espérait et s’il n’est plus là pour tenter de diriger leur vie, il n’en a pas moins une certaine influence sur leur destinée.
Andrès, l’aîné, semble avoir un profond complexe quant à ses origines. Il peine à trouver sa place dans la hiérarchie sociale. Il n’est ni d’un monde ni de l’autre, mais depuis toujours il a préféré tenter de s’intégrer parmi les paysans, même si ceux-ci le considèrent avec méfiance ou circonspection. Il se jette alors à corps perdu dans les idées machinistes, idéal politique qui s’apparente au communisme, à la fois pour s’intégrer et pour s’opposer à son père, mais aussi parce qu’il finit par croire à cet idéal.
Son frère Vian, quant à lui, est plus désireux de plaire à son père que de s’émanciper. Il a grandi dans l’ombre de son aîné et il cache avec plus ou moins de réussite une part importante de lui-même qui ferait scandale si ses pairs la découvraient. Dans cette société dévote et répressive, qui cherche à contrôler les gens, voire à les réifier, Vian a choisi d’être un soldat, ce qui fait de lui une marionnette dans des jeux de pouvoir. Si son but est de protéger sa famille, il ne s’en est pas moins mis dans une situation très délicate qui peut vriller à tout moment.
Si j’apprécie Andrès pour sa fougue et son caractère, j’ai néanmoins préféré les passages consacrés à Vian. Le fait qu’il soit tenaillé entre ses différentes allégeances et ses propres aspirations en fait un personnage complexe et attachant. Contrairement à son frère, il a conscience qu’aucun choix ne le mènera au bonheur et qu’il n’est qu’un pion sur l’échiquier des puissants. Je trouve cela terrible. Pourtant, ses choix le portent toujours vers ce qu’il croit être la meilleure manière de protéger ceux qu’il aime, peu importe si c’est à son détriment.
J’ai aussi beaucoup aimé Lea, la compagne d’Andrès, pour son courage et sa foi en ses convictions. Elle est très émouvante.
Le roman fait quelques bonds dans le passé pour nous montrer comment tous ces personnages se sont construits, ce qui justifie leurs choix dans le temps présent. J’ai aimé ces passages qui sonnent très vrai et apportent du relief à leur personnalité.
Lea, Andrès et Vian vivent sur des braises, la question n’est pas de savoir si l’incendie partira, mais quand. Entre les royalistes, qui veulent étouffer la toute jeune république, et les machinistes qui réclament la fin des privilèges, il ne peut naître qu’une guerre sanglante et fratricide. Cela, bien sûr, vous rappellera la guerre civile espagnole et ce roman s’en inspire largement. D’ailleurs, bien qu’il soit publié chez un éditeur de SFFF, la seule partie qui est imaginaire est la localisation de cette histoire. Je regarde toujours avec une certaine circonspection ces romans qui sont historiques sans l’être. Je cherche une justification à ce choix qui me paraît souvent être de la paresse intellectuelle servant uniquement à éviter la rigueur que demande l’écriture d’un roman historique. En l’occurrence, ce n’est pas le cas. L’autrice a donné une vraie cohérence à son récit et à ses choix. On croit à son monde et à ses personnages. Elle utilise bien la liberté qu’elle a pris de sortir du cadre historique pour nous offrir un de ces grands romans pour lesquels on se passionne d’un bout à l’autre. Elle a écrit cette histoire avec vivacité et élégance et quand on arrive à la fin, on se sent frustré de ne pas pouvoir lire la suite immédiatement.
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