Un roman de Christine Détrez, publié aux Éditions Chèvre-feuille étoilée.
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Céline, réfugiée dans la maison de sa grand-mère pour soigner un chagrin d’amour, fait des rêves étranges peuplés de musique, d’hirondelles et de plumes.
Chaque soir des notes de piano semblent venir d’une maison abandonnée. Les gens du village disent qu’elle est hantée mais eux semblent habités par un lourd secret.
Josée, une lointaine cousine, qui n’a jamais quitté le village, saura-t-elle aider Céline à faire rompre le silence ?Dans ce roman où le suspense prend les voies du fantastique et de la poésie, la petite histoire va rejoindre la grande, durant cette nuit de fin août, où chaque été meurent les éphémères.
Le premier chapitre m’a désarçonnée. Je me suis heurtée de plein fouet aux émotions du personnage autant qu’au style, très allégorique, qui les décrit. Céline, dont le petit ami vient de la quitter, est littéralement terrassée par le chagrin, au point que sa raison vacille. Cet anéantissement agrippe le lecteur. Je n’avais pas envie de lire ça, pas envie de me plonger dans sa dépression. J’aurais préféré la secouer, lui dire qu’il y a de bien pires épreuves dans la vie… Mais finalement Céline ne se laisse pas engluer dans le désespoir, elle bouge, même si c’est pour fuir.
Elle a besoin de réconfort et ce sont des images de son enfance qui lui reviennent, plus précisément de sa grand-mère aujourd’hui décédée. Elle décide donc de s’exiler dans la maison familiale, dans ce coin de campagne française où le portable ne passe pas et qu’elle a, au final, si peu fréquenté. C’est l’occasion pour elle de se souvenir tout en tenant sa peine à distance.
Après ce démarrage qui m’a laissée circonspecte, j’ai avancé page par page, précautionneusement. Il m’a fallu du temps pour me glisser dans l’histoire et accrocher au style qui oscille entre simplicité du discours retranscrit et envolées lyriques. Les allégories et métaphores sont nombreuses. Céline plonge facilement dans des rêves fantasmagoriques qui la hantent encore au réveil et des songes éveillés, presque des hallucinations. Je ne suis pas réfractaire à un style poétique, mais j’ai eu un peu de mal à me faire à celui-ci. On peut aisément le trouver lourd, surtout quand on ne compatit que très modérément au sort de Céline. Mais au final, cette poésie adoucit l’histoire, elle fait passer avec plus de pudeur, plus d’humanité, les événements que la jeune femme va exhumer.
Il m’a donc fallu apprivoiser le texte, comme Céline apprivoise le passé du village et ses voisins méfiants. La maison vide qui côtoie la sienne et l’histoire de ses occupants commencent à l’obséder. Imagine-t-elle des choses pour occuper son chagrin ? Petit à petit, le besoin de savoir se fait plus pressant, pour elle comme pour le lecteur. Je n’ai jamais réussi à apprécier Céline, mais grâce à cet intérêt commun j’ai marché à ses côtés. J’ai préféré la rude Josée, plus simple, plus franche, plus émouvante en somme.
Dans ce court roman, les secrets affleurent, demandent à être révélés, mais s’échappent quand on veut les saisir de façon trop directe. Ils s’invitent dans le présent par le biais de rêves ou d’hallucinations. Cependant le récit n’est pas fantastique pour autant, je me suis fait une idée plus prosaïque de la façon dont Céline devine certaines choses. Chacun l’interprètera à sa façon.
Après un début hésitant, La Nuit des éphémères m’a offert une belle lecture. L’histoire est triste, mais racontée avec douceur et délicatesse. Elle ne donne pas vraiment une belle vision de l’humanité ni de ces campagnes austères et de la mentalité de leurs habitants. J’ai refermé le livre le cœur serré, effarée par tant de gâchis et de lâcheté, mais contente d’avoir lu ce récit et d’y avoir trouvé une autre façon de se souvenir, de voir l’après-guerre.
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Delacroix Eugène, Vue d’une cour arabe avec colonne et balustrade de bois peint en vert (en bas) ; Tête de jeune femme, de dos, avec 2 nattes (en haut), Album de voyage (Espagne, Maroc, Algérie, janvier-juin 1832), crayon et aquarelle.
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